Aaton dévoile la caméra Delta Penelope

La Lettre AFC n°225

Aaton a présenté la caméra numérique Delta-Penelope opérationnelle au salon de l’IBC 2012. La coopération avec AbelCine sur le projet avait été annoncée au NAB 2010. Au départ, il ne s’agissait que de modifier la caméra Penelope Super-35 pour qu’elle puisse recevoir un magasin numérique interchangeable avec les magasins film. Ce n’est plus le cas. Il s’agit à présent d’une pure camera numérique à viseur optique par obturateur à miroir tournant, dotée d’un capteur CDD Super-35 ; par ailleurs, la forme même de la caméra a été revue pour accentuer le célèbre design Aaton dit du « chat sur l’épaule ».
Caméra Aaton Delta Penelope - Document Aaton
Caméra Aaton Delta Penelope
Document Aaton

Aaton est depuis toujours reconnu pour ses innovations " out of the box ", et la Delta Penelope ne déroge pas. L’un des problèmes des caméras numériques très sensibles (640-800 ISO) est qu’elles nécessitent l’utilisation de filtres ND encombrants pour les tournages extérieurs en forte lumière. La Delta résout le problème par un obturateur original qui permet de diviser par huit la sensibilité apparente du capteur (trois diaphs) : la moitié de l’obturateur est un miroir tournant classique en demi lune renvoyant l’image vers le viseur optique et l’autre moitié comporte un secteur à vingt fentes en store vénitien (caché derrière le miroir) qui est mis en place pour réduire la lumière atteignant le capteur. Cette astuce élimine le besoin de filtres ND qui, trop souvent, provoquent une pollution de l’image aux infrarouges… et collectionnent les poussières.

Miroir obturateur de la Delta Penelope - Document Aaton
Miroir obturateur de la Delta Penelope
Document Aaton


Une autre innovation : Aaton est le premier fabriquant de caméras de cinéma à monter le capteur sur un dispositif flexible qui décale aléatoirement la position physique du capteur d’un demi-pixel à chaque image. Ceci s’apparente à la prise de vues argentique où les grains d’halogénure d’argent en position aléatoire d’un cadre au suivant captent l’image en des endroits différents. Tous les monteurs sur table de montage " pellicule " en ont fait l’expérience, une image fixe qui paraît de faible résolution et granuleuse devient fine et transparente lorsque le film défile. L’intégration temporelle effectuée par l’œil lui-même donne l’impression d’une résolution spatiale accrue.
Lorsqu’on enclenche le décalage " demi-pixel ", la captation sur 3,5 Kpixels passe
à 5K et surtout permet de réduire considérablement le bruit spatial fixe, problème des capteurs numériques à structure " fixe ".
Le décalage de chaque image est enregistré dans les métadonnées du RAW pour permettre le recalage ultérieur lors de l’étalonnage final. Ce capteur mobile sans précédent pourrait bien être l’apogée de la « pensée latérale » d’Aaton.

Parmi quelques autres caractéristiques notables, citons le retour vidéo permettant la préparation des cadres, caméra arrêtée (cela réduit la consommation énergétique et augmente l’autonomie des batteries) ; le sélecteur mécanique accessible des deux côtés de la caméra pour la sélection des fonctions opérationnelles ; le grand écran assistant affichant directement des menus sans sous-menus ; le viseur optique affichant les histogrammes en bord droit du dépoli (disposition reprise du posemètre traditionnel des Aaton) ; les deux grandes ouvertures de ventilation, situées à l’arrière de la tête de l’opérateur, qui par leurs généreuses dimensions réduisent notablement le bruit de flux d’air.
Mentionnons aussi le nombre illimité de véritables LUT-3D utilisables tant pour la visualisation sur place que pour la transmission (sous forme de métadonnées) des ‘intentions’ du directeur-photo vers le coloriste de post-production .

Le capteur Super 35 CCD a été développé en coopération avec Dalsa, un pionnier du cinéma numérique fabricant de " Origin ", première caméra 4K en 2006. Le CCD Dalsa offre un facteur de remplissage (la surface du capteur effectivement utilisée pour capter la lumière) supérieur à celui des capteurs CMOS. Son " global shutter " élimine l’affreux " jello effect " typique du « “ rolling shutter ".

Images de Delta Penelope ouvertes par DaVinci Resolve - Document Aaton
Images de Delta Penelope ouvertes par DaVinci Resolve
Document Aaton


La Delta-Penelope capte des images RAW en 16-bit linéaire au format Adobe CinemaDNG. Ce format libre de droits est totalement ouvert, il est facilement lu par de nombreux logiciels de postproduction et il est compatible avec le protocole ACES. Les fichiers Delta sont directement ouverts dans Baselight et DaVinci Resolve 9 (voir capture d’écran). Quelques images DNG de test sont téléchargeables, ouvrez-les pour en découvrir la pureté chromatique, la dynamique et la structure de type argentique. Si vous n’avez pas accès à Baselight ou Resolve, Aaton recommande l’utilisation du logiciel RawTherapee (Windows) ou Photoshop CS6 (pas les versions plus anciennes).

Les fichiers RAW CinemaDNG sont enregistrés sur un DeltaPack interne remplaçable à chaud à la manière d’un magasin film traditionnel, c’est un RAID-0 de quatre SSD peu onéreux.
Le poste de " Backstage " Aaton Ergon, un PC muni de baies DeltaDock, complète le système Delta (il est chargé du clonage de sauvegarde, de la visualisation grande vitesse, et de la correction des rushes avant génération de DNxHD ou ProRes pour le montage).
Les DeltaDocks sont montables sur Codex Vault et Marquis Mist.

Seuls quelques exemplaires de la caméra Delta-Penelope seront livrés en fin 2012 avant son lancement au NAB 2013.
Pour d’autres points de vue, voir l’article de Jon Fauer publié dans Film & Digital Times, ainsi que le blog du DP australien, John Brawley.

  • Texte inspiré du blog de Mitch Gross