Bilan 2012-2013 des actions de la SRF (AG du 15 juin 2013)

La Lettre AFC n°233

« Parce que ce n’est pas possible de penser que cette assemblée générale ne se tienne que sur la question de l’extension de la Convention Collective. » (Chantal Richard)

Chantal Richard (co-présidente de la SRF)
Nous commençons cette Assemblée générale avec beaucoup de retard, à cause de l’affluence de nouveaux adhérents. Cette affluence pourrait être un signe de mobilisation exceptionnelle pour l’ensemble des sujets portés tout au long de l’année par la SRF. Mais je n’ignore pas que c’est la question de l’extension de la Convention collective qui réunit aujourd’hui tant de réalisateurs. Pour le Conseil d’administration sortant, il aurait été plaisant que ce fut plus fréquent dans l’année, et j’allais dire même, au cours des dernières Assemblées générales – et j’en discutais tout à l’heure avec Malik Chibane : lors des dernières Assemblées générales, il y a deux ans, trois ans, cinq ans, où nous étions moins nombreux.
Mais c’est un » moment difficile, des choses nous opposent, des choses nous divisent, je crois que tout le monde ici le reconnaît (et d’ailleurs est venu à cet effet), et donc je souhaiterais que l’Assemblée générale se tienne de manière assez rapide en ce qui concerne les problèmes statutaires (mais néanmoins obligatoires), car je crois que qui que ce soit qui s’occupera de la SRF demain, la SRF doit être en état de marche – je pense qu’on y tient tous. Nous devons avoir exposé ces problèmes statutaires et avoir reçus les délégués des festivals que nous portons (la Quinzaine des Réalisateurs et
le Festival de Brive), comme il se doit chaque année.
Donc pour se faire, ce que je vous proposerais c’est que l’ensemble des rapports statutaires se fassent assez rapidement, que l’on reçoive ensuite Edouard Waintrop et Christophe Leparc, et Maguy Cisterne du Festival de Brive.
Ensuite il y aura le rapport moral de la SRF puis on ouvrira le débat sur l’extension de la Convention collective.

Il n’est pas possible de penser que cette Assemblée générale ne se tienne que sur la question de l’extension de la Convention collective. Et je pense qu’il est normal, et que vous en conviendrez tous, qu’il y ait un bilan des actions de la SRF, au-delà de la question de l’extension de la Convention collective, et, pour les gens qui ont travaillé depuis l’année dernière, qu’il y ait au moins la restitution de leur travail : qu’avons-nous fait du mandat que vous nous avez confié ?

Ce mandat – déjà depuis deux ans –, repose sur les questionnements suivants : est-ce que la répartition des richesses produites et re-réparties par le Centre national du cinéma, au vu a priori de ses principes fondateurs de mutualisation et de protection d’un certain nombre de films et de la création par rapport marché, est-ce que ces principes-là marchent toujours ? Est-ce qu’il n’y a pas un " mouvement " de
dévoiement de ce que l’on pourrait attendre d’un certain nombre de commissions du Centre ? Je prends deux exemples extrêmement rapides : en ce qui concerne par exemple le documentaire, un documentaire de 52’ qui se fait avec un câble, touchait il y a deux ans 18 000 euros de COSIP, or il touche 9 000 euros cette année. Et… je ne vais pas vous abreuver, mais il est certain que le fait d’avoir travaillé pendant deux ou trois ans à la SRF nous offre un espèce d’observatoire très précis – ceux qui voudraient des précisions, nous les tenons bien évidemment à votre disposition –, en tous les cas, notre constat a été qu’il y a un rôle important que le CNC ne joue plus et c’est dans cette optique et cette vision que nous avons agi. Vision qu’un certain nombre d’entre vous partageaient puisque vous nous avez confié la maison pendant quelques années.

Je pense important – et j’aimerais – que le débat s’inscrive au cœur des projets que nous portons les uns et les autres. Que nous puissions chacun exprimer la vision que nous avons du cinéma, et du monde, et que nous relions nos propositions à l’ensemble des choses qui nous arrivent, qu’elles soient de l’ordre du travail – évidemment de la Convention collective –, ou qu’elles soient de tout autre ordre.

A ce titre-là, je voudrais bien évidemment remercier tout le Conseil d’administration sortant, des… " espaces " - parce que c’est peut-être ça, au fond, aujourd’hui, qui a été le plus important –, des espaces qui ont été créés, pour que les choses s’expriment, pour que des dialogues existent, bien au-delà de nous.

Vous savez, pour ceux qui étaient adhérents – pas ceux qui ont adhéré il y a dix minutes –, que nous avons relancé la Lettre papier de la SRF dans le souci qu’elle soit une vraie tribune – ce qu’elle a été y compris sur la Convention collective, mais sur bien d’autres sujets –, et qu’elle soit ouverte à tous les cinéastes français mais aussi aux cinéastes du monde entier. D’où des cartes blanches, au cinéma africain par exemple, dans la dernière Lettre.

La création de l’Assemblée mondiale des cinéastes, dont nous avons fait une préfiguration il y a deux ans, et que nous avons lancé cette année à la Quinzaine, fait partie de la même démarche. Ce lieu extrêmement important qui nous a permis de porter, à 450 cinéastes qui ont levé la main pour une photo transmise à Doris Pack, membre du parlement européen, notre volonté que le cinéma et l’audiovisuel ne soient pas sortis de l’Exception culturelle.

Nous avons également repris des relations que je dirais extrêmement " fortes " du point de vue de la réflexion, avec l’ensemble des Associations d’Auteurs (l’ARP, la SACD, la guilde des scénaristes et 25 images) pour réfléchir à ce que nous voudrions que le Centre qui nous sert de tutelle, porte, réforme, bouge, révolutionne, et de l’exprimer tous ensemble d’une même voix.

Tout cela a été un travail gigantesque, porté de plus – mais cela c’est la base du travail – par des présences extrêmement renforcées dans les commissions : que tous ceux qui ont fait ce travail soient remerciés.
Et j’aimerais également remercier, car une Assemblée Générale c’est un lieu un peu solennel pour cela – on ne le fait pas tous les jours, tous les jours on cours -, nos trois permanents, Cyril Seassau (délégué général, NDLR), Pauline Durand Vialle (Déléguée adjointe, NDLR) et Hélène Rosiaux (Communication, NDLR), qui je crois ont fait un travail formidable. En fait le boulot des permanents ces dernières années -
et d’ailleurs la vie d’une association -, a extrêmement évolué, lui aussi.
Et tu ne me contrediras pas Malik, il y a une façon aujourd’hui de militer, qu’il faut certainement repenser – les grandes messes se tiennent rarement –, le travail quotidien est difficile, les gens sont eux-mêmes pris dans des bouleversements qu’ils essayent de résoudre comme ils peuvent, et donc on se trouvait effectivement face à une association où il y avait peu de gens, peu d’élus – des décisions très difficiles à prendre quand il y a peu d’élus –, et il a fallu remettre tout cela en route. Ces trois
permanents nous y ont beaucoup aidé, parce que je crois qu’en dehors de leur travail, ils croient tous les trois profondément à la défense des intérêts des réalisateurs comme garants de notre indépendance, à la liberté de création, et à la place centrale du cinéaste dans tout le processus de fabrication et de distribution des films.
J’espère que leurs compétences continueront à aider ceux qui vont prendre en charge la SRF, quels qu’ils soient.

Donc je vais passer la parole à Cyril afin qu’il fasse le rapport statutaire obligatoire.
Je souhaite que nous ayons un débat profond, polémique s’il doit l’être – ça n’a aucune importance –, mais en tous les cas, respectueux de l’idée que la SRF est la maison de tous les cinéastes sans aucune exclusion.

Applaudissements salle

Cyril Seassau (Délégué général de la SRF)
Moi je vais m’occuper de cette partie statutaire. Je vais d’abord faire un point d’ordre, vous avez compris que cette Assemblée générale a un caractère tout à fait exceptionnel, qui j’ai l’impression réjouit beaucoup.
Elle va être dynamique, et du coup à situation exceptionnelle, il faut s’adapter.
Donc je pense que je vais tout simplement de vous demander d’ouvrir les travaux après l’introduction que vient de faire Chantal, et de modifier (je suis obligé de vous en demander formellement l’autorisation), l’ordre du jour. Toute la première partie (que vous avez dans les pochettes que vous avez et que l’on vous a envoyées), que l’on appelle " rapport financier / d’activité ", peut être accélérée, et je vous fais la proposition que cela soit le cas.
Je vous propose que ces rapports ne soient pas présentés exhaustivement, mais je vais me charger d’en faire des synthèses, et de vous lire les trois ou quatre endroits – en particuliers sur les rapports de la commissaire aux comptes – qui statutairement doivent être lus, et je vous propose, au lieu de faire un vote des résolutions (qui sont aussi dans nos pochettes) séparément, de faire un vote global des sept résolutions qui concernent ces rapports financiers, et le rapport d’activité.
Si vous en êtes d’accord, je vais certainement demander si quelqu’un s’y oppose : est-ce quelqu’un s’oppose à cette modalité ?

Visiblement non.
Merci.
Cela va nous permettre d’aller beaucoup plus rapidement et de rentrer du coup en suite directement dans le bilan des festivals, le bilan moral formalisé, et les manifestations de candidatures.

Cyril Seassau lit le rapport du trésorier de l’association - rapport financier, exercice 2012 (…)
Cyril Seassau lit les conclusions de la commissaire aux comptes (…)
Cyril Seassau lit la 3e résolution : validation de ce qui a été proposé par le trésorier (les comptes annuels)
4e résolution et 5e résolution du rapport financier

Vote et approbation du PV du 16 juin 2012 (donc ceux qui étaient adhérents l’année dernière)
Cyril Seassau lit le rapport d’activité, personne ne souhaite y apporter de complément.
7e résolution
.

Et là c’est ce que l’on appelle un timing parfait : puisque pendant que nous avons commencé, vous savez que nous avons laissé ouvert le bureau d’émargement, donc cela vous permet de présenter…
désolé pour ceux qui viennent de finir leurs émargements.
Donc je vais vous proposer, exceptionnellement, de valider l’ensemble des sept résolutions statutaires dont je vous ai donné lecture.
Il est d’usage, sauf si quelqu’un s’y oppose, que cette validation des résolutions statutaires se fasse à main levée.
Est-ce que quelqu’un souhaite un vote à bulletin secret ?

Merci.
Donc nous allons voter à main levée.
Vous avez reçu du matériel.
Celui qui n’a que sa voix lève simplement sa main.
Ceux qui ont un pouvoir, qui ont donc deux voix, lèvent ce carton vert.
Et ceux qui ont un carton rouge, c’est ceux qui ont trois voix, la leur plus les deux pouvoirs.

On va commencer par la fin, là aussi c’est une manière de gagner du temps.
Est-ce que des personnes souhaitent s’abstenir sur l’ensemble des 7 résolutions ?
Vous levez bien haut le temps que l’on puisse compter : 3 abstentions.

Quelles sont les personnes qui s’opposent à l’adoption des 7 résolutions ?
(aucune main ne se lève)

Merci.
Donc les 7 résolutions prévues à l’Assemblée générale ordinaire du 15 juin 2013 sont adoptées à l’unanimité des présents et représentés, moins trois abstentions.

Je suis confus : évidemment, compte tenu de l’émargement que je n’ai pas à l’heure où je vous parle, je n’ai pas le nombre des inscrits.
Je devrais l’avoir sous peu.
Je vous remercie.

La modification de l’ordre du jour par l’assemblée nous permet, quasiment, de rattraper une très grande partie de notre retard.

Nous allons maintenant entendre les… " bilans ", ce serait un bien grand mot puisqu’on leur a demandés d’être extrêmement denses, mais nous allons entendre un écho de nos collègues des équipes des deux festivals,

Maguy Cisterne , Moyen métrage de Brive (…)

Edouard Waintrop , Quinzaine des réalisateurs (…)

Applaudissements salle

Cyril Seassau
Toujours de manière un peu exceptionnelle, on va supprimer la pause et enchaîner tout de suite sur le bilan oral et le débat d’orientation, on fera la pause un peu plus tard. Merci à Maguy et Edouard pour leurs présentations. J’invite les co-présidents à nous rejoindre.
Normalement les dernières personnes qui étaient en train d’émarger ont réussi à le faire, ou sont sur le point de le faire, et du coup le débat d’orientation, l’appel des candidatures, et le débat que vous attendez visiblement, vont pouvoir avoir lieu quasiment à la bonne heure.

Marianne Visier
Bonjour à tous... Je vais essayer d’être brève. Les court métragistes représentent à peu près cinquante pour cent des adhérents de la SRF. Alors je vais vous résumer ce que nous avons accompli et mis en route cette année au court métrage. Nous avons organisé un débat au Festival international du film de Clermont-Ferrand pour donner la parole à des réalisateurs européens en leur demandant comment ils diffusaient leurs films en Europe : comment on diffuse un court-métrage en Europe, comment ça se passe.
On peut estimer que ce coup d’essai a été plutôt un succès, la salle était comble, et toute la filière du cinéma et du court métrage était là. Il y avait Unifrance, l’Agence du Court Métrage, le SPI. Le fait de discuter avec ces réalisateurs polonais, belges ou allemands était fort intéressant et instructif sur le court métrage en Europe.
Dans l’ordre chronologique : début mars, on a lancé une étude sur le " crowdfunding ". Un groupe d’adhérents a travaillé sur les plates-formes participatives. Le " crowdfunding " est destiné à réunir des fonds pour des projets cinématographiques. Dans un premier temps on a récolté les témoignages de tous ceux qui étaient passés par cette plate-forme pour les étudier. On a aussi lancé un travail sur les contrats pour les courts métrages, parce que bien souvent les gens qui arrivent dans cette filière ne
connaissent pas et ne savent pas ce qu’ils signent. Donc on a commencé à travailler sur les contrats de la SACD, en reprenant point par point les contrats de la SACD, en récoltant des remarques et des expériences des réalisateurs qui étaient là.
Nous avons organisé un autre débat lors des Rencontres Internationales du Moyen Métrage de Brive.
On s’y est demandé si la diffusion d’un court-métrage était une nécessité pour le film suivant (que représente le succès d’un film pour le film suivant ?) avec notamment des réalisateurs comme Hubert Viel qui a eu le prix pour Artémis cœur d’artichaut.
Autrement, la SRF est co-présidente du ROC, il y a des réunions de travail tout au long de l’année. On a rencontré les chaines de la TNT afin de les inciter à programmer du court métrage, on a rencontré le CSA. On a participé à de nombreuses réunions avec le CNC – les commissions du Prix de qualité vont
se multiplier cette année. Enfin, on voudrait clôturer le dossier sur l’autoproduction sur lequel on travaille depuis deux ans. Le fait d’avoir organisé ce débat à Brive nous a permis de tirer des conclusions sur la postproduction de ces films. Nous comptons continuer de travailler sur les contrats de court métrage et clôturer le travail sur l’autoproduction.

Applaudissements salle

Jean-Jacques Jauffret (co-président de la SRF)
Vous savez qu’on participe à de nombreuses commissions, à des observatoires dans les organisations de cinéma, et évidemment notre travail a reposé sur des constats et des analyses qui y sont faites.
Vous connaissez la plupart de ces constats. En revanche, nous avons observé que ces caractéristiques principales ont fortement augmenté ces dernières années.
Ces constats sont les suivants : le temps de l’écriture et de la conception est toujours aussi peu valorisé, la relation des cinéastes et des producteurs aux diffuseurs, aux distributeurs et aux banques, pousse à l’uniformité des styles, des castings, des formats - pour ne pas dire à l’auto-censure.
D’ailleurs, sur l’autocensure, pendant l’Assemblée des Cinéastes, c’était intéressant de voir comment, en Europe, les cinéastes sont poussés d’une façon économique à l’autocensure – voire même d’une façon politique –, puisqu’on a reçu une cinéaste hongroise, Agnès Kocksis, qui a parlé d’une censure politique puisque le CNC hongrois a demandé carrément le " final cut " aux réalisateurs qui obtenaient des subventions du CNC hongrois. On voit les dérives de cette autocensure économique, et on voit les dérives de cette autocensure politique en Europe.

On a aussi observé que les guichets de financement se raréfient, et après cinq ou six guichets, finalement, eh bien il n’y a plus rien !
On a observé que tourner coûte que coûte pousse trop souvent, et malheureusement, à malmener les métiers de celles et de ceux qui fabriquent nos films.
Réaliser un second film est encore plus difficile qu’un premier dans les témoignages des adhérents et parmi les réalisateurs, dans les différents observatoires et les différentes rencontres – et plus encore un troisième. On s’aperçoit aussi qu’il s’écoule de plus en plus de temps pour les réalisateurs entre les films.

La précarisation des cinéastes s’est fortement accrue ces dernières années. Si Audiens par exemple est devenu un des partenaires de la SRF, c’est parce que dans un premier temps ils nous ont alerté sur une demande croissante de réalisateurs – et de vieux réalisateurs – qui avaient besoin d’aides sociales.
Là aussi il faudra donc se poser la question du salariat, puisque ce ne sont pas les droits d’auteur – d’après ce que nous dit Audiens –, qui arrivent à financer les retraites de ces réalisateurs. Et Audiens nous alerte en nous disant que les demandes ont doublé les cinq dernières années. Là aussi il faudra se poser la question du rapport entre le droit d’auteur et le salaire.
Les auteurs assument en amont un risque qui va en s’accroissant, sans être forcément reconnu. La rémunération, les remontées de recettes, sont rares et souvent inexistantes : ce risque que prend l’auteur au départ du film (et peut-être ici vous en avez tous pris) et en tous les cas moi je peux vous montrer des contrats d’auteur avec des participations, or je n’ai jamais vu le fruit d’une seule participation sur les remontées de recettes.

C’est nourri de toutes ces informations et de tous ces constats, que nous avons porté dans les différentes organisations et dans les différentes commissions, quelques idées qui ont émergé des Conseils d’administration, des rencontres avec d’autres organisations d’auteurs (notamment à Cannes où l’on a renoué un dialogue avec l’ARP, la SACD, la Guilde et 25 images).

Ce sont ces idées que nous défendons actuellement aux Assises du cinéma : on y a porté l’idée d’une reconnaissance du statut du réalisateur et d’un salaire minimum garanti, qui évidement ouvre des droits sociaux, et un accès direct au fonds de soutien.
Plus qu’un accès direct au fonds de soutien, il y a une idée qui a emmergé, c’est de dire que finalement le réalisateur pourrait porter une partie du fonds de soutien. C’est-à-dire que sur son second film – sur son film suivant pardon –, il pourrait y avoir une partie du fonds de soutien qui serait mise dans la production. A ce moment-là, ce ne serait plus simplement la production qui porterait le fonds de soutien du film d’avant, mais aussi le réalisateur.

On a aussi émis l’idée d’avoir un couloir de rémunération à la source au premier franc. C’est une idée qui est proposée plus particulièrement par l’ARP et par Michel Hazanavicius. L’idée que la rémunération soit un couloir prioritaire non pas après récupération des RNPP, mais directement au premier franc – pardon premier euro.
L’idée c’est que ce n’est pas au producteur " d’après " de payer le succès du film " d’avant ", mais c’est au film de payer le succès qu’il est en train de faire.

On a aussi travaillé sur la rémunération des auteurs sur la VAD, conformément aux accords de la SACD de 1999 qui ne sont toujours pas respectés par les producteurs.
Nous avons aussi demandé une augmentation des aides de développement.
Nous avons émis l’idée d’un rééquilibrage du sélectif par rapport à l’automatique, soit en nombre soit en volume financier.
Nous avons porté l’idée d’une réforme du COSIP, avec éventuellement, pour le documentaire un bonus à la création.

Nous avons travaillé sur la transparence des comptes dans toute la chaîne – on parlait tout à l’heure de la commission d’agrément –, quand on dit toute la chaine, c’est au niveau de la production, au niveau de la distribution, mais également au niveau de l’exploitation.
L’idée qui a été évoquée tout à l’heure de la limitation des écrans pour donner plus de chance aux films de la diversité, c’est aussi une des idées que nous avons portées dans ces différentes commissions.
Nous avons pris la position de réaffirmer que la salle était la première marche de la chronologie des médias.
Nous avons aussi porté l’idée que la participation des nouveaux acteurs entrants dans la diffusion du cinéma, tels que l’internet, puissent participer au préfinancement du cinéma.
Depuis deux ans, je me bats personnellement mais collectivement aussi, sur le déplafonnement de l’argent public. Vous savez que le rapport de l’argent public et privé à l’agrément doit être de 60/40 dans les budgets – 60 % d’argent public et 40 % d’argent privé – pour qu’il y ait une possibilité d’obtenir l’agrément. Ce n’est pas vrai dans toute l’Europe. Il y a des cinématographies en Europe qui ont 100 % d’argent public. C’est vraiment un choix par pays qui est entériné par l’Union Européenne, et ce choix que la France a fait de 60/40 % peut très bien être rediscuté avec l’Union européenne, pour que justement les films de la diversité puissent à un moment donné, obtenir plus d’argent. Il y a des films (et je prends l’exemple du mien) qui ont obtenu l’agrément, et à qui on a retiré l’agrément sur un rapport de la Cour des comptes et sur un contrôle de l’Europe. Au départ, la commission d’agrément a donné l’agrément, puis finalement, deux mois après ça a été retiré. Il y a cinq films actuellement qui sont en attente d’agrément et pour lesquels le CNC n’a toujours pas pris de décision.

Nous avons été vigilants, et il faudra rester vigilants, sur le dispositif de territorialité des aides régionales. Vous savez qu’actuellement, dans le Plan Com’ de l’Union européenne, on veut déterritorialiser les aides régionales. Ce qui fait que tout le monde va pouvoir demander des aides dans toutes les régions. Au départ, on se dit : « Pourquoi pas, ça permet d’avoir plus de guichets ». A l’arrivée, on s’aperçoit qu’il va y avoir une recrudescence de projets dans toutes les régions. Là aussi il va falloir être vigilants. Si jamais le Plan Com’ est adopté, les critères d’éligibilité des régions vont fortement changer et si ces critères changent, là aussi on a très très peur des choix des régions par rapport à la diversité. Elles iront finalement sur des films qui pourront s’afficher par rapport à leurs politiques, leurs hommes politiques, pour pouvoir obtenir des budgets.

Nous avons aussi travaillé sur l’idée du plafonnement du salaire des acteurs.
On a aussi émis l’idée d’une augmentation des montants investis par le groupe France Télévisions dans le cinéma de la diversité.
Vous savez que, par exemple Canal+ a une clause de diversité alors que France Télévisions n’a pas de clause de diversité. Au moment où on est en train justement de renégocier la part des investissements de France Télévisions dans la création, il serait important de porter l’idée que France Télévisions ait une obligation et une clause de diversité.

Nous avons aussi porté l’idée qu’il y ait une cohérence des politiques publiques. Ce dont on s’est aperçu en analysant les chiffres des films qui avaient l’avance sur recettes premier et deuxième collèges, c’est que France Télévisions n’investissait plus beaucoup, ne mettait plus beaucoup d’argent sur les films " avance sur recettes ". Les cinq dernières années, sur les films du premier collège, France Télévisions est intervenu sur trois projets, quatre projets pardon, sur les avances sur recettes qui ont été données. Ce ne sont pas les derniers chiffres parce qu’on a eu les statistiques jusqu’à 2009. En tous cas, entre 2005 et 2009, France Télévisions n’a investi que sur quatre projets ayant eu l’avance sur recettes premier collège.

Il existe, vous le savez, un dispositif de passage entre le court et le long métrage qui est une aide directe au développement sur le couple réalisateur-producteur. Là aussi nous demandons au CNC, puisque le CNC a beaucoup d’argent, de pouvoir augmenter ce dispositif du passage du court au long métrage.
Nous avons émis l’idée qu’il y ait une mise en place d’une aide spécifique sur les trois premiers films.
On s’aperçoit qu’il y a une disparition des réalisateurs qui est de l’ordre de 70 % entre le premier et le deuxième film, et de l’ordre de 30 % entre le deuxième et le troisième film (chiffres du CNC).
Là aussi, il nous semble qu’il serait important de pouvoir soutenir le passage du premier au deuxième, et du deuxième au troisième. D’ailleurs dans ce dispositif on a aussi émis l’idée qu’une case " émergence premier deuxième et troisième film " puisse être créée, notamment chez France Télévisions, qui pourrait financer sur un couloir prioritaire, les premiers deuxièmes et troisièmes films.

Enfin, nous pensons qu’il faut une réforme de l’agrément. Moi, je siège à l’agrément et il s’y passe parfois des choses hallucinantes. A une commission d’agrément, un dossier retoqué, on dit : « Ah mais c’est un jeune producteur, il ne sait pas faire un dossier d’agrément ! », et finalement quinze jours après le dossier est refait et le dossier n’est pas retoqué. On se demande quelle est la transparence des dossiers d’agrément puisque a priori il est facile d’avoir des " spécialistes " : d’ailleurs, il se crée aujourd’hui des postes importants chez les producteurs et assistants de producteurs, de spécialistes du dossier d’agrément. On embauche des spécialistes du dossier d’agrément pour pouvoir obtenir l’agrément. L’agrément aujourd’hui n’est même plus une source statistique, c’est-à-dire que les budgets qui sont présentés à l’agrément ne correspondent souvent pas du tout aux budgets des films.
Il y a deux ans, sur le film de Jean-Jacques Annaud, la commission d’agrément avait émis un avis défavorable pour non respect des contrats, puisque les contrats des techniciens étaient des contrats tunisiens : vous savez très bien qu’on ne peut pas demander l’agrément sur des contrats qui ne sont pas des contrats de droit français. Là aussi il y avait eut un avis défavorable. Et bien sachez que le président du CNC a quand même signé l’agrément, et que le film de Jean-Jacques Annaud a donc eu
l’agrément.
Ces anecdotes, c’est juste pour vous montrer, comme le disait Chantal tout à l’heure, que les principes de répartition du fonds de soutien et des richesses du cinéma, ont tendance à se dévoyer. Moi je pense honnêtement qu’il y a beaucoup d’argent, et qu’on peut travailler pour récupérer – et notamment dans la répartition du fonds de soutien –, pas mal d’argent.

Enfin, si notre secteur accepte une meilleure répartition de ses richesses et un système régulier de mutualisation, nous pourrons soutenir un cinéma de création dans un cadre conventionnel. Il ne faut pas diviser le cinéma et les cinéastes par tranches, ce n’est une très bonne idée à mon avis, il vaut mieux réguler le système pour protéger dans l’équité et l’indépendance la liberté de création.

Voila donc ce qui nous a pris beaucoup de temps cette année, ce qui nous a animés dans ces combats. Je ne vous cache pas que ce sont des heures et des heures passées à travailler ensemble d’une façon collective, et à essayer de porter ces idées dans toutes ces commissions. Ces chantiers, il faudra les poursuivre, il faut les poursuivre l’an prochain, quelle que soit l’issue de l’élection. Je vous remercie.

Applaudissements salle

Chantal Richard
Au fond, je pense que pas grand chose dans le rapport de Jean-Jacques va poser un problème si ce n’est la dernière phrase – et qui va être l’objet du débat, à savoir : d’avoir porté l’idée que le cinéma n’était pas un monde à part, que le droit conventionnel du travail devait s’y exercer là comme ailleurs, et que c’était au CNC et à nos tutelles de porter ce pour quoi ils sont faits, à savoir des corrections du marché – le coût du travail appartient au marché, ainsi qu’un certain nombre de choses, le coût aussi des matériaux finalement appartient au marché du travail, au marché économique –, et que si un jour la fondation de ce Centre a eu du sens, c’était pour être le correctif pour les films qui ne peuvent pas y répondre, ou dont les coûts empêcheraient de les faire.
Donc ça c’était une idée. C’est un principe qui nous a animé. Je précise quand même que le Conseil d’Administration n’est pas régi par le centralisme démocratique, donc d’autres ont pensé autrement.
Cela a occasionné des débats, des discussions, qui n’ont pas été simples, qui n’ont pas été homogènes.
D’ailleurs chacun s’exprimera ici sur ces discussions, également ceux qui ne sont pas d’accord avec ça.

Je tiens simplement à rappeler cela, avant que ne s’ouvre la discussion sur : où nous en sommes aujourd’hui, quelles sont les propositions, et qu’est-ce qu’on fait ? Je pense important que vous sachiez dans quel esprit, à un moment donné, nous nous sommes …" battus " – ce n’est pas le mot, car je pense qu’il y a un certain nombre de mots un peu compliqués à employer…
Nous avons fait circuler cette idée, là où les gens étaient en place pour décider et discuter d’une convention collective – à savoir la commission mixte paritaire, commission à laquelle, je le rappelle (car beaucoup de choses ont été dites) nous ne siégeons pas…. donc nous avons rencontré les partenaires qui, eux, siègent et mènent les négociations, et nous avons insufflé cette idée.

J’ai le regret de dire que nous avons été bien seuls pour le faire, y compris avec les producteurs indépendants qui ne nous ont pas suivi sur cette question, et qu’à un moment donné, ça s’est incarné par les partenaires auxquels notre idée posait des problèmes de droit, de loi.
Mais je crois que toutes les idées émises aujourd’hui posent des problèmes de cadre légal, pas simplement celle-ci.
Nous avons émis cette idée, et elle s’est transformée au cours des négociations en clause dérogatoire – qui n’est pas sans poser problème, mais en tout cas, elle s’est, dans l’histoire, transformée comme ça.

Et je crois important, parce que j’ai quand même entendu beaucoup de choses, de redonner le cadre de pensée dans lequel notre action, nos propos, nos envies d’insuffler des idées là où l’on pouvait le faire, là où nous étions entendus, et là où nous n’étions pas entendus non plus – de quelle idée cela préside.

Et je crois qu’il est quand même important qu’aujourd’hui on ait à la fois un débat qui permette d’opposer des propositions, qui permette de parler très concrètement de cette convention collective. Je sais que tous le souhaitent, et je souhaite aussi que chacun puisse dire au fond pourquoi, au nom de quoi, on défend cela.

On ne va pas durer plus longtemps, je vous sens très impatients, donc le débat est à la salle.

Applaudissements salle