Channa Deshapriya, directeur de la photographie sri lankais

s’entretient avec Eric Guichard et Tommaso Vergallo

par Eric Guichard La Lettre AFC n°144

Lors d’une visite au bureau de l’AFC, Channa Deshapriya, directeur de la photographie de Sulanga enu pinisa (La Terre abandonnée, prix ex-æquo de la Caméra d’Or cette année à Cannes) de Vimukthi Jayasundara, s’est entretenu avec Tommaso Vergallo, directeur des productions cinéma numérique chez Digimage, et Eric Guichard.
Asoka Handagama, réalisateur de A Letter of Fire, a effectué les traductions.

Comment avez-vous rencontré le réalisateur ?

Eric Guichard, Tommaso Vergallo et Channa Deshapriya (Photos JJ Bouhon)
Eric Guichard, Tommaso Vergallo et Channa Deshapriya (Photos JJ Bouhon)

Channa Deshapriya  : J’ai rencontré Vimukthi, il y a quinze ans lors d’un atelier de théâtre, puis j’ai fait un court métrage avec lui et maintenant son premier long métrage.

Quelle pellicule avez-vous utilisée ?

Channa Deshapriya  : De la Kodak 5217 et 5218. Le tournage a duré 25 jours.

De quel matériel disposez vous actuellement ?

Channa Deshapriya  : Nous avons tourné avec une Arri BL IV et des objectifs Zeiss. Il n’existe qu’une Arri BL IV dans tout le pays. En général nous travaillons avec un laboratoire indien, mais pour ce film, nous sommes allés à Singapour, au laboratoire FTS (Film Technical Service), pour le développement et le télécinéma des rushes que l’on a visionnés sur Beta SP.

Le directeur de la photographie Channa Deshapriya
Le directeur de la photographie Channa Deshapriya

A quel moment avez-vous décidé d’étalonner numériquement le film ?

Channa Deshapriya  : Beaucoup de prises de vues de paysages tournés de jour sont en nuit américaine, une bonne partie du film. Nous n’avons pas pu obtenir d’éclairage additionnel dans cette région du Sri Lanka, comme des ballons, c’est pourquoi nous avons tourné en nuit américaine et non de nuit. Mais cela a nécessité un traitement particulier qu’il aurait été difficile à obtenir avec un étalonnage traditionnel.
En effet, tout en séparant les trois éléments, terre, eau et ciel, on devait renforcer le côté obscur de l’image, indépendamment de la teinte bleue.

Au début vous vouliez étalonner traditionnellement, quand et pourquoi avez-vous décidé d’étalonner numériquement tout le film ?

Channa Deshapriya  : Dès le départ, j’ai parlé à la production de ces difficultés inhérentes aux nuits américaines. Nous devions les étalonner numériquement. Puis, pour conserver une certaine harmonie de l’image, introduire quelques rectifications de lumière, nous avons étudié la possibilité financière d’étalonner tout le film en numérique.

Comment une société comme Digimage découvre-t-elle ce projet ?

Tommaso Vergallo  : Je connaissais depuis longtemps le producteur du film, Philippe Avril, chez Unlimited. Il est venu me montrer des rushes sur une DV Cam ainsi qu’un petit test fait rapidement sur Avid, pour renforcer le côté nuit américaine. J’ai donc vu ces plans, avant/après et j’ai été totalement séduit par la photo de Channa.
On a ensuite étudié ce que l’on obtenait en isolant les parties à traiter comme des trucages. Nous avons fait des tests d’étalonnage, et nous avons décidé de passer tout le film en étalonnage numérique afin d’harmoniser l’image comme Channa le souhaitait vu qu’une moitié du métrage correspondait à une ambiance à traiter en numérique.
Le négatif a été rapatrié en France, où l’on a fait un montage avec des poignées de sécurité sachant que c’est un film très peu découpé (200 plans au plus, peu de prises, mais longues, parfois 4 minutes).

Quel type de transfert as-tu utilisé, un système numérique 2K ou un transfert sur bande HD ?

Tommaso Vergallo  : Ni l’un, ni l’autre. C’est un spirit data cine pour l’acquisition mais pas en mode HD sur bande, mais sur un serveur que l’on a co-développé avec l’Allemagne. C’est du 1920 x 1080 en résolution, non compressé, en flux data. L’étalonnage a été effectué par Laurent Desbruères, toujours en natif non compressé, d’après ces disques durs sur da Vinci 2K Plus. Digimage a préparé des disques durs, bobine par bobine, soient six disques durs sur lesquels il y avait les datas du film. Transférés sur Arrilaser chez Eclair, avec par la suite un tirage standard supervisé par Serge Antony. Channa n’a pas pu participer à l’étalonnage en raison d’un tournage. Il était donc venu bien avant l’étalonnage, aux alentours de Noël avec le réalisateur, afin de poser l’univers colorimétrique des 200 plans.
L’étalonnage final a duré une dizaine de jours. Channa n’a découvert la copie définitive qu’en projection à Cannes et il en était très content.

Vimukthi Jayasundara a été formé à la réalisation à l’Institut du Cinéma et de la Télévision de Pune, en Inde. Il a obtenu une bourse d’études en France où il a intégré l’Ecole d’Art du Fresnoy avant d’être résident à la Cinéfondation du Festival de Cannes en 2003.

Quelques images de La Terre abandonnée avant et après étalonnage numérique effectué à Digimage par Laurent Desbruères

La Terre abandonnée, paysage avant étalonnage
La Terre abandonnée, paysage avant étalonnage
La Terre abandonnée, paysage après étalonnage
La Terre abandonnée, paysage après étalonnage
La terre abandonnée, le vieil homme et l'enfant avant étalonnage
La terre abandonnée, le vieil homme et l’enfant avant étalonnage
La Terre abandonnée, le viel homme et l'enfant après étalonnage
La Terre abandonnée, le viel homme et l’enfant après étalonnage
La Terre abandonnée, jeune femme à la fenêtre avant étalonnage
La Terre abandonnée, jeune femme à la fenêtre avant étalonnage
La terre abandonnée, jeune femme à la fenêtre après étalonnage
La terre abandonnée, jeune femme à la fenêtre après étalonnage
La Terre abandonnée, l'homme et l'araignée après étalonnage
La Terre abandonnée, l’homme et l’araignée après étalonnage