Comme trop souvent...

par Jean-Noël Ferragut

par Jean-Noël Ferragut La Lettre AFC n°150

Michel Hu s’en est allé au beau milieu du mois de décembre 2005.
C’était un étalonneur reconnu et apprécié.

Les directeurs de la photographie Pascal Lagriffoul et Jean-Pierre Sauvaire apporte également le témoignage de leur émotion.

Comme trop souvent, de tristes circonstances nous amènent à parler dans la Lettre de gens que l’on estime. Et encore aujourd’hui, en la personne de l’étalonneur Michel Hu qui vient de nous quitter, il y a plus de deux semaines.

Plongeons dans nos souvenirs et remontons le temps. Nous sommes en 1983. Ayant à peine terminé de porter mes culottes courtes de jeune " opérateur " de long, mon métier commence tout doucement à rentrer, curieux par nature et par formation de découvrir toutes sortes d’images, vision toujours enrichissante. Mais n’est-ce pas construire son métier d’opérateur que de se mesurer à ses pairs au contact de leurs images ?

Au hasard d’une séance de cinéma, je suis particulièrement frappé par le travail effectué sur le film de Raoul Ruiz Les Trois couronnes du matelot photographié par Sacha Vierny. Défile ainsi sous mes yeux grands ouverts la preuve par a + b que derrière de telles images, travail évident non seulement de lumière mais aussi d’étalonnage, se cachent nécessairement deux talents singuliers. Cultivant le ferme espoir d’associer au plus vite à ce nom cité au générique un visage.

Ce n’est qu’un peu plus tard, au détour de l’un des nombreux couloirs labyrinthiques d’Eclair (mais n’est-ce pas là le lot de tout couloir courant dans les laboratoires ?), que je fais ta connaissance, Michel, car la maison t’a donné pour tâche de magnifier ce noble format qu’utilisent, entre autres, les plus argentés des sans le sou, le 16 mm. Et de te confier, à la lumière du dépoli qui éclaire ton visage et avec pour témoins les bobines qui t’entourent, que j’avais particulièrement apprécié le fruit de votre collaboration, Sacha Vierny et toi.

Malheureusement, la chance ne m’a pas permis de travailler sur un film en ton auguste compagnie, du temps où tu œuvrais chez Eclair, puis chez Ciné Dia, enfin chez GTC. Savourant uniquement le plaisir, chaque fois renouvelé, de refaire ensemble le monde, et surtout nos métiers, dans le tourbillon des soirées professionnelles prévues à cet effet...

Plus récemment, était-ce il y a un an ou deux lors d’une rencontre fortuite au beau milieu du pont de Joinville, l’un revenant du labo, l’autre s’y dirigeant, nous avons émis l’idée, Jean-Pierre Sauvaire et moi, de prendre un moment pour s’entretenir avec toi. Histoire de rédiger par la suite un article pour la Lettre où tu ferais profiter le lecteur de ton expérience et de ta façon de concevoir et d’exercer ton métier.

Avouons-le aujourd’hui, nous avons été pris de court. Comme trop souvent... Alors adieu, Michel !

PS Selon ses dernières volontés, les cendres de Michel Hu devaient être dispersées par son ami Alain Guarda sur le flanc d’une montagne qu’il aimait tant, le Mont-Blanc. L’AFC présente à sa femme Joëlle et à ses proches ses plus sincères condoléances.