Debout de l’autre côté de la Méditerranée...

par Gilles Porte

par Gilles Porte La Lettre AFC n°206

Dans deux précédentes parutions de la Lettre (179, septembre 2008, et 172, janvier 2008), j’avais mentionné la complicité qui peut exister parfois entre un 1er assistant réalisateur et un directeur de la photographie... Entre Elyes Zrelli et moi-même, alors que nous tournions en Egypte, près du canal de Suez...
Elyes habitait Tunis et travaillait comme 1er assistant réalisateur dans le cinéma... Il est impossible qu’une personne travaillant dans le cinéma en Tunisie ne connaisse pas Elyes Zrelli. C’était mon ami comme il était l’ami de beaucoup...

Je parle à l’imparfait parce qu’Elyes n’est plus, même s’il restera toujours le père de Lina et Seif et le parrain de ma fille Syrine (prénom que j’ai choisi à Bizerte alors que j’étais en tournage avec lui)...
Elyes aimait demander aux étrangers qu’il rencontrait comment ils différenciaient un Tunisien d’un autre homme d’Afrique du Nord. Comme personne ne trouvait jamais la bonne réponse, il donnait la solution en imitant les chiens en plastique qui se trouvent sur la plage arrière d’une voiture et qui bougent leurs têtes de haut en bas en fonction des secousses de la voiture...

Elyes précisait à tous les étrangers qu’il rencontrait que les Tunisiens étaient réputés pour suivre un dictateur qui n’était pas vraiment éclairé (contrairement à un autre dont une grande avenue de Tunis porte le nom) en hochant de la tête sans se poser trop de questions...
Aujourd’hui, les Tunisiens montrent au monde entier une nouvelle direction qu’ils ont prise sans rien demander à personne...
Aujourd’hui les chiens en plastique ont déserté les plages arrière des voitures de l’autre côté de la Méditerranée parce que dans une Révolution il n’y a plus de place pour les chiens en plastique...
Aujourd’hui, Elyes serait si fier de voir ces hommes et ces femmes, ses frères et ses sœurs, quitter le rôle de figurants pour devenir des acteurs de premiers plans...
Aujourd’hui, si vous saviez comment je suis fier que ma fille s’appelle Syrine !!!
Aujourd’hui, je pense aussi très fort à Doha, Lina, Seif, Jilani, Brahim, Rafia, Iheb, Fares, Kalthoum, Monia, Hechmi, Amine, Kamel, Moez, Ammar, Mouna, Imed, Lotfi et tous les autres qui se tiennent debout de l’autre côté de la Méditerranée...