Entretien avec Jacques Delacoux, PDG de Transvideo

Par Jean-Noël Ferragut, AFC et Vincent Jeannot, AFC

par Jean-Noël Ferragut, Vincent Jeannot La Lettre AFC n°228

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Rencontre avec Jacques Delacoux, l’un de ces membres associés de l’AFC qui, depuis que sa société Transvideo a rejoint l’association, n’a jamais entamé son " capital-sympathie ". Globe-trotter infatigable, entre salons internationaux, workshops, festivals et master class, il nous a ouvert les portes de son entreprise à Verneuil-sur-Avre. Pour évoquer ses débuts, les outils qu’il crée, la façon dont il conçoit son métier, ses rencontres, ses choix et, somme toute, ce qu’est tout simplement pour lui le cinéma.
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Vincent Jeannot et Jacques Delacoux
Au 1er plan, le moniteur Transvideo RainbowHD - Photo JN Ferragut © AFC

Jean-Noël Ferragut : A quand remonte la création de Transvideo ?

Jacques Delacoux : J’ai créé Transvideo en 1985, j‘avais 27 ans. A l’origine, c’est une société qui faisait des adaptations spéciales sur des produits de constructeurs comme Sony, Panasonic, Bell & Howell, Toshiba, Bang & Olufsen, Pioneer, entre autres, beaucoup de constructeurs asiatiques dont les produits n’avaient pas toutes les fonctions souhaitées. Je rajoutais par exemple le SECAM, qui était un procédé absolument extraordinaire pour la transmission hertzienne d’images couleur.
Je développais des systèmes qui permettaient de lire ou enregistrer des K7 SECAM, de recevoir des programmes français pour des pays qui ne le faisaient pas. Ce qui m’a beaucoup apporté au niveau électronique parce la plupart des constructeurs utilisaient des circuits intégrés dont j’arrivais à me procurer les schémas. Ce qui m’a donné de bonnes indications sur la façon dont tout cela fonctionnait.

Très vite, nous avons eu des partenariats avec des gens comme Sony et Panasonic dans des marchés spécifiques comme celui de la duplication. A ce que j’en sais, nous sommes la seule entreprise au monde qui ait été autorisé par Sony et Panasonic à mettre son nom à côté du leur – " Pal/Secam by Transvideo " – sur l’un de leur produit.
C’était des duplicateurs VHS professionnels pour lesquels je développais des applications afin d’y rajouter le SECAM. Je partais au Japon avec mon produit sous le bras pour le montrer aux ingénieurs japonais et valider l’application. En tout, Transvideo a transformé 50 à 60 mille duplicateurs, on recevait les machines par containers entiers et on y rajoutait le SECAM.

Appareil Sony modifié Pal/Secam par Transvideo - Photo JN Ferragut © AFC
Appareil Sony modifié Pal/Secam par Transvideo
Photo JN Ferragut © AFC


C’était une école extraordinaire parce que ces produits étaient inexistants sur le marché, les documentations souvent succinctes et les résultats ont été fantastiques, la qualité obtenue également. A l’époque, 100 % du catalogue de Buena Vista pour la zone Secam a été dupliqué sur des produits Transvideo, également avec nos transcodeurs que j’avais développés pour compléter l’offre.
On faisait tout sur place, y compris parfois la fabrication et la gravure des circuits imprimés. Jusqu’à une période récente, on a câblé et soudé chez nous les cartes électroniques – on avait du personnel de câblage et une machine pour souder à la vague. L’arrivée des composants montés en surface, le CMS – SMT en anglais –, a arrêté cette activité de câblage interne parce que je n’ai pas souhaité faire ce saut technologique.

Compte tenu des coûts d’exploitation d’une entreprise en France, la question était de savoir quel était le cœur de métier qu’on voulait développer et préserver à l’intérieur de la société. Pour les circuits imprimés, on est passé aujourd’hui à douze couches avec des fréquences qui dépassent allègrement 3 GHz avec des piste accordées et la miniaturisation est telle qu’on voit à peine les composants utilisés, peu de fabricants sont aptes à réaliser ce type de circuits.
Aujourd’hui, nous créons nos produits sur ordinateur, beaucoup sur Mac, grâce à des logiciels spécialisés. C’est une particularité de la société d’avoir gardé l’implantation des cartes chez nous. La conception des circuits est devenu un art.

Vincent Jeannot : Vous aviez une très bonne expertise au niveau électronique. Qu’est-ce qui a fait le passage aux moniteurs ?

JD : Le marché de la modification des produits des autres était limité et peu pérenne. Dans des vies antérieures, j’avais eu une expérience en tant que cadreur… Entre 18 et 25 ans, j’ai fait des tas de métiers, dont certains liés à l’image. J’ai été cadreur, j’ai fait de la photo argentique, j’ai eu la chance d’avoir des caméras Eclair 16 et 35 dans les mains.
Je pense que j’ai choppé une espèce de virus de la technique, avec une attraction sans limite pour les objets qui servent à créer des images, de l’optique à la mécanique, plus ça que l’envie de faire les images moi-même. Le fait que je vois de plus en plus mal est sans doute la raison première, longtemps inconsciente, de mon attirance pour la lumière.
Quand j’étais opérateur, j’avais une grande frustration sur les moyens techniques en général et plus particulièrement de visualisation qui donnaient une image quand même assez proche de ce qu’on avait enregistré mais qui ne me semblait pas fidèle ni très fiables sur le terrain et j’ai voulu fabriquer des viseurs de caméra avec des moniteurs à tube. Comme c’était une période compliquée à cause des nombreuses normalisations en cours en Europe, j’ai décidé d’abandonner l’idée.

J’ai toujours eu une très bonne relation avec les Japonais. En général, j’ai beaucoup appris avec les gens passionnants que j’ai rencontrés au Japon. Un jour, chez Toshiba, des ingénieurs m’ont montré des petits afficheurs en me disant qu’ils ne savaient absolument pas à quoi ils pouvaient servir. J’ai vu dans ces afficheurs LCD une opportunité formidable de faire des appareils portables destinés aux gens de l’image. Ils m’ont dit que la technologie, purement expérimentale, ne serait jamais au point, que ces petits afficheurs n’avaient aucun avenir et qu’ils étaient tout juste bons à équiper les Pachinkos.

VJ : Un Pachinko, c’est ce billard électrique vertical ?

JD : C’est le flipper vertical japonais. Comme je suis assez obstiné, je ne les ai pas lâchés et ils ont fini par accepter de me les vendre, sans garantie d’aucune sorte ni support technique, et c’est ainsi que j’ai fait le premier moniteur 5 pouces professionnel, le LCM05. Le concept était innovant et intéressant pour l’époque. C’était un système modulaire très léger, extrêmement robuste, qui a permis très vite de voir des images à l’extérieur en plein soleil sans avoir à mettre la tête sous un voile noir. C’était un enjeu important puisque à part certains tubes phosphore, qui étaient épouvantablement chers et fragiles, on n’avait pas de moyen de voir des images dès qu’il y avait un peu de lumière.
Quand les premiers moniteurs sont sortis, ça ne s’est pas bien passé en France car personne n’a voulu les utiliser, les chaînes de télé ou qui que ce soit, ils nous ont tous envoyé balader.

VJ : Et pourquoi ?

JD : En général parce qu’on est dans un pays extrêmement conservateur, avec une espèce d’establishment et une grande difficulté de remise en question. On me disait : « Oui, ça a l’air bien, c’est sympa ce que tu fais mais comment peux-tu expliquer que Sony ne l’ait pas déjà fait ? » C’était l’argument imparable, suivi en général d’éclats de rire des gens qui étaient fort contents de leur bonne plaisanterie et je repartais, mon moniteur sous le bras…
J’ai eu le choix entre arrêter ou partir le montrer ailleurs. J’ai commencé à le faire pas très loin, en Belgique, où j’ai eu plus de succès auprès d’opérateurs télé de la RTBF. Mais ce n’était pas suffisant pour justifier l’activité de la société.

Ensuite, je suis parti aux Etats-Unis avec des Anglais – on travaillait déjà ensemble dans la duplication –, ils m’ont dit : « Ecoute, ton moniteur a l’air formidable, va donc le montrer au NAB. On a un stand là-bas, tu t’y installes, et tu verras bien... » En fait, je n’ai pas vu grand-chose tellement je me suis trouvé dans un monde complètement gigantesque. Je découvrais à la fois les Etats-Unis et le NAB.
L’année suivante, j’ai eu mon propre stand sur lequel j’étais tout seul, incapable de gérer une affluence absolument incroyable. Un jour, quelqu’un est passé et m’en a demandé 1 000, je n’y ai pas cru, je ne lui ai jamais répondu… J’étais encore très conditionné par les habitudes françaises.

Par la suite, des gens que j’ai rencontrés dans le cinéma m’ont dit : « Mais nous, on attend ça depuis toujours parce qu’on n’a rien sur la caméra pour regarder des images ensemble. » Ils utilisaient des écrans microscopiques comme celui de la Moviecam, par exemple, qui étaient bien mais extrêmement fragiles. Ils en ont voulu absolument ! Des gens comme Michael Ballhaus, des assistants, en ont acheté personnellement. Des opérateurs Panavision aussi.
J’ai rencontré Nolan Murdock, le responsable du développement chez Panavision à l’époque. Ils travaillaient sur l’intégration des " viewfinders " vidéo de la Platinium. Ils m’ont mis sur le projet de façon tout à fait sympathique et à l’américaine : « Si tu en es capable, tu le fais et puis on te les achète. Sinon, on ne sera pas fâché pour autant ! »

On a passé une journée assez laborieuse à essayer de mettre l’idée d’un moniteur vidéo sur papier. Je peux dire honnêtement que je ne comprenais pas la moitié de ce qu’ils me racontaient et eux certainement encore moins… J’avais appris à parler anglais avec les Japonais mais avec les Américains, j’avais du mal !
En les quittant, je leur ai dit : « Je vais vous faire quelque chose, je reviens vous voir dans un mois, et si ça vous plaît, on part sur cette base. » Ils se sont bien marrés. Ils m’ont dit : « Ouais, les Français, avec vous, il n’y a jamais de problème ! Dans un mois, bien sûr, pourquoi pas… »
Et un mois après, je suis revenu avec mon petit moniteur. Ils ont été emballés, il faisait moins du quart du volume auquel ils s’attendaient, et on était très largement au-delà de leurs spécifications.

Avec l’aide de Panavision, qui était un leader à l’époque, on a commencé à le vendre, on en a vendu beaucoup aux Etats-Unis, et surtout, grâce à eux, on a été présent sur les longs métrages dans le monde entier.
Aux Etats-Unis, j’ai été surpris de rencontrer de grands professionnels, extrêmement simples, faciles d’accès et généralement dans la bienveillance et le bon vouloir. Idem pour la plupart des fabricants mythiques je j’ai rencontrés. Et je trouve que c’est quelque chose d’essentiel, pour moi c’est quelque chose de fondateur, en tout cas, c’est ce qui a dicté mes choix vers cette profession plutôt qu’une autre. C’est la création collective qui m’intéresse.

VJ : Tu n’as pas eu envie de partir là-bas ?

JD : Si. J’ai vécu quatre ans entre Los Angeles et la France. Je suis rentré pour des raisons personnelles, mes deux enfants étant en France, ce n’était pas très facile à gérer. Ici, à Transvideo, il y avait des gens auxquels j’étais attaché. Je n’avais pas les fonds pour remonter une société là-bas.
En fait, je ne suis satisfait ni des conditions dans lesquelles je travaille aujourd’hui ni de celles dans lesquelles l’entreprise vit et se développe. C’est extrêmement difficile de travailler en France pour une entreprise industrielle de petite taille comme la nôtre, parce qu’on est dans un environnement compliqué qui ne favorise en aucun cas la croissance et le développement.

On pense compliqué, on fait compliqué et on fait beaucoup de choses autres que notre métier. Il y a une dilution d’énergie qui est insupportable par rapport à ce qu’on voit ailleurs. Ça pourrait marcher si l’on était dans un circuit totalement fermé mais ce n’est plus le cas. De toute façon il y a une mondialisation absolue, qu’on le veuille ou non, on est sur des marchés qui sont complètement globalisés, donc on est en face de concurrents qui n’ont pas les mêmes règles du jeu que nous.
On peut vivre dans le monde compliqué si le monde compliqué est notre seul horizon ; ça se gâte fortement quand l’horizon devient la planète parce que les Coréens, les Chinois, les Américains sont dans une simplicité d’entreprendre qui n’existe pas chez nous. Ce que je pourrais reprocher aux Américains, c’est le coté travail et rien d’autre, sans généraliser bien sur, et d’un autre côté, c’est ce qui fait leur force, cent pour cent de l’énergie est consacrée au travail.

JNF : Combien êtes-vous à Transvideo ?

JD : Aujourd’hui, nous sommes vingt personnes. Les gens qui travaillent à Transvideo ont changé. A l’époque où l’on a fait surtout de la production, nous étions une quarantaine, voire plus avec les intérimaires. Maintenant, ce ne sont quasiment que des ingénieurs qui font du développement.

Laboratoire R&D logiciel - Photo JN Ferragut © AFC
Laboratoire R&D logiciel
Photo JN Ferragut © AFC


Je me suis aperçu que personnellement, je ne faisais plus du tout le même métier, en tout cas je ne créais plus rien, je ne faisais que gérer. Je me suis dit : « Il faut faire un choix, plutôt que d’essayer d’avoir un développement raisonné avec une vision de gestionnaire, je choisis de créer les produits que j’ai envie de créer pour les gens avec qui j’ai envie de travailler. »

J’ai décidé d’arrêter de bosser avec les gens qui m’emmerdaient, donc j’ai posé pour principe sacré de ne jamais m’obliger à travailler avec des sales cons… D’abord, ce n’est pas bon pour la santé, ensuite, ces gens-là prennent beaucoup de temps pour ne pas vous donner grand-chose, et enfin ils vous privent généralement de la chance de travailler avec les gens bien.
C’est le conseil que je donne souvent à ceux qui se plaignent des gens avec qui ils travaillent. Je leur dis : « Ce n’est pas compliqué, il y a un truc formidable, partez ! Si vous ne bossez que pour des sales cons, vous ne travaillerez jamais pour des gens bien, c’est sûr ! » Je dis souvent ça aux assistants et aux stéréographes en herbe qui se plaignent de ce que certaines productions leur demandent.

Dans tous les boulots que j’ai faits, dès qu’on me pourrissait la vie, quand je pensais que j’allais boire la tasse ou que je ne savais pas à quoi je servais, ce qui revient un peu au même, je suis toujours parti et c’est finalement pour ça que j’ai créé Transvideo. Ce qui complexifie peut-être un peu les choses en France, c’est qu’à force de dire oui à n’importe quoi, on a perdu cette liberté de dire non…
Ça m’a permis de rencontrer des gens hors du commun dans le monde entier et d’apprendre beaucoup avec eux. Une des plus belles expériences que j’ai eues, peut-être la plus belle, c’est toute l’aventure avec Alain Derobe en 3D. C’était un homme qui avait une vraie vision, parfois difficile à suivre dans ses pensées parce qu’en perpétuel mouvement.

On s’était rencontré un soir de fermeture du Micro Salon. Voyant le moniteur 3DView que je montrais sur mon stand, il m’a demandé si je pouvais lui fabriquer ses rigs. Je lui ai dit que j’avais assez de travail avec mes produits et lui ai conseillé d’aller demander sur un autre stand. Il est rentré dans une colère noire et m’a demandé si au moins je pourrais ajouter quelques fonctions au 3DView.
Je lui ai répondu que ce serait sans problème si j’arrivais à comprendre à peu près ce qu’il souhaitait mais que pour l’instant, ce n’était pas le cas. Il a commencé à m’expliquer sa théorie sur le relief et comme j’étais assez fatigué, je lui ai dit que s’il était intéressé, j’allais y penser et qu’on se reverrait. En partant, je me suis dit que tout de même, ce bonhomme, il avait un truc, il n’était pas aussi déplaisant qu’il essayait de l’être !

Alain Derobe et Jacques Delacoux lors du Micro Salon en 2012 - Photo Jon Fauer
Alain Derobe et Jacques Delacoux lors du Micro Salon en 2012
Photo Jon Fauer


Par la suite, on s’est appelé une fois au téléphone. Il a commencé par s’inquiéter de savoir si j’allais lui demander de l’argent. Je lui ai répondu que si je comprenais ce qu’il voulait, je ne lui demanderais rien parce que si c’était utile pour lui, ce serait utile pour les autres…
Je lui ai dit aussi que depuis 25 ans que je faisais des produits, on les avait toujours faits tout seul, sans jamais demander un centime à personne, et que c’était sans doute pour cette raison-là qu’on existait encore ! Ensuite, il a recommencé avec ses théories sur la 3D et moi je ne comprenais toujours rien, jusqu’à une nuit où je me suis réveillé en sursaut parce que j’avais compris ce qu’était la " Scenic Box " et " Natural Depth ", je me suis dit que ce mec était génial et qu’il avait complètement raison !
Un beau matin, je l’ai appelé très tôt en lui disant que je comprenais enfin ce qu’il me racontait, que j’étais OK et que j’allais lui fabriquer une grille la semaine suivante parce que je pensais que c’était ça dont il avait besoin. En fait, je l’ai appelé deux jours après pour lui dire que j’avais quelque chose pour lui. Et alors là, il était comme Jack et la chocolaterie magique, quand il est dans le chocolat jusqu’au cou…

Il a commencé le tournage de Pina avec Wenders. Il était très excité, on a continué à faire des développements pour ce qu’il pensait avoir besoin pour le tournage du film. Le décès de Pina Bausch a été une catastrophe. L’équipe de Pina a voulu que le film se fasse tout de même comme un témoignage et Wenders l’a tourné. On faisait des mises à jour quasi quotidiennement, cela a été très intense.

Wim Wanders et Alain Derobe, moniteur Transvideo en mains, sur le tournage de "Pina" - Photo DR
Wim Wanders et Alain Derobe, moniteur Transvideo en mains, sur le tournage de "Pina"
Photo DR


Ensuite, à sa sortie, il y a eut le miracle de ce film qui pour moi est tout à fait stupéfiant, Wenders a compris comment faire de la 3D un outil émotionnel et ça, c’est très fort. Je le considère comme un chef d’œuvre et je suis très content qu’on ait réussi à aider Alain à ce que cela puisse se faire, quelque chose de gratuit mais de vraiment utile.
Nous avons bossé passionnément pendant cinq ans ensemble, on a fait des tas de trucs. Aujourd’hui avec les dernières générations, nous sommes arrivés à un produit extraordinaire et unique, même si depuis il a été copié et recopié, y compris la fameuse " Derobe’s Grid ".

JNF : Comme c’est souvent le cas avec les bons produits…

JD : C’est une maigre consolation parce que je pense qu’il y a deux types de sociétés, il y a des sociétés qui innovent, il y en a sommes toutes assez peu, et il y a celles qui vivent sur les innovations des autres, elles sont nombreuses. Il y a une chose dramatique aujourd’hui, c’est que les gens comme nous souffrent énormément, malgré le fait d’avoir reçu un Oscar parce que l’Académie a jugé nos produits innovants et uniques et que cela avait changé l’industrie du cinéma.
Si je prends les industries " dites techniques " que sont les loueurs par exemple, jusqu’à encore pas si longtemps, ils étaient nos partenaires les plus proches aussi bien dans la création des produits que dans leur utilisation. Si on a créé des produits électroniques qui durent 20, 25 ans, c’est tout de même avant tout pour eux, afin qu’ils puissent rentabiliser leur investissement.

Maintenant, la plupart préfèrent les copies aux originaux. Ce qui est valable pour moi est aussi valable pour les gens qui font d’autres produits pour le Film, de l’éclairage entre autres, on le vit dans notre chair. Vous bossez des mois, parfois des années sur un nouveau produit, on vous demande des offres et en fin de compte, ils vont acheter les copies de vos produits pour les mettre ensuite sur le marché en disant : « De toute façon c’est la même chose ! » Ça vous tue moralement et ça tue l’entreprise à petit feu, parce qu’on finance nos développements, on ne fait pas des produits grand public que l’on va amortir sur des millions de pièces, on ne vend pas nos produits en supermarché !
Aujourd’hui, des opérateurs TV ou cinéma mettent Transvideo sur leur liste et quand ils reçoivent la copie du matériel, on leur dit : « Si tu continues à nous enquiquiner avec Transvideo, tu ne seras pas sur le prochain tournage d’untel. » C’est d’une violence qui n’est pas normale, tout cela pour refiler des choses qui sont jugées moins chères avec une obsession de la rentabilité immédiate, c’est « le triomphe de la cupidité », pour reprendre Joseph Stiglitz. Et ça, on en souffre énormément, on peut y ajouter la sous-location systématique qui devient un gros problème pour tous les fabricants. Sans marché commercial, plus d’innovation possible.

Concernant Transvideo et le Rainbow HD, on a tout remis à plat au mois de septembre parce qu’on ne comprenait plus où on allait. On s’est dit : « On ne va pas faire une usine à gaz de plus. Qu’est-ce que ça apportera aux gens du métier ?
On va travailler pour des personnes qui pour la plupart n’en ont rien à faire de l’électronique, des signaux, des normes, des trucs et des machins… Ils ne veulent surtout pas en entendre parler. »

Mais il faut bien des outils et le partage de l’image s’étant démocratisé sur les plateaux, on ne peut pas donner les mêmes outils à tout le monde. Des moniteurs différents pour les opérateurs, pour les pointeurs, pour les " steadicameurs ", pour les scriptes, cela devient trop compliqué à gérer.
Et puis l’idée des jeux de cartes est venue, une carte pour chacune des différentes professions. Les utilisateurs vont choisir leur métier à la mise en route du moniteur et à partir de là, ils vont avoir un produit configuré spécialement pour eux. Ce que nous attendons beaucoup, c’est le feedback de tous les différents métiers qui utiliseront ce moniteur.

VJ : C’est un produit encore en développement ?

JD : Il sera sur le marché à partir de février 2013, nous avons du retard à cause des dépôts de brevets en cours.

VJ : Donc on le verra au Micro Salon.

JD : Le Micro Salon, ça va être formidable cette année, nous allons pouvoir présenter le concept du Rainbow avec trois versions : un modèle assez simple destiné aux opérateurs TV et d’autres modèles destinés aux métiers du cinéma avec des luminosités plus élevées, des bulles pour les opérateurs Steadicam, ce seront des " packages " où tout sera inclus sans options.

VJ : Tes produits doivent être appréciés pour leur qualité.

JD : C’est très difficile de juger la qualité de l’image, en général ce sont des différences quasi imperceptibles et immensurables parce que l’image, c’est compliqué. Nous sommes très attachés au fait que ce qui ressort d’ici soit une copie la plus fidèle possible de ce qui est enregistré par la caméra.
Il est essentiel que cela ne crée pas d’artéfacts en supplément de ceux qui pourraient exister venant de la caméra. Par exemple si on voit des saccades sur l’image, il est indispensable que les gens ne se posent pas la question de savoir si cela vient de l’écran ou de la caméra.

On a d’abord des produits qui sont quasiment en temps réel (il y a moins d’une trame de délai et on est toujours synchrone avec le signal incident). C’est-à-dire que si la caméra tourne à 24 images/seconde, l’affichage sera à 24 i/s ou 48 mais en tout cas, on va être synchrone avec le signal qui sort de la caméra, si vous travaillez à 60 i/s, on va afficher à 60.
La plupart des moniteurs affichent à ce qu’ils peuvent et il va y avoir des artéfacts cinétiques entre deux images en ajoutant des images qui n’existent pas ou en en supprimant d’autres, idem pour les fonctions de " scaling " (mise à l’échelle), certains proposent des zooms au-delà de la résolution initiale, c’est ridicule car ce sont des pixels qui n’existent pas qui sont affichés. En fait, dans beaucoup de produits, l’image que vous voyez n’existe pas, et en tout cas pas celle que vous enregistrez ni celle qui sort de votre caméra.

C’est en partie ce qui justifie que nos produits soient complexes et aient autant d’électronique à l’intérieur parce qu’on a énormément de " process " pour arriver à cette exigence et si l’on y ajoute la connectivité avec les optiques intelligentes par exemple, c’est tout ça qui fait qu’ils sont uniques. Beaucoup de marques utilisent des processeurs conçus pour des TV.
Il y a une tentative d’optimisation pour rendre les images plaisantes. Notre métier à nous, ce n’est pas de rendre les images plaisantes, c’est de les montrer de la manière la plus brute possible aux gens qui les font et qui savent que se sont leurs images sans artifice.

VJ : Il y a aussi le soin à apporter à la connectique et au câblage qui fait partie de la chaîne.

JD : Cela fait partie du " package ", nous faisons nos câbles nous-mêmes pour être sûrs que nos clients auront les câbles adéquats. Il y a énormément d’équipements qui sont endommagés aujourd’hui au niveau des connecteurs.
Avant, on s’en fichait un peu car quand vous aviez un " video assist " qui ne marchait pas, vous pouviez toujours tourner sans retour vidéo.
Aujourd’hui, cela prend vite une autre ampleur, par exemple la jonction entre une caméra et un enregistreur numérique est capitale et c’est inadmissible, sur un tournage numérique aujourd’hui, d’avoir un problème à ce niveau.
Nos câbles valent une trentaine d’euros, mais ce sont des câbles qui ont des doubles tresses, avec des connecteurs spécialement conçus pour nos spécifications, c’est le top absolu au niveau de la connectique, c’est malheureusement ce qu’il y a de plus cher aussi. Les câbles sont testés un par un autant en fréquence qu’en connectique ; c’est ce qu’on livre avec nos produits, alors oui, c’est un peu plus cher !

VJ : C’est comme rouler avec de mauvais pneus…

JD : Certaines maisons de location montent elles-mêmes leurs câbles, mais sans avoir les moyens de les tester, cela devient difficile aujourd’hui de faire des bons cordons sertis ; d’autres les achètent sur Internet et tombent sur des cordons qui sont fait on ne sait où mais qui coûtent moins d’un euro, sans aucune garantie de fonctionnement. Certains détériorent le contact central des BNC pour de simples questions de diamètre ! Il y a des bonnes pratiques aujourd’hui qui ne sont pas encore rentrées dans les mœurs : avant de connecter une prise, il faut toujours regarder dedans, et ce sont des réflexes que les gens n’ont pas été habitués à acquérir dans nos métiers du film.

VJ : J’espère qu’un certain nombre d’opérateurs et d’assistants partage encore ce plaisir de travailler avec des outils de qualité. Pour moi, rien que de connecter votre câble BNC dans sa prise, je vois la différence, je sens que cela verrouille bien, qu’il n’y a pas de jeu et c’est une assurance de bon fonctionnement.

JD : Nous avons une chance formidable, c’est d’avoir été élevés dans l’idée de l’excellence. Je ne suis pas spécialement pro ou antiaméricain mais j’ai appris un truc extraordinaire avec eux, c’est l’efficacité, ils ont une espèce d’efficacité redoutable dans tout. J’ai connu un type chez Clairmont faisant un travail qui peut ne pas paraître passionnant : il nettoie les câbles !
Qu’ils fassent un mètre ou qu’ils en fassent cinquante, il les nettoie sur toute leur longueur avec un solvant qui n’enlève pas les marquages mais qui retire les traces de gaffer ; les câbles sont testés, vérifiés et nettoyés. Cela fait la différence avec un tournage où vous n’avez aucune incertitude technique et c’est aussi une question de respect. Sans citer de noms, il y a certains loueurs parisiens où vous avez l’impression que le matériel sort d’une poubelle, ce n’est pas normal.

VJ : Ça doit tout de même te faire plaisir, l’Oscar !

JD : Ça m’a fait plaisir pour beaucoup de raisons. D’abord, je n’avais jamais pensé que j’en aurais un. Ce qui m’a beaucoup touché, c’est ce que m’ont dit tous les gens de l’Académie : « Mais on n’a jamais compris que tu n’en ais pas demandé parce que s’il y a bien quelqu’un qui en mérite un, c’est toi ! »
La présentation que l’on doit faire à l’Académie représente un sacré travail. Il faut vider tous vos placards pour montrer tout ce que vous avez fait. Après l’avoir fait, je me suis dit : « C’est incroyable, on a participé à autant de tournages de films, on a fait autant de produits, on a eu autant de projets, on a rencontré autant de gens ! » J’étais stupéfait de la somme absolument démentielle de travail que Transvideo a sorti en 25 ans !

Avec le côté sympathique qu’ont les Américains, cette première partie des Oscars techniques est une façon formidable qu’a l’industrie de vous dire : « On est content que vous ayez fait des choses pour nous, on sait que vous l’avez fait pour nous, on vous en est reconnaissant. » C’est vrai que ce n’est pas médiatisé comme les Oscars et que ça se passe en petit comité mais ça m’a profondément touché.
Au travers du regard des autres, vous prenez la notion de la vraie valeur du travail que vous avez réalisé, ce dont je n’avais absolument pas conscience auparavant. Ce qui m’a donné un peu plus de zèle pour continuer à faire des produits différents et pour me dire que de toute façon je continue, parce que c’est avec ces gens-là que j’aime être.

Parmi les gens formidables que j’ai rencontrés, il y a Denny Clairmont, qui m’a soutenu pour les Oscars et qui a toujours été un type qui m’a fait confiance. Ce n’était pas acquis que quelqu’un comme lui fasse confiance à un rigolo comme moi qui s’est pointé en 1990-1995 aux Etats-Unis en disant : « Tiens, voilà, je vais vous mettre des trucs sur vos caméras ! » Je pense aussi aux gens de Panavision à Woodland Hills.
Clint Eastwood m’a aidé pour les Oscars avec une gentillesse attendrissante. C’était sur le tournage de son film L’Echange, il avait fait faire un petit film pour bien montrer comment il se servait du moniteur Transvideo que nous avons fait spécialement pour lui. Le jour de la cérémonie, il tournait trop loin de Los Angeles pour faire un aller retour dans la soirée. Il avait envoyé un petit mot pour dire qu’il était désolé de ne pas pouvoir assister à la cérémonie, « parce qu’en général les gens aiment bien me voir arriver ! » [Rires]

Clint Eastwood, moniteur Transvideo à la main, sur le tournage de "Mémoires de nos pères" - Photo DR
Clint Eastwood, moniteur Transvideo à la main, sur le tournage de "Mémoires de nos pères"
Photo DR


Quand j’ai revu Eastwood à Paris, il m’a remercié d’une façon si simple et si normale pour lui mais qui me touche toujours beaucoup. Wenders est plus réservé mais je suis content d’avoir travaillé avec lui parce que j’aime beaucoup une partie du travail qu’il fait. Je vois toujours les films des gens avec qui je travaille pour comprendre comment ils fonctionnent, et ça m’aide énormément à concevoir des produits pour eux.
Le Cinec Award pour les produits 3D, en 2010, m’a aussi énormément touché. Là, pour le coup, avoir un prix, en Allemagne, sur un produit pour le cinéma fait par une boîte française, j’ai peut-être des à priori idiots mais je n’en suis pas revenu de recevoir un Cinec Award.

Alain Derobe, Jacques Delacoux, Cinec Award 2010 en mains, et Jon Fauer - Photo Howard Preston
Alain Derobe, Jacques Delacoux, Cinec Award 2010 en mains, et Jon Fauer
Photo Howard Preston


J’aime beaucoup les choses que je fais avec Imago, j’aime aussi beaucoup le travail que l’on peut faire avec l’AFC, comme le Micro Salon. J’aime beaucoup le travail que l’on peut faire autour des workshops et des master class. Je suis allé récemment à Louis-Lumière, où Bruno Delbonnel faisait un petit atelier organisé par les étudiants – tous seuls, chapeau ! – et nous avions fourni des produits.
C’est extraordinaire parce que vous êtes en contact avec ceux qui transmettent et ceux qui reçoivent. Vous pouvez vraiment expliquer les choses, et pour moi, ces moments sont toujours extrêmement riches parce que votre produit est complètement mis à nu, vous n’allez pas faire prendre des vessies pour des lanternes à quelqu’un comme Delbonnel, c’est clair !

C’est aussi quand vous voyez les gens utiliser vos produits que vous trouvez l’inspiration pour en faire de nouveaux. Ils jouent le jeu, même s’ils ne sont pas toujours en contact direct avec les équipements dans leur métier. Je pense qu’il y a aussi une distanciation…
Michel Abramowicz me l’a bien dit aussi : « C’est vraiment intéressant ce que j’ai vu à Camerimage parce que je comprends mieux comment sont tes produits, à quoi ils servent, leur différence. Dans mon travail quotidien, on est de moins en moins en relation directe avec les équipements. On les choisit de moins en moins. »

Michel Abramowicz en tournage, en arrière plan - Photo Anastasia Durand
Michel Abramowicz en tournage, en arrière plan
Photo Anastasia Durand


En France, on a parfois du mal à faire passer la vraie notion de rentabilité. Les discussions d’argent sont toujours assez malvenues chez nous pour des tas de raisons à la con… Avec les Américains, vous entendez dire : « D’accord, ça coûte cinq ou six mille dollars mais combien je gagne en utilisant votre produit ? » Ils ne donnent pas d’avis sur le fait que ça soit cher ou pas cher, ils disent seulement : « Qu’est-ce que ça me fait gagner ? Même à 20 000 dollars, si ça m’en fait gagner plus, c’est que c’est un bon outil pour moi ! »
Alors qu’en France, on va vous dire : « Oui, c’est bien… Mais tu as vu, il y a un truc chinois qui vaut 300 euros, tu ne peux pas faire quelque chose de moins cher ! » C’est carrément de l’insulte ! C’est comme si vous alliez voir un type qui vend des Ferrari et que vous lui disiez : « Vous ne vous foutez pas du monde ? J’ai vu une Twingo à huit mille euros, et votre bagnole, vous la vendez à cent cinquante mille ou deux cent mille euros ! » C’est insupportable. Cet été, j’ai été en contact avec une production qui travaillait en Argentine avec des moniteurs coréens : deux en panne dans la pampa, dix jours de tournage foutus, combien ça coute ?

Je pense que c’est là où toute notre industrie doit comprendre, pour reprendre une expression très américaine, qu’on est tous intimement liés, on est les cellules d’un même organisme… C’est comme si vous disiez : « Je m’en fous, j’ai un cancer du foie, mais tout le reste va bien ! » C’est une vision à courte vue et en général, ça se dégrade assez rapidement.
Et pour moi, les directeurs de la photo ont un rôle capital à jouer dans le sens où ils devraient être les porte-drapeaux de TOUTE l’industrie et ils n’ont pas besoin de porter leur propre drapeau, c’est toute l’industrie qui serait alors derrière eux. Des drapeaux qu’ils pourraient clairement brandir au nom de la survie de l’écosystème du film qui, à mon sens, mérite mille fois de vivre et de perdurer avec toutes ses professions et petites mains. Le Cinéma c’est avant tout une histoire d’Hommes et de Techniques, on l’oublie trop souvent. Sans Hommes, ce n’est plus du Cinéma, sans doute autre chose, mais quoi ?

JNF : J’en profite pour te dire que l’AFC t’est redevable de l’ampleur qu’a prise dernièrement le Micro Salon. C’est en partie grâce à toi – tu n’es heureusement pas le seul – parce que tu as toujours cru en ce que nous faisions et tu n’as pas hésité à faire venir des Etats-Unis des Jon Fauer, des Howard Preston, et cette reconnaissance, je te la transmets de vive voix…

JD : C’est essentiel de ne pas rester vivre dans notre microcosme, il faut aussi que les autres voient qu’on fait des choses bien. Le fait que Jon ait publié sur le Micro Salon est formidable parce ça met les projecteurs sur l’industrie du cinéma français et nous décrit comme des gens extrêmement créatifs, en ébullition. Vous n’avez aucun évènement comme celui-là qui se passe ailleurs dans le monde, c’est nécessaire qu’il y ait une vision internationale dessus.
C’est bien que Preston soit venu parce que c’est quelqu’un qui ne se déplace que rarement, pas par dédain mais parce qu’il est bien en Californie et qu’il a énormément de travail. C’est très bien que de plus en plus de gens soient intéressés par le travail autour du Micro Salon.

Je pense qu’il faudrait qu’on ait plus d’évènements comme celui-là dans le monde. En France, nous devrions aussi organiser plus de workshops, de master class, la transmission des savoirs entre générations est essentielle dans nos métiers. Se plaindre de la qualité des assistants qui sortent de nos écoles est une chose, faut-il encore les former et leur transmettre nos connaissances.
Les écoles devraient permettre aux étudiants de voyager pour comprendre ce qui se fait ailleurs, je suis effaré de constater que des examens sont tous les ans organisés pendant Camerimage, qui est une manifestation unique où l’on rencontre des étudiants de tous pays… sauf de chez nous. Malgré tout, nous avons réussi à inviter deux étudiants de Louis-Lumière, le weekend...
Je me sens proche du travail que fait Imago, en Europe et maintenant dans le monde, au-delà de la fédération des associations, les master class qui sont organisées lors des réunions sont de grande qualité avec des intervenants hors du commun. J’ai assisté à des choses extraordinaires en Norvège, ou encore au Danemark, à la Danish Film School de Copenhague. Avec très peu de moyens, ils avaient fait venir Haskell Wexler, Oliver Stapelton et d’autres… Dix grands noms du film venus dans une école pour raconter ce qu’ils font et pourquoi ils le font, c’est formidable !

Pour terminer sur les évènements remarquables, un petit mot sur GoKinema où Marc Galerne, K 5600, et moi étions il y a quelques jours. C’est un événement organisé par une association de prestataires pendant le festival du film de Gothenburg, en Suède. Il y a un OpenSet, une master class, un workshop. Avec un grand nom du cinéma français comme invité, Robert Fraisse, le tout modéré par Benjamin B., un grand moment de transmission et d’enseignement avec une salle comble.
Pourquoi pas en France ? Est-ce qu’il aurait une espèce d’individualisme français qui fait qu’on n’arrive pas à communiquer, à partager et à mettre en place simplement des événement riches où les stars ne seraient pas que les organisateurs ? Alain Derobe me disait, il n’y a pas si longtemps, qu’en France la chasse à la subvention prenait toujours le dessus sur le projet. J’ai du mal à croire que l’on ne puisse pas changer les choses avec un peu de bonne volonté.

Vincent Jeannot et Jacques Delacoux - Photo JN Ferragut © AFC
Vincent Jeannot et Jacques Delacoux
Photo JN Ferragut © AFC


(Propos recueillis par Jean-Noël Ferragut et Vincent Jeannot en décembre 2012, actualisés début février 2013)

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