J’entends plus les sifflets !

par Jacques Loiseleux

par Jacques Loiseleux La Lettre AFC n°118

Quand Maurice Pialat a reçu la Palme d’or à Cannes pour "Sous le soleil de Satan", quelques rangs de siffleurs professionnels lui ont fourni l’occasion d’être, en une phrase, totalement lui-même.
Le poing levé, il a dit : « Si vous ne m’aimez pas, sachez que je ne vous aime pas non plus. »
Avec ceux qui applaudissaient, j’ai entendu : « Si vous m’aimez, sachez que je vous aime aussi. »

C’est dans cette perpétuelle contradiction que s’est écrite cette grande page du cinéma mondial qu’est l’œuvre de Maurice Pialat.
Il nous reste à la mieux comprendre.
C’est ce qui a fait le plus défaut à Pialat : être plus souvent compris, non par la critique, mais par le public du cinéma populaire qu’il aimait.
Au tournage même, il était difficile à comprendre, il s’exprimait toujours en creux. Il fabriquait le moule, à nous de le remplir.

J’ai toujours pensé que la petite angoisse qui nous étreignait à l’entrée de la projection des rushes était le signe d’une créativité en action.
Le risque était grand avec Pialat, mais quand c’était réussi, quel bonheur ! Celui d’avoir été poussé à se dépasser.
Si je me suis, de trop rares fois dans ce métier, étonné moi-même, c’est grâce à toi, Maurice.