Jaffa

de Keren Yedaya, photographié par Pierre Aïm, AFC

par Pierre Aïm

C’est en collaborant avec Mathieu Kassovitz (Métisse, La Haine, Assassin) que Pierre Aïm a démarré une carrière de directeur de la photographie de long métrage. Il a ensuite photographié plusieurs films d’Antoine de Caunes, de Samuel Benchetrit puis, dernièrement, il a travaillé sur Bienvenue chez les Ch’tis et Le Bal des actrices.
Avec Jaffa de l’Israélienne Keren Yedaya, il expérimente une image stylisée pour un film engagé, politique et populaire.
Pierre Aïm - sur le tournage de <i>Jaffa</i> de Keren Yedaya
Pierre Aïm
sur le tournage de Jaffa de Keren Yedaya

C’est une première collaboration avec Keren Yedaya ?

Pierre Aïm : Oui, c’est Laurent Brunet qui avait travaillé à ses côtés pour le très beau film Mon trésor (Caméra d’or 2004). Je pense que pour des raisons personnelles il n’a pas pu collaborer avec elle sur ce film-ci.

Jaffa surprend au premier abord, surtout à cause des zooms très nombreux et de la lumière assez stylisée, des ombres marquées derrière les comédiens…

Keren a regardé dans sa jeunesse beaucoup de films égyptiens et elle s’en est inspirée aussi bien sur le plan esthétique que politique. Elle ne voulait pas utiliser de grues ou de dollies qui, pour elle, sont des outils propres à la culture occidentale et au cinéma plutôt " hollywoodien ". Elle tenait beaucoup à " réhabiliter " le zoom qui est plus populaire et renvoie immédiatement aux films de Série B. J’ai éclairé avec des projecteurs proches de l’objectif, dans l’axe, et, contrairement à mes " habitudes ", à mes penchants, sans vraiment de zones d’ombre. J’ai gardé les ombres marquées des films des années 1940, mais en prenant soin qu’il n’y en ait qu’une !

Décor à Jaffa
Décor à Jaffa

Vous avez tourné à Jaffa, là où se passe l’histoire ?

Absolument. Jaffa est une ville collée à Tel-Aviv où se côtoient Israéliens et Palestiniens. C’est de cette situation si particulière et si délicate dont parle le film. Nous avons tourné en décor naturel mais c’était presque des conditions de studio pour moi : j’avais quadrillé l’appartement avec des 500 Watts et des 1 000 Watts.
Même en jour, j’utilisais du tungstène car, dans les maisons en Israël, les ouvertures sur l’extérieur sont très petites pour se préserver de la chaleur. Dans le garage, qui est un des décor principal, je me protégeais du soleil direct par un drap blanc. J’ai utilisé de la 500 ISO, car le grain renforce le style du " film populaire ".

Comment s’est passé le tournage avec une équipe que tu ne connaissais pas ?

Très très bien. Les Israéliens sont extrêmement gentils et le chef électro était parfait, comme le mien en France ! Cela fut une belle expérience, avec des comédiens excellents. Et j’ai apprécié de tourner avec une réalisatrice très impliquée dans l’univers visuel de son film.

(Propos recueillis par Brigitte Barbier pour l’AFC)

  • Sortie en France le 24 juin 2009.