Jérôme de Missolz, collaboration intelligente et plaisir du travail

Par Jean-Michel Humeau, AFC
Tardivement j’ai appris la disparition de Jérôme de Missolz. J’ai beaucoup aimé travailler pour lui. Paris, Marrakech, Deauville, lieux où Yves Saint Laurent composait sa musique de mode et de robes, ses partitions étonnantes de couleurs du bout de ses crayons et de ses rêves pour mannequins de toute beauté.

Le film, Yves Saint Laurent, tout terriblement, comme l’annonçait Eluard, était minutieusement préparé, décors, robes, objets, tableaux, une mise en scène très élaborée pour enchaîner les différentes étapes de sa vie, de ses styles qu’avec suffisamment de lumière j’ai pu mettre en valeur.
Jérôme était plus opérateur que réalisateur, ce qu’il proposait avec gentillesse, attention, laissait libre de composer l’image au mieux de ce qu’il souhaitait sans le dire. Nous avons fait les trucages à la prise de vues, ce qui n’est pas simple en Super 16, du moins risqué avec une seule perfo par image.

Les références à Proust dans les jardins de la maison de Deauville, à Monnet et aux nymphéas, au cubisme de Braque, l’orientalisme de Delacroix pour Marrakech. Il faut dire la richesse du décor des lieux d’Yves Saint Laurent comme toile de fond des compositions scéniques de l’évocation des différentes étapes de sa création jouées par ses mannequins favoris.
Le plus touchant émouvant, dans ce film testament, reste la voix profonde grave de Jeanne Moreau pour dire le journal intime d’Yves Saint Laurent. Au cœur de ce ballet de robes éblouissantes, Jérôme aura su faire un poème d’images de cette commande tatillonne de Pierre Bergé.
Merci Jérôme pour ce grand moment de collaboration intelligente, de plaisir du travail, et toute ma compassion à ses proches.

Jérôme de Missolz (8 octobre 1954 – 10 mars 2016)