L’AFC présente à Camerimage 2005

Festival international du film d’image de cinéma

par Robert Alazraki La Lettre AFC n°150

La 13e édition de Camerimage, Festival international du film d’image de cinéma, s’est déroulée au Grand Théâtre de Lódz (Pologne) du 26 novembre au 4 décembre 2005 sous la baguette de son directeur Marek Zydowicz. Notre confrère et ami Robert Alazraki était l’un des invités du festival et y représentait l’AFC.

Le jury de la compétition officielle, présidé par le directeur de la photographie brésilien Affonso Beato, était composé du DP uruguayen Cesar Charlone, de l’Australien Donald McAlpine, des Allemands Karl Prümm et Franz Rath et de l’Américain Declan Quinn. Cette année, quinze longs métrages, choisis parmi les 252 présentés, entraient en lice pour se voir décerner les Grenouilles de bronze, d’argent et d’or.

Le programme comprenait en outre des projections spéciales (11 films), un panorama du cinéma européen (21 films), trois sélections de films provenant de pays européens (6 films polonais, 6 films estoniens, 10 films bulgares), une compétition de " Duo Réalisateur - Opérateur Polonais ", une compétition de films d’étudiants (28 films sélectionnés) et un panorama de films d’étudiants (27 films).

Camerimage a rendu un vibrant hommage à Tonino Delli Colli (décédé cette année) et organisé une rétrospective de quelques-uns des films dont il a signé la photographie.

Parallèlement, Camerimage a organisé des séminaires, rencontres, présentations, ateliers, etc.

Reflets de Camerimage 2005 d’après les notes de Robert Alazraki rédigées par Jean-Noël Ferragut

Robert participait pour la 6e fois au festival Camerimage et faisait partie cette année d’un comité international de professionnels chargé de récompenser trois films de la section Panorama de films polonais (aux côtés du Français Robert Fraisse, du Hollandais Kees Van Oostrum, de l’Anglais Roman Osin, du Grec Phedon Papamichael et du Hongrois Vilmos Zsigmond qui présidait ce groupe).

Selon lui, et sans mésestimer Madridimagen pas plus que Manaki Brothers, Camerimage est devenu, au fil des années et vu l’importance qu’il prend, un rendez-vous incontournable. Depuis qu’il assiste à cette manifestation, il lui est apparu qu’elle est pour la première fois vraiment centrée autour de l’image et que, dans les conversations, du petit déjeuner jusqu’à plus d’heures, on n’y parle à tout instant d’image, ce que nous aimerions bien, précise-t-il, entendre du côté de l’AFC.

Malgré ce constat général plutôt positif, Robert évoque pourtant quelques bémols.

Bémol n° 1 : le choix des films. La sélection ne semble pas être le reflet des meilleures images produites durant l’année. Il a l’impression de revoir en sélection un peu toujours les mêmes directeurs de la photo. Il pense que les sélectionneurs devraient beaucoup plus déléguer, car ils n’ont pas les moyens financiers de voyager à l’autre bout de la terre et puiser ainsi dans le vivier existant. Il nous faudrait, dit-il, réfléchir de nouveau à la façon dont l’AFC pourrait proposer à Camerimage (et aux autres festivals d’image) des films tournés par des opérateurs français.

Bémol n° 2 : les inquiétudes de Marek, le directeur du festival, vis-à-vis des majors hollywoodiennes. Etant donné que cette année aucun directeur de la photo venant des USA ne figurait au palmarès, Marek, au dernier moment et de peur que les dites majors ne lui envoient plus de films à l’avenir, « a sorti de son chapeau » un prix spécial " du directeur de Camerimage et de ses collaborateurs " qui a été remis à un DP américain. Robert pense que Marek n’a qu’une idée en tête, orienter le festival en direction des Américains.

Bémol n° 3 : le fait que Camerimage dure un jour de plus. En effet il se termine le dimanche ; ce qui n’est pas la meilleure des idées, car les opérateurs qui travaillent le lundi matin sont obligés de quitter la fête bien avant la cérémonie de clôture.

Bémol n° 4 : la projection de la deuxième salle de cinéma, le Charlie, où se déroulent certaines séances, est très mauvaise.

Bémol n° 5 : Robert n’a rencontré à Lódz que bien peu d’étudiants français...

Camerimage est également un point de rencontre des industries techniques. On peut y voir des gens de Kodak, de Fuji, des sociétés de manufacture de caméras et de matériel électrique, des labos, des maisons de postproduction trinquer ensemble au plus tard de la nuit (la vodka aide bien à délier les langues plus ou moins concurrentes, que ce soient celles d’industriels ou de directeurs de la photo...). Des invitations sont lancées pour retrouver tout ce petit monde dans les restaurants ou les bars habituels (celui du festival et celui de l’hôtel).

Des projections de films de démonstration et des présentations de matériel sont organisées devant des salles pleines d’étudiants. Etudiants qui peuvent assister, en studio, à des " workshop " ou ateliers techniques animés par des opérateurs de renom (Chris Doyle, Laszlo Kovacs, Oliver Stapleton, Billy Williams, etc.).

Un journée " Camerimage Forum " s’est articulée autour de deux thèmes de réflexion : les conditions de travail et les droits d’auteur.

Question droits d’auteur et du côté des USA pour commencer, comme toujours, les DP ne les obtiendront jamais, et ils n’ont même pas le droit d’en parler...

Par contre, les Européens sont très virulents dans leur demande de droits d’auteur et sur la façon de se faire appeler, à l’italienne, " auteurs de la photographie ". Jost Vacano étant leur principal porte-drapeau, criant haut et fort : « Je ne suis pas un technicien, je suis un artiste ! ». Ce dernier n’ayant pas su répondre à une question de Robert qui lui demandait ce que deviendraient alors les acquis sociaux des DP allemands.

Tout le monde semble d’accord pour faire respecter l’image d’une œuvre cinématographique.

A Lódz, Robert s’est abstenu de donner la position de l’AFC sur les droits d’auteur, celle-ci, à ses yeux, n’étant pas claire à ce jour. Par contre il a été le digne porte-parole de l’AFC au moment de présenter la Charte de l’image. Celle-ci a reçu un accueil sympathique et intéressé : elle peut devenir une reconnaissance légale pour défendre l’intégrité de l’œuvre. Affonso Beato, directeur de la photo brésilien et président du jury de la compétition officielle, a même demandé à Robert si elle pouvait être traduite en portugais.

Pour résumer en quelques mots ce qui a été dit des conditions de travail : trop d’heures sont effectuées, d’où un surplus de fatigue entraînant danger et accidents, et bien sûr la quasi-absence de vie de famille.

L’ASC était représentée cette année par des gens fort sympathiques, que l’on pourrait presque qualifier d’" européens ", sous la houlette du directeur de la photographie Kees Van Oostrum.

Kees, membre de l’ASC depuis 1993, fait partie présentement du bureau et est le vice-président du comité " Technologie " qui, entre autres, entretient des contacts étroits avec Sony. Ce comité a également effectué un gros travail de recherche sur les espaces colorimétriques.

Les directeurs de la photo portent là-bas une attention particulière à l’étalonnage numérique. En effet, pour ne pas risquer d’effrayer les productions, ils s’efforcent d’y consacrer au moins une semaine, maximum deux, tout en tentant de convaincre leurs interlocuteurs que la présence du DP y est indispensable car, lorsqu’il est là, il fait gagner du temps, donc de l’argent...

Le festival s’est terminé sur l’annonce faite par Marek, son président, du projet de construction d’un nouvel espace, car le Grand Théâtre où se déroule la manifestation ne peut plus désormais l’accueillir. Rendez-vous, alors, fut donné pour l’année prochaine.