L’AFSI (Association française du son à l’image) rencontre K5600 Lighting

Compte rendu par Olivier Le Vacon et Denis Martin

Marc Galerne et l’équipe de la société K5600 ont reçu, le 23 juin dernier, les membres de l’AFSI, dans le cadre d’un premier " Labo " dont le thème s’articulait autour des " Nuisances sonores ".

Demi-journée riche en échanges, aux dires de l’AFSI sur son site Internet, à la fois dans l’apprentissage des techniques de construction de certains projecteurs et de leur fonctionnement, mais aussi en retour, ses membres ont pu donner à leurs interlocuteurs les informations principales concernant les problèmes de nuisances sur les plateaux de tournage.
Ce compte rendu étant normalement consultable sur l’espace membres du site Internet de l’AFSI, celle-ci nous en a exceptionnellement réservé la teneur, ce dont nous la remercions vivement.

Quelques-uns des projecteurs testés par l'AFSI dans les locaux de K5600
Quelques-uns des projecteurs testés par l’AFSI dans les locaux de K5600

Etaient présents :
Pour l’AFSI : Alexandre Andrillon, Laurent Blahay, Julien Bourgon, Olivier Le Vacon, Denis Martin et Jean-Luc Raultcheynet
Pour K5600 Lighting : Marc Galerne et Bruno Secorro
Pour Powergems Ltd : Dr Phil Ellams Ph.D, associé et responsable du département R&D.

Journée d’essais avec différents projecteurs de la gamme proposée par K5600.
Nous avons écouté des petits Joker Bug de 200 à 800 W, neufs et anciens, et des Alpha 2, 4 et 18 kW, avec des ampoules de différentes marques, et des ballast de différents modèles. Nous avons découvert la nouvelle gamme de ballasts pour les Joker Bug, dont le 800 W sans ventilation.

Jean-Luc Raultcheynet, Denis Martin et Marc Galerne
Jean-Luc Raultcheynet, Denis Martin et Marc Galerne

1) Le Joker Bug

La gamme Joker Bug (accessoirisable avec des Chimera, etc.) remplace les Jokers PAR à miroir
parabolique.
Nous essayons différentes puissances et différents modèles plus ou moins anciens.
Les ballasts des Joker 800 sont ventilés. Une nouvelle gamme de ballasts Powergems vient de
sortir, avec un nouveau 800 sans ventilateur.
Toute cette nouvelle gamme sera équipée d’une nouvelle électronique moins chauffante et d’un
boîtier entièrement clos avec une puissance plus adaptée à chaque lampe. Ces nouveaux ballasts
vont arriver sur le marché lentement, mais il faudrait que les loueurs mettent systématiquement 2 ou 3 nouveaux modèles dans le forfait d’une location, afin que le chef électro puisse les utiliser à la
face quand c’est nécessaire.

On peut brancher au moins 3 ou 4 montées de lampe (extensions) sans aucun problème de
fonctionnement de la lampe, et jusqu’à un maximum de 100 mètres en longueur. Les ballasts
arrivent, dans une certaine mesure, à compenser la perte due à l’impédance des câbles. Evidemment le prix des montées de lampes, à l’achat ou à la location, est à prendre en compte.
Si on couvre un ballast, c’est la thermistance qui saute en cas de surchauffe, et il n’y a pas de
destruction de matériel. Il n’existe pas de boîtier acoustique pour enfermer les ballasts, trop
volumineux à transporter, et à mettre en œuvre.
Pour le Joker, les nouvelles têtes ne sont plus équipées d’un amorceur coulé dans la résine : ils font donc un peu de bruit. La bobine vibre et résonne sur le support et le capot métal s’il est mal bloqué se met en résonance : en vissant ou dévissant la vis arrière du capot, on arrive à faire varier ce bruit pour trouver le meilleur compromis, en fonction de la situation où on se trouve. A noter que les capots noirs non métalliques, mais réservés au marché américain, sont plus épais et moins bruyants.

Les modèles plus anciens (deux ans à peu près), équipés de ces bobines, sont très silencieux.

La fabrication des lampes reste artisanale et leur prix est identique entre les toutes les différentes
marques, ce qui est très important vu les différences de résultats de mesure de bruit.
K5600 a d’ailleurs refusé de livrer avec ses projos des lampes Osram. Nous verrons, au fil de la
journée, que cette marque est l’une de celles à éviter pour son niveau sonore.

Lors de nos premiers essais, on remarque que les 3 Joker récupérés chez les loueurs et donc plus
anciens (même le 800 qui est le seul projecteur de la gamme avec une bobine d’amorçage noyée
dans la résine), sont très silencieux.
Le ballast aussi vieillit, même non ventilé. L’électronique peut se mettre à vibrer. Pour les anciens
ballasts 800, l’axe du ventilateur, s’il n’est pas huilé, peut générer beaucoup de bruit.

Pour ce qui est de la location, on trouve bien sûr d’anciens matériels, plus ou moins bien entretenus (quand ils le sont), et le nombre de montées de lampe fournies avec un projo peut être limité. Des extensions supplémentaires augmenteraient-elles le prix de location ? En tous cas, les loueurs peuvent très bien fabriquer toutes sortes de montées de lampes. A nous d’insister auprès du chef op ou du chef électro pour qu’il demande du matériel supplémentaire ou particulier afin de répondre aux problèmes de bruits générés par leur matériel.
Denis demande aussi si on peut prévoir des extensions " passage de portes " (câbles tout plats), comme les câbles secteurs fournis par le groupiste.

Marc Galerne nous demande quels bruits sont acceptables : difficile de répondre, tant nos situations de travail sont diverses : décors grands ou petits, nombre de projecteurs en service, distance de ces derniers par rapport aux acteurs, niveau de bruit ambiant, niveau sonore des sources à enregistrer...

Nous trouvons que l’ampoule 800 GE (General Electric) est vraiment très silencieuse par rapport à
celle de Sylvania, et celle d’Osram assez terrifiante. C’est incroyable la différence de bruit entre ces
ampoules pourtant de grandes marques. Philips doit en sortir une dans cette puissance.
Par contre, le désavantage de la GE, c’est la difficulté du ré-amorçage à chaud qui prend plus de
temps, source possible d’énervement sur un plateau.

Nicolas Quentin (absent ce jour-là) nous demande de poser la question de la mise au point d’un
blimp pour les têtes de gros projecteur. K5600 n’a pas vraiment de réponse : arriver à arrêter les
nuisances sonores des têtes, sans empêcher la dispersion de la chaleur, avec un matériel léger, facile à manipuler, et facilement stockable dans un camion électrique, n’est pas si simple à réaliser. Le matériau microperforé utilisé sur les grosses sources pourrait être une piste de recherche.

Il est vrai que nous passons énormément de temps (trop !!!?) et d’énergie dans nos trucs et astuces pour pallier les bruits des différents matériels électriques (mais aussi caméra).
Voir un dossier sur le site de K5600.

Nouvelle série de tests avec le Joker 400
Nous essayons une lampe Osram sur le Joker 400 : assez bruyante. Mesurée à –53 dB avec le
logiciel sonomètre de l’Iphone de Julien Bourgon. Puis une lampe Philips mesurée à –44 dB au
sonomètre.

Essai de modification des fréquences de fonctionnement des ballasts avec le Joker 800 :
Dr Phil Ellams Ph.D, de Powergems, va essayer une Eprom de 290 Hz sur un ballast de 800 Joker
(qui, à l’origine, est à 75 Hz).
Le bruit de la lampe est plus gênant, plus fort et plus aigu.
Mesures sonomètre : -48 dB pour le 290 Hz, -44 dB pour le 75 Hz
Ensuite une Eprom de 50 Hz : le bruit est moins fort et moins présent, mais pas de gros changement entre 50 Hz et 75 Hz.

Les Joker Bug sont souvent équipés d’une Chimera, ce qui peut diminuer un peu le bruit de la lampe sur le décor.

Nous trouvons souvent sur les plateaux des Joker " perchés " par des électros. Ils sont très
encombrants car souvent avec une Chimera, avec une ou deux personnes derrière pour gérer le
ballast et le câble électrique : une vraie concurrence au perchiste dans les décors étroits et les
mouvements de caméra.

Les membres de l’AFSI présents donnent leur aval pour la combinaison de Joker Bug 800, avec les
amorceurs équipés de bobines noyées dans la résine (équipant les têtes jusque il y a deux ans), une lampe GE, et un nouveau ballast non ventilé en 75 ohms.

Julien Bourgon et son sonomètre
Julien Bourgon et son sonomètre

2) Les grosses sources

Chez K5600, la série Alpha va de 2 kW à 18 kW.
Notre problème, sur les plateaux, est de se retrouver de plus en plus souvent avec des grosses
sources en intérieur.
On peut faire fonctionner n’importe qu’elle tête avec n’importe quel ballast. Il faut juste régler les
problèmes de connectique propre à chaque marque.
Lorsque l’on passe un ballast en mode " Silent ", on ne change pas la fréquence de fonctionnement, mais on écrête le signal carré, ce qui fait que la lampe siffle un peu moins.

Certains projecteurs sont équipés, sur le dessus, d’une tôle microperforée : la chaleur passe mais
pas l’eau, ce pourrait être une piste intéressante pour élaborer des protections pluie efficaces, légères et plutôt silencieuses.

Essai avec un 2,5 kW - 4 kW
On constate qu’en gardant la même lampe et le même ballast, les nouvelles têtes Alpha sont un peu moins bruyantes que leur aînées, car l’amorceur, plus récent, est positionné différemment par
rapport à la lampe.
En changeant de lampe, on constate que la GE est toujours la moins bruyante. La Philips et l’Osram sont presque équivalentes (mesurées à – 49 dB), avec un petit avantage pour Osram qui chante plus dans les aigus et donc moins gênante.

Essais avec différents ballasts
Le ballast Desisti DEB 2 500-4 est assez bruyant : mais le résultat sur la lampe est encore meilleur, et son mode silencieux très performant en 50 %. Dimmée à 50 %, la lampe commence à être assez " silencieuse ".
Ballast ARRI
Ballast LTM Electronic
Olivier propose donc la solution candide qui consisterait à employer toujours des projos du double
de la puissance voulue, pour ne les utiliser qu’à moitié, ce qui deviendrait compliqué au-dessus de
18 kW.

Certaines des têtes Arri de grosse puissance sont ventilées.

Comparaison de bruit du projecteur avec une même ampoule Philips
La mesure avec le ballast Arri 2,5-4 EB donne -49 dB
La mesure avec le ballast Power GemsB donne -47 dB
Le ballast Power Gems s’avère être le ballast qui rend le projecteur le moins bruyant.

Essai avec un 18 kW
Projecteur le plus puissant de la gamme Alpha.
Très bruyant, éloigner le ballast ou trouver un " masque "
C’est toujours la lampe GE qui est la moins bruyante par rapport à ses concurrentes.

Mesures au sonomètre :
- ampoule Wolfram -60 dB
- ampoule OSRAM -61 dB
- ampoule G.E. -57 dB

La source idéale pour recréer le soleil serait de 70 kW. Mais pour faire ne serait-ce qu’un 24 kW, il
faudrait une lentille qui supporte la température (très compliquée à fabriquer).

Conclusion

Tous ces matériels font plus ou moins de bruit. Après une demi-journée comme celle-là, on se dit
que les améliorations sonores sont assez faciles à réaliser : matériel de bonne qualité, bien
entretenu, un choix des bonnes marques d’ampoules, de ballasts...
On pourrait aussi faire des mesures plus poussées, en chambre sourde (très long à faire), travailler avec les différents constructeurs, utilisateurs, la CST, etc., pour élaborer des normes de bruit maximum autorisé sur un plateau.
Espérons que les fabricants de lampes et les loueurs seront intéressés par nos remarques.

En attendant, et l’accueil adorable de Marc et son équipe le démontre, en passant un peu de temps, en discutant..., on arrive à comprendre les problèmes et tenter de les résoudre ne paraît pas impossible.

  • En noyant la bobine des nouveaux Joker, on arrivera à ce qu’ils ne fassent plus de bruit, comme
    les anciens modèles.
  • En utilisant les ampoules de la marque GE, on arrive à de très bons résultats pour tous les
    projecteurs de la gamme : pour tous les Joker, ils peuvent être très silencieux. Pour les plus
    gros projecteurs, les résultats seront meilleurs (tout en sachant que ces puissances feront
    toujours du bruit).
  • En utilisant les nouveaux ballasts pour 800 non ventilés, on refroidirait en partie nos cerveaux
    sur les plateaux, très sollicités par bien d’autres choses.
  • Et si, avec tout ça, on a encore du bruit, on peut, de toute façon, mettre minimum 3 extensions
    (montées de lampe) à chaque projecteur. Car souvent, la réponse que l’on entend sur les
    plateaux, c’est : deux max !!!!