L’Homme à la caméra # 7 / Dans l’ombre d’André Antoine : les clairs-obscurs anonymes du "Coupable" (1917)

Séance animée par Manon Billaut

La Lettre AFC n°274

Pour la septième séance du cycle "L’Homme à la caméra : Du tourneur de manivelle au chef opérateur", l’association Kinétraces propose, en partenariat avec La Fondation Jérôme Seydoux-Pathé, de pointer le doigt sur le travail de la lumière en studio qui, à la fin des années 1910, se distingue des prises de vues en extérieurs naturels à la lumière du jour.

Après son premier film Les Frères corses tourné en grande partie en studio à cause des contraintes de la guerre, Antoine applique pour la première fois sa méthode de tournage in situ avec Le Coupable, tourné à Paris en 1917. L’histoire se passant en partie dans une cour d’assises, les lieux de tournage alternent encore entre le décor naturel (vues pittoresques de Paris et de sa banlieue) et le studio (reconstitution de la cour d’assises), et confèrent au film à la fois un intérêt documentaire certain et les traces d’une recherche esthétique dans l’usage dramatique du clair-obscur.
Partant de la nouvelle contemporaine de François Coppée, Antoine dynamise le récit grâce à une construction en flash-back, procédé narratif nouvellement apparu aux États-Unis, afin de répondre aux prérogatives de Charles Pathé qui était impressionné par la maîtrise à la fois esthétique et narrative des productions cinématographiques de l’autre côté de l’Atlantique. L’homme d’affaires commandait entre autres à ses réalisateurs d’augmenter la tension dramatique de leurs films en variant les échelles de plans, en dynamisant leur montage et en exploitant la lumière artificielle.

C’est ce travail de la lumière, unique dans la filmographie d’Antoine, qui sera ici pointé, le metteur en scène oscillant entre une recherche de ce qu’il appellera le "sensationnel", et l’application de sa méthode expérimentale dans la réalité. L’opérateur de ces clairs-obscurs étant encore inconnu malgré nos recherches, il s’agira également de voir dans quelle mesure il est possible d’identifier un style singulier dans l’analyse des prises de vues qui seront projetées dans une très belle copie teintée de la Cinémathèque française encore jamais montrée.
Cette méthode de tournage sera enfin mise en lumière par la projection d’un document inédit, les rushes de L’Hirondelle et la mésange tournés par René Guychard en 1920 à bord des deux péniches remontant l’Escaut. À nouveau, on verra comment le travail de la lumière en studio se distingue des prises de vues en extérieurs naturels à la lumière du jour.

L’intervention de Manon Billaut sera suivie de la projection de :
- L’Hirondelle et la mésange (1920), France, 15 min — sélection de rushes
- Le Coupable (1917), France, 83 min.

"Le Coupable", d'André Antoine, 1917 - Collection Cinémathèque française
"Le Coupable", d’André Antoine, 1917
Collection Cinémathèque française

Les films seront projetés en 35 mm et en DCP. Les copies proviennent de la Cinémathèque française. La séance est accompagnée au piano par les élèves de la classe d’improvisation de Jean-François Zygel, en partenariat avec le Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris.

Manon Billaut enseigne le cinéma à l’université et termine une thèse consacrée au cinéma d’André Antoine (IRCAV, Université Sorbonne Nouvelle-Paris 3). Elle a travaillé sur les archives d’Antoine conservées à la BnF en tant chercheuse invitée du département des Arts du spectacle et mène actuellement l’expertise de ses films conservés à la Cinémathèque française. Elle a présidé l’association Kinétraces pendant trois et est secrétaire générale de l’Association française de recherche en histoire du cinéma (AFRHC).

L’Homme à la caméra # 7 / Dans l’ombre d’André Antoine : les clairs-obscurs anonymes du Coupable (1917)
Mardi 18 avril à 19 heures
Fondation Jérôme Seydoux-Pathé
73 avenue des Gobelins - Paris 13e