Le CNC suggère des réformes radicales dans le financement du cinéma

par Nicole Vulser

La Lettre AFC n°114

Le groupe de travail mis en place fin 2001 propose une refonte des instruments fiscaux. Dans les prochains jours, le ministère de la Culture et de la communication devrait nommer un conseiller d’Etat, Jean-Pierre Leclerc, comme chargé de mission sur le financement du cinéma, pour tenter de mettre en œuvre concrètement ces propositions.

Le constat est clair : dans sa globalité, le secteur connaît une santé apparemment insolente, qui cache pourtant difficilement une crise grave, notamment dans la production indépendante ; les professionnels s’inquiètent sérieusement du net développement de films à budgets élevés (plus de 10 millions d’euros) et de « la dépendance désormais importante - sans doute excessive - du financement de la production française à l’égard de la télévision ». Assez alarmant, le rapport stigmatise, « à court terme, l’abandon pur et simple de certains projets de films, voire la disparition d’entreprises aussi innovantes que fragiles économiquement ».
Au vu de la relative faiblesse du financement du secteur, le groupe de travail préconise « une relance de la croissance des investissements en faveur de la production », tout en maintenant les systèmes actuels, qui « ne suffisent plus à accompagner durablement la dynamique de la production française ». Très concrètement, le groupe de travail suggère un développement des instruments fiscaux de financement des films et des entreprises de production.

Pour donner une nouvelle ampleur aux Sofica (sociétés de financement du cinéma et de l’audiovisuel), le rapport suggère « une augmentation de leur enveloppe globale ». Un toilettage de ce dispositif est envisagé, afin notamment de mieux orienter les fonds vers la production indépendante et de le démocratiser davantage, en ouvrant plus largement l’accès à ce système de réduction d’impôt, encore réservé à une élite. « Le capital-risque », également lié à des dispositions fiscales avantageuses, n’est jusqu’à présent pas une piste explorée par l’industrie du cinéma.
Une autre grande réforme proposée consiste à rééquilibrer les recettes du compte de soutien en mettant plus fortement à contribution le secteur, en pleine expansion, de la vidéo.

Actuellement, le chiffre d’affaires de la vidéo n’est taxé qu’à 2 %, là où les autres canaux de diffusion des films, la télévision et la salle doivent cotiser respectivement à hauteur de 5,5 % et de 10,9 %.
Pour trouver de nouvelles recettes, le groupe de travail suggère de « développer les financements régionaux du cinéma ».
Hormis le recours plus important à des financements internationaux (via les coproductions), il est envisagé d’assurer une plus grande diversité de la production, qui passerait par « une extension de la clause de diversité de Canal (qui doit consacrer un minimum de ses préachats à des films dont le devis est inférieur à 5,34 millions d’euros) à d’autres sources de financement ».
Enfin, pour suivre ces évolutions, le rapport suggère la création d’un observatoire de la production cinématographique.
(Nicole Vulser, Le Monde, 18 septembre 2002)