Le directeur de la photographie Darius Khondji, AFC, ASC, adopte l’Alexa

par Arri Camera Systems La Lettre AFC n°204

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Dans un entretien publié en anglais sur le site Internet d’Arri, Darius Khondji, AFC, ASC, parle, à sa façon, de ses expériences avec l’Alexa, caméra qui marque, selon lui, le début d’une nouvelle ère dans le cinéma numérique.
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Darius Khondji, AFC, ASC et la caméra Arri Alexa - Photo Moa Khalil
Darius Khondji, AFC, ASC et la caméra Arri Alexa
Photo Moa Khalil

Arri News : De quelle manière ces différents tournages ont-ils mis l’Alexa à l’épreuve ?

Darius Khondji : Mon premier tournage avec l’Alexa a été le petit film en 3D pour Mercedes et nous avons principalement tourné en extérieur jour. Il s’agissait d’un film promotionnel pour la nouvelle génération de voitures Mercedes qui sortira bientôt (des véhicules électriques, à hydrogène et hybrides) et il a été tourné à Paris. Ils voulaient un film en 3D pour le montrer sur grand écran aux Champs-Elysées avant la Salon de l’Automobile de Paris, qui a eu lieu en octobre. L’Alexa a très bien géré les extérieurs jour et la prise de vue en 3D. Nous n’avons rencontré aucun problème.

La publicité Dior était un tournage pour le parfum J’adore, mettant en scène Charlize Theron. Il ne sortira que l’année prochaine, car un lourd travail de postproduction doit être effectué. C’était un travail très intéressant à faire avec l’Alexa car le premier jour de tournage nous avons fait une nuit américaine dans la galerie des Glaces du château de Versailles, éclairée uniquement par des candélabres électriques de faible puissance.
Nous ne pouvions pas éclairer la galerie et nous disposions de très peu de lumière. Nous avons réalisé des tests avec différentes caméras numériques et nous avons opté pour l’Alexa, car c’était la plus sensible et celle qui nous donnait le rendu le plus beau et le plus doux.

AN : Avez-vous filmé avec la sensibilité nominale de 800 ISO ?

DK : J’ai tourné à 800 ISO et c’était plus que suffisant. Quand j’ai mesuré avec ma cellule cette très faible lumière, comme je l’aurais fait en pellicule, je pouvais lire T0.7 à 800 ISO, ce qui est vraiment peu. Quand nous affichions un diaphragme de T1.4 sur l’objectif, nous obtenions, sur le moniteur, une image surexposée.
Nous avons finalement choisi d’exposer à T2.8. Le capteur de l’Alexa est très sensible et parfois votre cellule peut paraître presque inutile. II faut alors faire confiance à ses yeux. Bien qu’il soit préférable d’utiliser votre cellule et éclairer comme vous l’auriez fait sur pellicule.

AN : Comment trouvez-vous la dynamique du capteur ?

DK : La dynamique du capteur est très bonne. Je suis sûr qu’elle pourrait être encore améliorée, mais c’est vraiment beaucoup mieux que n’importe quelle autre caméra numérique avec laquelle j’ai travaillé. Je ne me sentais pas limité avec l’Alexa. Alors que normalement avec les caméras numériques, vous devez souvent diminuer certaines sources trop lumineuses pour protéger les hautes lumières.

AN : Quels systèmes d’enregistrement avez-vous utilisés pour ces tournages ?

DK : Je travaille avec Christophe Hustache-Marmon, un très bon ingénieur de la vision ; nous n’avons pas encore utilisé le mode RAW. Nous avons utilisé l’enregistrement embarqué sur carte SxS, ainsi que le HDCAM SR. Sur le tournage Gautier, nous avons utilisé les cartes SxS et le montage a débuté directement sur le plateau, ce qui est une chose fantastique. C’est ainsi que Jean-Baptiste aime travailler.

AN : Quelles ont été vos impressions pendant le tournage avec cette caméra ?

DK : J’ai beaucoup aimé travailler avec l’Alexa. Je me sens plus proche de cette caméra que de n’importe quelle autre caméra numérique. Je ne sais pas si c’est lié au fait que ce soit une Arri, mais évidemment que ça aide !
Lorsque vous êtes sur le plateau avec elle, vous sentez que Arri s’est efforcé de répondre aux attentes des réalisateurs et des chefs opérateurs pour leur proposer une caméra plus proche des caméras argentiques. L’Alexa est petite et silencieuse, ce qui est très important, elle peut être utilisée à l’épaule ou sur un Steadicam, elle ne chauffe pas beaucoup et bien sûr, sa sensibilité nous donne beaucoup de liberté.

AN : Quelles sont vos impressions sur les images tournées avec l’Alexa ?

DK : L’une des choses que j’ai le plus appréciée sur cette caméra est la douceur et la beauté de la courbe et toute la latitude que l’on a pour jouer avec l’image. Vous pouvez vraiment la modeler comme une sculpture pour la rendre plus douce ou plus contrastée, comme lorsque vous utilisez différentes émulsions de pellicule. Et ça, je l’apprécie énormément. Vous pouvez créer le look que vous voulez, sans que rien ne soit bloqué dès le départ. C’est agréable d’avoir cette liberté.

C’est une caméra très sensuelle avec laquelle il est agréable de travailler. Bien sûr que des améliorations sont possibles, mais c’est la première fois que je sens que le numérique a tourné une page. La première fois que je me suis servi de l’Alexa, j’étais un peu nostalgique, car je reste très attaché à la pellicule et je la défendrai autant que possible. Et bien sûr, je continuerai à tourner en film, mais je pense que pour mon prochain long métrage, l’Alexa pourrait être un bon choix. Je crois que Arri s’est tout simplement surpassé en essayant d’imiter le film et, à partir de maintenant, le numérique est passé dans une nouvelle ère.

AN : Seriez-vous donc heureux d’utiliser l’Alexa pour un long métrage ?

DK : Oui, je le serais, mais ce qui serait vraiment bien, c’est que Arri développe un modèle avec un capteur 4:3 et un viseur optique. Cela nous rapprocherait vraiment d’une caméra film. Pouvoir utiliser un capteur full pour faire du vrai anamorphique ou du 1.33:1 serait vraiment fantastique.