Premières Assises sur la parité, l’égalité et la diversité dans le cinéma

La Lettre AFC n°290

Organisées par le Collectif 50/50 – avec le soutien du Centre national du cinéma et de l’image animée et du ministère de la Culture –, les premières Assises sur la parité, l’égalité et la diversité dans le cinéma se sont tenues les 18, 19 et 20 septembre 2018. À l’issue de ces trois matinées d’ateliers et table ronde, Françoise Nyssen, ministre de la Culture, a annoncé un plan en faveur de l’égalité hommes-femmes.

D’après Anne Diatkine, dans un article paru dans Libération du vendredi 21 septembre 2018...
« Il est temps de mettre en place une révolution. » C’est sur ces paroles énergiques promulguées pendant le Festival de Cannes que la ministre de la Culture, Françoise Nyssen, s’était engagée à prendre des mesures pour asseoir l’égalité et la diversité dans le cinéma français. C’est en clôture des joyeuses Assises sur la parité, l’égalité et la diversité dans le cinéma français [...] que la ministre vient de dévoiler jeudi son plan d’action. Des six mesures, la plus frappante est sans conteste celle qui expérimente pendant l’année 2019 l’octroi d’un bonus de quinze pour cent aux productions dont les huit postes principaux respecteront la parité (via le fonds de soutien cinéma).
L’idée est d’encourager par une aide financière les décideurs à former des équipes plus équitablement mixtes, sans que les femmes ne soient dévolues à des fonctions traditionnellement genrées (scriptes, maquilleuses, cuisine) ou subordonnées. En clair, un réalisateur (masculin) pourra très bien bénéficier de ce coup de pouce financier, si, dans son équipe, il choisit cinq femmes à des postes considérés comme stratégiques (direction de la photo, son, montage, déco, montage). Une femme cheffe contre un peu d’argent supplémentaire ? Le principe a été chaleureusement applaudi lors du discours de la ministre. En dépit du malentendu qu’il peut susciter : n’y-a-t-il pas un risque que les principales intéressées se sentent choisies d’avantage pour l’apport pécuniaire qu’elles génèrent plutôt pour leurs talents et leur compétences ?

[...] Rappelons qu’il y a vingt ans Caroline Champetier, Dominique Le Rigoleur ou Agnès Godard, toutes trois cheffes opératrices, faisaient encore figure d’exception. En 2010, Caroline Champetier nous confiait : « On a longtemps considéré la caméra comme un objet phallique. Or une caméra, ça capte, ça reçoit. Même si de plus en plus de femmes deviennent chefs op’, elles restent minoritaires et on ne leur confie pas de gros budgets. On me dit : "C’est parce que tu choisis de travailler pour des films que tu respectes et qui ne bénéficient pas de beaucoup de moyens." C’est faux ! Je serais ravie d’être moins contrainte à faire des exploits. En France, nous sommes peu à diriger des équipes conséquentes. »

Les cinq autres mesures peuvent sembler couler de source. L’une consiste à « genrer les études du CNC pour mieux informer sur la place des femmes ». Cela n’a l’air de rien et c’est un changement radical. Sans données chiffrées fines systématiques, comme le note la cinéaste Rebecca Zlotowski, membre du collectif 50/50, « on en était réduite à évaluer au doigt mouillé la place des femmes. On pouvait estimer que certes ça allait beaucoup mieux puisqu’on était de plus en plus nombreuses ». Cette augmentation de la cohorte des réalisatrices, souvent diplômées de La Fémis, et la retombée médiatique de leur premier film, masquent cependant une réalité injustifiable. Un rapport du CNC met en effet en lumière qu’entre 2009 et 2014, l’écart moyen de salaire entre un réalisateur et une réalisatrice était de… 42 % !

Les cheffes opératrices ne sont pas tellement mieux loties, quoique l’écart est moindre que pour les réalisatrices. [...]

Sont intervenu(e)s au cours de ces assises
Atelier Stéréotypes de genre et liberté de création
- Modératrice : Rebecca Zlotowski (réalisatrice et scénariste)
- Marie Amachoukeli (réalisatrice et scénariste)
- Jacques Audiard (réalisateur et scénariste)
- Iris Brey (universitaire et journaliste)
- Géraldine Van Hille (cheffe du département Missions cohésion sociale du CSA)
- Elodie Cassignol et Soizic Limage (Agence Datcha).

Atelier Vivier et éducation à l’image
- Modératrice : Tania de Montaigne (écrivaine et journaliste)
- Saïd Berkane (délégué général adjoint de la Fondation Culture et Diversité)
- Nathalie Berriat (directrice des Gobelins)
- Nathalie Coste Cerdan (directrice de La Fémis)
- Carole Desbarats (vice-présidente des Enfants du Cinéma et rédactrice de la revue Esprit)
- Vincent Lowy (directeur de l’ENS Louis-Lumière).

Table ronde Accélérer le changement
- Modératrice : Céline Sciamma (réalisatrice et scénariste)
- Caroline Bonmarchand (productrice - Avenue B Productions)
- Mickaël Marin (directeur du Festival International du Film d’Animation d’Annecy)
- Angeline Massoni (directrice de production)
- Carole Scotta (productrice, distributrice et exploitante - Haut et Court)
- Elisabeth Tanner (agente - Time Art)
- Franck Weber (directeur du Développement Gaumont).