Résultats maussades pour le cinéma français en 2007

par Nicole Vulser

Le Monde, 10 janvier 2008

Trois indicateurs chiffrés témoignent d’une morosité du cinéma français en 2007. La fréquentation en salle baisse. La diffusion des films français à l’étranger ne progresse pas. Quant aux tournages de films étrangers à Paris, ils raccourcissent dans la durée.

Fréquentation maussade
En 2007, les entrées – 178,14 millions – ont baissé de 5,6 % par rapport à 2006, selon le Centre national de la cinématographie mais elles restent dans la moyenne des dix dernières années (177,30 millions). Les spectateurs ont déserté les salles obscures en avril et novembre mais témoigné d’une assiduité particulière en juillet. Cinq gros films américains, destinés notamment au jeune public, ont permis d’endiguer, en 2007, les résultats moroses. Ratatouille, de Brad Bird, Spider-Man 3, de Sam Raimi et Harry Potter et l’Ordre du phoenix, de David Yates ; le troisième épisode de la saga Pirates des Caraïbes, de Gore Verbinski, et Shrek le Troisième, de Chris Miller, ont, en fidélisant chacun plus de 5,5 millions de spectateurs, freiné la baisse des entrées. Ratatouille arrive en tête avec 7,7 millions de spectateurs.

Deux films français, contre sept en 2006, La Môme d’Olivier Dahan, et Taxi 4 de Gérard Krawczyck ont franchi les 4 millions d’entrées. En l’absence de très gros films porteurs comme Les Bronzés 3, la part de marché des films hexagonaux s’est tassée, à 36,5 % (44,6 % en 2006). Cette part de marché, que de nombreux pays européens nous envient, demeure supérieure à son niveau de la décennie (35,9 %).

Après une année 2006 exceptionnelle, les films français reculent à tous les niveaux : là où neuf films franchissaient les 2 millions d’entrées, il n’y en a plus que trois en 2007. Douze films, et non plus dix-huit comme en 2006, dépassent le million d’entrées et vingt-sept (contre trente-neuf en 2006) en comptent plus de 500 000.

Ces résultats maussades ont profité aux films américains (49,9 % de part de marché contre 44,2 % en 2006) et aux longs métrages d’autres nationalités. Le succès de La Vie des autres, de l’Allemand Florian Henckel von Donnersmarck, avec plus de 1,5 million d’entrées, y a largement contribué.

Exportations étales
En dehors de l’Hexagone, le cinéma français devrait presque atteindre, sur l’année 2007, les 60 millions de spectateurs. Le résultat est quasiment similaire à celui de 2006, selon les chiffres qui devaient être publiés, jeudi 10 janvier, par Unifrance, l’organisme chargé de promouvoir les films français dans le monde. C’est moins que les films français vus en France (64,95 millions d’entrées l’an dernier).

Les pays européens restent toujours le principal marché du cinéma hexagonal, avec l’Allemagne en tête (5,8 millions d’entrées) suivie par l’Italie (3 millions). Les grosses " machines " comme Arthur et les Minimoys de Luc Besson, La Môme ou Taxi 4 ont séduit à l’étranger (avec respectivement 9, 4,5 et 4,2 millions d’entrées). Mais aux Etats-Unis par exemple, Lady Chatterley de Pascale Ferran a fidélisé 100 000 spectateurs, là où le collectif Paris je t’aime a réalisé 750 000 entrées et 2 Days in Paris de Julie Delpy, 675 000. A noter aussi, le succès inattendu d’Ensemble c’est tout de Claude Berri en Allemagne (820 000 entrées). Si les films français ont plutôt reçu un accueil favorable dans le monde anglo-saxon et en Russie, ils subissent en revanche un méchant revers au Japon.

Des tournages américains moins longs à Paris
Les tournages des gros films hollywoodiens, les plus rentables, se raréfient à Paris. Sur les quinze films étrangers, les six américains ont fortement diminué leurs journées de tournage (deux jours en moyenne), hormis La Panthère rose 2 d’Harald Zwart (six jours). Cela s’explique par la concurrence des pays d’Europe de l’Est, dont les conditions financières sont attractives et par l’absence d’incitation financière en France, les studios américains préférant tourner en Allemagne ou en Grande-Bretagne. Toutefois, le nombre de tournages de films s’est accru (108 contre 97 en 2006), avec des longs métrages signés Philippe Garrel, Christophe Honoré, Etienne Chatiliez ou Jean-François Richet.

(Nicole Vulser, Le Monde, 10 janvier 2008)