The Bigger, the Better ?

Par François Reumont pour l’AFC

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Sur le stand Panavision à Camerimage trône fièrement une caméra film 65 mm telle que Quentin Tarrantino l’a utilisée sur son dernier opus... Une anachronie dans un monde où le numérique emporte peu à peu tout sur son passage... Toujours en attente de sa nouvelle caméra numérique grand format, Panavision met cette année en avant sa longue expérience du cinéma, et bien entendu son parc d’optiques devenu légendaire...

Invitant trois chefs opérateurs de trajectoire et d’origine très différentes – Ellen Kuras, ASC, Markus Förderer et Edu Grau – accompagnés de Dan Sasaki (Panavision Hollywood), la firme de Woodland Hills s’est d’abord attachée à démontrer les qualités de sa nouvelle gamme d’optique 70 à partir d’un premier atelier pratique mêlant prise de vues en direct et discussion avec le public.
C’est en basant l’événement sur la nouvelle caméra Red Weapon 6K que les trois opérateurs se sont prêtés au jeu d’un petit tournage. Pour l’occasion, un décor intérieur avec deux comédiens dans la profondeur de l’image avait été installé, avec un éclairage nocturne mélangeant lumière froide par une découverte et des sources beaucoup plus chaudes pour les visages. Également présente, une guirlande lumineuse permettant d’étudier la qualité du bokeh de chaque optique.

Passant en revue à la fois les zooms et les focales fixes de la nouvelle série 70, les trois opérateurs ont surtout insisté sur les différences de structure d’images provoquées par le changement de taille du capteur. En effet, cette nouvelle caméra Weapon étant la seule à la vente équipée d’un grand capteur (30,7 x 15,8 mm), on peut s’en servir facilement pour étudier le rendu d’une optique destinée à couvrir le capteur du format 65 mm (54 x 25 mm sur l’Arri 65).
En réduisant successivement la partie utilisée (5K, Super 35 puis Super 16) les spectateurs ont pu constater les bouleversements dans la perspective de l’image et la structure des arrières plans.

Un atelier qui a permis de conclure l’importance de pouvoir, avec cette nouvelle famille de caméras désormais, non plus choisir seulement sa focale et son ouverture mais aussi la taille du capteur utilisé pour aboutir à des effets et des narrations complètement différentes. Ceci bien sûr à la condition que les optiques couvrent la surface la plus grande pour ensuite pouvoir alterner sur l’échelle des fenêtres d’impression.
Un peu comme quand on passait à l’intérieur d’un même film des séquences tournées en 16 ou en 35. Mais sans changer de caméra, donc sans la profonde modification de la matière d’image qu’entraînait alors le grain de la pellicule. Et surtout sans les énormes contraintes de contretypage posées jadis par la chaîne de postproduction argentique...

En deuxième partie de journée, c’est au tour de Dan Sasaki, le grand manitou de l’optique Ciné à Hollywood d’intervenir. La journée de conférence prends alors soudain un tour plus théorique, les caméras et les projecteurs ayant entre-temps disparus de la scène du centre culturel .
Ce dernier s’applique à exposer ses points de vue sur l’utilisation des optiques, en mettant en perspective la prise de vues anamorphique et la prise de vues sphérique grand format.
Alternant des extraits de films tels que Citizen Kane, Braveheart, Notorious, Star Wars, James Bond ou Inception, il détaille les différents styles et paternes visuelles utilisés régulièrement par les plus grands opérateurs. Dan Sasaki aboutit même un classement en six catégories (parallaxe, ombrage, fausse perspective, voile de brume, occlusion et mouvement relatif) qui donne à son exposé une certaine saveur de sémiologie hollywoodienne assez inattendue, entrecoupé d’explications de haut niveau sur la conception et l’empreinte visuelle de ces objectifs modernes.
Les nombreuses questions des étudiants sont venues montrer l’intérêt du public pour cette présentation.