Tokyo Filmex 2006

par Pascal Lagriffoul

La Lettre AFC n°160

Tout d’abord le film a reçu le grand prix.

Avec joie et émotion j’ai donc reçu ce prix pour Djamshed, au cours d’une cérémonie officielle où j’ai éprouvé, malgré la tension et le trac, beaucoup de fierté d’être là en tant que directeur de la photo français.

J’ai donc passé une semaine à Tokyo, invité par une équipe diligente et sympathique. Une semaine de rencontres, de projections, de débats et de promenades aussi...

Je veux surtout vous faire part du plaisir, de l’excitation que j’ai eu à rencontrer et voir ces cinématographies asiatiques contemporaines. Ce festival est axé principalement sur le cinéma asiatique, asiatique ou " oriental " au sens large, car il y avait dans la sélection 3 films iraniens, 1 film israélien, 1 film japonais, 1 film philippin, 2 films chinois et 1 film tadjik.

Cette sélection est également axée sur la recherche, l’invention et l’originalité. Les films que j’y ai vus, y compris les films projetés hors compétition, m’ont tous énormément intéressé. Cela fut un véritable vent de fraîcheur et de nouveauté pour moi.

A chaque projection, il y avait du monde, y compris pour les films les plus exigeants, un public ouvert, connaisseur et curieux posant de bonnes questions aux " Q and A sessions " organisées après chaque film.

Un film chinois d’un jeune réalisateur Han Jie, Walking on the Wild Side, m’a beaucoup ému et impressionné par sa force et son énergie. J’espère que nous pourrons le voir en France (ce film a un coproducteur français : Les Petites Lumières). Des financements français via le Fonds Sud ou le CNC sont crédités sur beaucoup de génériques... Je vous confirme, pour en avoir parlé avec beaucoup d’entre eux, que notre système représente pour ces cinéastes un modèle et un espoir !

Un autre film chinois, The Other Half, d’un tout aussi jeune réalisateur Ying Liang m’a impressionné par sa liberté et son invention formelles, par l’intransigeance de sa vision de la société chinoise d’aujourd’hui. Ce film a reçu le prix spécial du jury.

J’ai énormément apprécié de rencontrer ces réalisateurs et de voir à quel point la vision de leur pays et de leur art était exigeante.

J’ai également apprécié un film japonais The Happiness de Masahiro Kobayashi, pour son " culot " narratif et formel. Son précédent film, Bashing, avait été en compétition à Cannes 2005.

Hors compétition, j’ai eu le plaisir de voir le dernier film de Apichatpong Weerasethakul, (réalisateur de l’excellent film Tropical Malady) Syndromes and a Century dont la rigueur, l’intelligence, la précision cinématographique et l’originalité m’ont impressionné.

Enfin, en clôture du festival le dernier film de Tsai Ming-liang, Don’t Want to Sleep Alone. Ce réalisateur va au bout de son engagement artistique, son travail m’évoque un geste pur d’artiste abandonnant tout superflu pour s’aventurer dans des territoires encore inconnus du cinéma. Cela me fait penser à l’évolution de la peinture depuis le réalisme vers l’abstraction, c’est intéressant de voir cette évolution se dessiner dans le cinéma.

Cela résume bien le sentiment que m’a donné globalement ce festival, il y a un appétit de nouveauté et d’invention loin des cadres d’un cinéma trop soumis aux exigences commerciales. J’ai donc été enthousiasmé et irrigué de toute cette fraîcheur et je reviens avec l’envie de vous la faire partager. »

Pour info le site du festival : https://filmex.jp