Un nouveau membre actif à l’AFC : Diane Baratier

par Jean-Jacques Bouhon

par Jean-Jacques Bouhon La Lettre AFC n°135

Un dimanche à midi.
Une petite maison à Bagnolet avec au milieu, entre les deux corps de bâtiment, un petit jardin envahi de toutes sortes de plantes. Manifestement la propriétaire a la main verte.
Diane profite de son week-end pour refaire sa cuisine. La semaine, elle termine le tournage du dernier film de Philippe Collin Aux abois.
J’ai connu Diane il y a longtemps. Elle était, à l’époque (c’est pratique comme expression, cela permet de suggérer le passé sans mettre de date...), une adolescente ; moi j’étais un " jeune chef op " et sa sœur Marie-Ange montait les courts métrages d’un jeune réalisateur, Olivier Esmein, dont je faisais la photo.
Elles sont toutes les deux les filles du réalisateur Jacques Baratier.
Depuis elle a fait du chemin et j’ai particulièrement apprécié sa faculté d’adaptation aux différents types de projets sur lesquels elle travaillait : documentaires comme Le Mystère Paul d’Abraham Segal (cophotographié par Jacques Pamart), fictions comme les films d’Eric Rohmer ou le magnifique Satin rouge de Raja Amari.

Diane a peu de temps à m’accorder ; elle doit partir l’après-midi en province pour les derniers jours de tournage. Entre deux étapes de bricolage, en buvant un jus de fruit exotique, je l’interroge sur son parcours professionnel.
Voici quelques bribes de ses réponses. J’espère ne pas trop la trahir...

« Je voulais réaliser. Mon père m’a conseillé, pour apprendre le métier, de commencer à travailler comme assistante à la caméra plutôt qu’à la réalisation.
Après mon bac, j’ai fait un stage, puis j’ai travaillé un peu comme photographe. Cela a exercé mon œil.

Les circonstances de la vie ont fait que je me suis retrouvée femme au foyer au Brésil. C’est là que j’ai décidé de devenir chef opérateur. A mon retour en France, j’ai suivi les cours du soir de Louis Lumière.
J’ai eu la chance d’être l’assistante de Raoul Coutard sur un film de Jean-Pierre Mocky et sur les deux premiers films de Guillaume Nicloux, ainsi que sur quelques films publicitaires. Il m’a appris à être au service du film.
Ensuite j’ai pas mal travaillé sur des " news ", des magazines, des documentaires...

Eric Rohmer m’a beaucoup apporté également.
Je l’ai rencontré après lui avoir envoyé mon CV, suite à une annonce dans laquelle il disait vouloir rencontrer un opérateur débutant.
Il m’a parlé du travail de Nicolas Hayer sur Le Signe du lion, soulignant qu’il était, à son, avis un précurseur de la nouvelle vague par l’emploi de la lumière réfléchie. Ce travail Rohmer l’a poursuivi ensuite avec Nestor Almendros.
Ne pas remarquer la lumière pour qu’on reste dans l’histoire. C’est une attitude que j’ai gardée depuis.

Je pense que je perçois bien ce que raconte une image et l’importance des rapports avec les comédiens. Je ne suis pas " fan " de performances techniques. Bien sûr, pour moi, la lumière a un rapport avec l’émotion. Mais j’aime qu’elle soit discrète, peu présente, à part, bien sûr, les moments où il est nécessaire qu’elle intervienne dans la dramaturgie.
Sur Satin rouge, j’avais choisi de faire une image " sale " pour toutes les scènes dans l’appartement de la protagoniste dans l’idée de souligner son ennui, la vacuité de son quotidien, réservant une photo plus flatteuse pour les séquences de danse dans lesquelles elle s’épanouit enfin. Comme nous avons commencé le tournage par les scènes de l’appartement, j’ai été à deux doigts de me faire renvoyer par les producteurs ; il faut dire que je ne les avais pas prévenus de mon choix. Heureusement, Raja me soutenait. Maintenant, je fais plus attention à mes rapports avec la production.

Je n’imagine jamais un film avant d’avoir entendu le réalisateur m’en parler.
Je trouve qu’il y a deux " écoles " d’opérateurs : celle de ceux qui s’adaptent et celle de ceux qui s’imposent. Je suis de la première, bien sûr. »

Bienvenue à l’AFC, Diane. Tu viens renforcer la part féminine malheureusement trop faible de l’AFC. Nul doute que ta présence, ton enthousiasme et ton énergie nous seront bénéfiques !