L’éditorial de novembre

Avenant

Par Matthieu Poirot-Delpech, AFC
Après d’âpres négociations, l’Avenant de révision de la convention collective de la production cinématographique a finalement été signé le 8 octobre 2013. Si certains pensaient encore que le terme d’avenant était synonyme de sympathique, de bienveillant ou d’aimable lorsqu’il est un adjectif, ils viennent de comprendre qu’il n’en est rien lorsqu’il devient un nom : c’est alors un « acte par lequel on modifie les termes d’un contrat »... Voici donc une tentative de vulgarisation d’un avenant avenant (sic).

Outre qu’il rappelle que la convention collective n’impose pas la constitution d’une équipe minimale de salariés, pas davantage que celle d’une équipe type (sous réserve d’une rémunération de chaque salarié correspondant au niveau de fonction effectivement exercée) et qu’il plafonne le cumul des majorations à 100 % du salaire horaire de base, cet avenant définit deux seuils en deçà desquels il deviendra possible, sous certaines conditions, de déroger à l’application stricte de la convention collective :
- Un premier seuil concernant les films " difficiles et à petit budget " de moins de 1M€ sera l’objet de nouvelles négociations entre les partenaires sociaux qui se sont engagés à trouver un accord dans les six mois.
- L’autre seuil concerne les films de fiction de moins de 3 M€ (hors frais généraux, salaires producteurs et imprévus soit en réalité 3,6 M€ environ) et les films documentaires de moins de 0,6 M€. Les budgets de ces films devront en outre répondre à certaines conditions contraignantes :

  • La masse salariale effective brute des personnels techniques devra être au moins égale à 18 % du budget prévisionnel du film.
  • La masse salariale effective brute des personnels techniques (hors rémunération du technicien-réalisateur) devra représenter au moins 80 % d’un poste regroupant les rémunérations brutes des auteurs, producteurs et titulaires des rôles principaux, ainsi que les commissions d’agents telles qu’elles sont prévues dans le budget prévisionnel.
  • Un seuil de 20 % du nombre des films agréés bénéficiant de ces aménagements ne pourra être dépassé (seuil calculé sur une moyenne des films agréés produits les cinq années précédentes soit un peu plus de cinquante films).
  • Les salaires minimums hebdomadaires inférieurs à 750 € bruts de la grille des salaires seront exclus de la dérogation.
  • 50% de toutes les recettes nettes – France et étranger – des producteurs délégués issues de l’exploitation du film (hors fond de soutien généré par celle-ci) seront déléguées au salaire différé des techniciens dans la limite de deux fois la différence entre le montant hebdomadaire du salaire prévu par la grille des salaires et le salaire consenti par le salarié dans le cadre de cette dérogation.

Ce système dérogatoire ne pourra s’appliquer que lorsque la commission chargée de vérifier les dossiers de demande fonctionnera.
Voulues par certains et combattues par d’autres, ces dispositions ont pour but de « promouvoir la création artistique et de développer l’emploi ». Certains y verront une brèche dangereuse dans une convention collective sensée protéger les salariés, risquant ainsi de favoriser l’essor d’un cinéma de " prime-time low-cost ", d’autres y placeront l’espoir de la survie d’une " diversité " dans notre cinéma national...
Les partenaires sociaux ont convenu de se réunir à nouveau dans cinq ans pour examiner l’opportunité de modifier ou de proroger cette dérogation. D’ici là, il nous faudra être conciliants, et vigilants.

  • Lire l’article en bas duquel se trouve un fac-similé de l’avenant de révision de la convention collective de la production cinématographique.