Bienvenue dans le monde coloré de Vittorio Storaro !

Par Caroline Champetier, AFC

par Caroline Champetier

[ English ] [ français ]

Caroline Champetier, AFC, a assisté, jeudi 16 novembre, à la conférence donnée à l’Opera Nova par Vittorio Storaro, AIC, ASC. Le directeur de la photographie y traitait de la physiologie de la couleur avec, pour fil conducteur, Wonder Wheel, le film de Woody Allen ; elle résume ici quelques-uns des moments-clés de ses propos.

Storaro commence : « Ceci n’est pas une conférence mais un voyage proposé par Woody Allen ; pour moi, ce voyage a commencé il y a deux ans quand j’ai reçu l’appel des assistants de Woody Allen, je me suis d’abord assuré que Darius Kondji, qui collabore depuis quelques temps avec Allen, était au courant, puis je suis allé rencontré Woody Allen. »
« Jusqu’à présent, lui et moi, nous ne nous sommes exprimés qu’avec la pellicule, de façon subtile pour Woody Allen, et peut être que la révolution technologique peut nous permettre autre chose. Nous nous sommes accoutumés à l’idée qu’il y a une sorte de mystère autour de la production d’image, le mystère est levé, c’est moins romantique mais tout aussi émotionnel. C’était donc la première fois que je pouvais me pencher sur ce que le numérique peut nous apporter… »
A ce moment-là, est-ce mis en scène ou pas, la lumière baisse.

« J’ai toujours été passionné, attiré, ému par la couleur. » Puis il cite Platon : « Je vois dans la couleur l’effort de la matière à rejoindre la lumière… »
« Mon instinct me porte vers le langage de la couleur, l’art naïf a été mon premier chemin, dans cette approche. Déjà, dans Le Conformiste, je me suis attaqué à un segment où je pouvais expérimenter cela. Par la suite, j’ai arrêté de travailler un an pour m’immerger dans une réflexion sur la couleur. »

« Donc Woody arrive et accepte ma proposition, je lui assure un moniteur parfaitement calibré sur le plateau pour pouvoir réagir et qu’il me dise ce qui pouvait le déranger dans l’image. Quand j’arrive à NYC et commençons les repérages avec Woody Allen et Santo Loquasto, le décorateur, je découvre Coney Island, c’est un choc ! La féerie d’un parc d’attraction qui est un monde en lui-même, tout y est propositions visuelles et chromatiques. Les personnages vivent avec ce monde derrière leurs fenêtres et à l’intérieur avec leurs conflits familiaux. Les acteurs, Kate Winslet, Justin Timberlake, Juno Temple et Jim Belushi, nous autorisent par leur talent à créer un style visuel particulier où chacun d’eux est identifié à une couleur. »

« Je me suis inspiré des différents peintres de cette période, en particulier Reginald Marsh qui a magnifiquement représenté la féérie de Coney Island. Cela a encore renforcé mon intuition d’opposer les couleurs comme le sont les personnages. Les êtres ne perçoivent pas la lumière qu’avec leurs yeux mais avec leur corps tout entier. Ils sont comme une plaque photographique, la couleur modifie leur métabolisme et leur pression sanguine et provoque leur émotion…
Personne ne devrait avoir peur de la couleur, en créant l’harmonie ou le conflit entre les trois couleurs primaires et leurs complémentaires, nous pouvons entraîner l’émotion du public comme les mots en littérature ou les notes en musique. »

Bienvenue dans le monde coloré de Vittorio Storaro !

Vittorio Storaro et une festivalière - Photo Alex Lamarque
Vittorio Storaro et une festivalière
Photo Alex Lamarque