Bilan 2022 du CNC présenté au 76e Festival de Cannes

Comme il le fait habituellement pendant le Festival de Cannes, le CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée) a présenté le bilan de l’année écoulée (2022). Ce bilan donne une vision complète des secteurs aidés par le CNC : cinéma, audiovisuel, vidéo (physique et dématérialisée), jeu vidéo, industries techniques, exportation. Il analyse également l’action publique par le prisme des financements publics, de la parité et de l’emploi, et de la transition écologique dans les secteurs. Nous publions ici ce qui concerne les industries techniques.

Contour des industries techniques
Les industries techniques assurent les prestations indispensables dans le processus de création, de production et de diffusion des œuvres cinématographiques et audiovisuelles. Elles fournissent notamment les équipements et installations (fixes et mobiles) pour les tournages, assurent la modification des images et des sons imposée par le récit (postproduction et effets visuels) et la reproduction des œuvres originales pour leur diffusion (traitement dans les laboratoires, duplication, copies numériques – DCP, copies argentiques). Elles intègrent les éditeurs de logiciel ainsi que les prestations liées à l’animation. Enfin, elles fournissent le matériel permettant la projection dans les salles, la diffusion à la télévision ou sur internet, les outils nécessaires à la conservation pérenne des œuvres (numérisation, archivage, stockage) ou la restauration des œuvres de patrimoine.
Les industries techniques intègrent ainsi :
- les prestataires de tournage, qui regroupent les loueurs de matériels (caméras, objectifs, grues, éclairage, consoles son, perches, etc.), les régies mobiles (studios mobiles équipés notamment pour la retransmission des événements télévisuels) et les studios de prises de vues (plateaux d’enregistrement) ;
- les postproducteurs image (montage, étalonnage) ;
- les sociétés en charge des effets visuels numériques (certains effets visuels pouvant être intégrés dès la phase de tournage en studio dans le cadre des studios virtuels) ;
- les postproducteurs son, qui effectuent le montage sonore sur les images, à partir de sons enregistrés en tournage ou reproduits en studio (auditorium) ;
- les sociétés en charge des prestations de doublage ou de sous-titrage à la fois pour la diffusion française d’œuvres internationales, pour la diffusion internationale d’œuvres françaises ou pour l’adaptation pour les publics aveugles et malvoyants (audiodescription) ou sourds et malentendants (sous-titrage) ;
- les laboratoires, qui interviennent aux différentes phases de l’élaboration d’une œuvre, du tournage à la finition. Ils regroupent notamment les laboratoires de production (sécurisation des données de tournage ou développement
des rushes), les laboratoires de postproduction et les laboratoires assurant la fourniture de copies numériques dans les différents formats vidéo attendus pour la diffusion et la distribution des œuvres (cinéma, télévision, VàD). La postproduction numérique y est désormais généralisée. Certains laboratoires assurent également une prestation de retour sur film à des fins de conservation pérenne ;
- les entreprises spécialisées dans la restauration des œuvres (suppression ou atténuation des défauts d’une œuvre dégradée par le temps), l’archivage ou le stockage (stockage de films et conservation des données numériques) ;
- les fabricants, ou distributeurs, qui regroupent les constructeurs de matériel (équipement nécessaire aux besoins des différentes étapes de production) et les fabricants de supports consommables ou non (pellicule, disques durs, cartes et supports de mémoire, serveurs) ou de systèmes de stockage et de traitement de l’image, de composants informatiques.

Plus de 800 entreprises d’industries techniques en France
Le segment des industries techniques compte 829 entreprises actives en France sur la dernière décennie. Parmi elles, 426 entreprises ont déclaré une activité en 2021, un
nombre en baisse par rapport à 2020 (443 entreprises). Le secteur est structuré par quelques entreprises locomotives entourées de nombreuses petites entreprises. 20 %
des entreprises réalisent ainsi 70 % du chiffre d’affaires du secteur et les 10 premières entreprises en termes de chiffre d’affaires emploient près de 50 % des salariés du secteur. En un an, la concentration du secteur s’est renforcée : les 10 premières entreprises en termes de chiffre d’affaires emploient près de la moitié des permanents déclarés sur l’année (47 %, contre 44 % en 2020), et près des deux tiers des intermittents déclarés (67 %, contre 57 % en 2020).

Des entreprises de taille supérieure à la moyenne nationale
Selon les résultats de l’étude réalisée par la Ficam, 49,1 % des entreprises emploient entre un et neuf salariés permanents en 2021 (46,2 % en 2020) et 39,6 % des entreprises comptent entre 10 et 49 permanents (42,5 % en 2020).
Toutefois, leur taille moyenne est supérieure à celle de l’ensemble des entreprises nationales. En effet, les statistiques relatives à l’ensemble du secteur de l’industrie, du commerce et des services en France indiquent que 86,5 % des sociétés ayant des salariés emploient entre un et neuf salariés (source INSEE au 1er janvier 2015, hors entreprises agricoles et financières).

69,5 % des effectifs des industries techniques sont des hommes
En 2021, 23 211 individus sont salariés par les entreprises du secteur des industries techniques, un niveau en hausse sur un an (+4,7 % par rapport à 2020) mais qui
demeure inférieur à celui constaté en début de décennie (-9,5 % par rapport à 2012). Cette baisse est étroitement liée à l’épidémie de Covid-19, dont les conséquences en
2020 se faisaient principalement ressentir sur les emplois intermittents (14 682 salariés intermittents en 2020 soit une baisse de 10,9 % par rapport à 2019). En 2021, le nombre de salariés intermittents repart à la hausse (15 449 intermittents, soit +5,2 % par rapport à 2020), mais demeure inférieur à la moyenne annuelle prépandémique (17 501 salariés intermittents en moyenne entre 2017 et 2019). 7 762 salariés occupent des emplois permanents (CDI et CDD) en 2021, en hausse de 3,6 % sur un an. Pour ce type d’emplois, le nombre de salariés constaté en 2021 est
le plus haut de la décennie, derrière 2017 (7 951 salariés permanents).
Le secteur des industries techniques est un secteur très masculin. Près de sept salariés intermittents sur dix sont des hommes en 2021, une part qui se vérifie sur les emplois intermittents (69,1 %) comme sur les emplois permanents (69,8 %). Une lente féminisation des métiers intermittents est toutefois perceptible sur la décennie, de 28,2 % de femmes parmi les salariés sur ce type d’emplois en 2012 à 30,2 % en 2021.

1 165 M€ de chiffre d’affaires
Pour évaluer le chiffre d’affaires global des industries techniques, seules les entreprises réalisant plus de 50 % de leur chiffre d’affaires dans le domaine de la prestation technique sont retenues ici (426 entreprises actives en 2021). Le chiffre d’affaires de la filière des industries techniques est évalué à 1 165 M€ en 2021, en hausse de 28,5 % par rapport à 2020.
Parmi les 106 entreprises constitutives de l’échantillon d’étude, celles qui réalisent plus de 10 M€ de chiffre d’affaires en 2021 captent 65,1 % du chiffre d’affaires total des industries techniques, contre 50,1 % en 2020 et 59,2 % en 2019.
En 2021, le chiffre d’affaires moyen des entreprises interrogées par la Ficam est de 6,3 M€, un montant en hausse sur un an (4,5 M€ en moyenne en 2020). Le chiffre d’affaires moyen observé en 2021 se situe dans la fourchette haute des dix dernières années, mais demeure inférieur aux niveaux enregistrés au début des années 2000 (jusqu’à 7,4 M€ en moyenne en 2006). Cette baisse progressive peut s’expliquer par un double phénomène de restructurations / regroupements de filiales au sein des
groupes et d’atomisation avec le développement de plus petites structures. Par ailleurs, la concurrence reste particulièrement forte sur certains marchés, principalement sur celui de la postproduction image et son. A cela, s’ajoute en 2020 une crise sanitaire sans précédent entraînant un arrêt puis un ralentissement des activités lors du premier confinement (17 mars-11 mai 2020). La reprise rapide des
activités ainsi que le report d’un certain nombre de prestations sur l’année 2021 ont généré des taux de croissance de chiffre d’affaires inédits entre 2020 et 2021, permettant au secteur de retrouver un niveau proche de celui de l’avant-crise sanitaire.

13,2 % des entreprises réalisent un chiffre d’affaires de plus de 10 M€
Plus de 85 % des entreprises relevant des industries techniques réalisent un chiffre d’affaires inférieur à 10 M€. Cette catégorie est majoritairement composée de sociétés dont le chiffre d’affaires est compris entre 1 et 5 M€ (39,6 % du panel). De nombreux postproducteurs image et son figurent dans cette tranche.
14 entreprises ont réalisé plus de 10 M€ de chiffre d’affaires en 2021, soit 5 de plus qu’en 2020. Cependant, seules cinq entreprises réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 20 M€, un nombre en baisse sur la décennie (7 en 2012).

Les métiers du tournage et de la postproduction, principales sources de revenus
Afin d’évaluer la contribution de chacun des sous-secteurs des industries techniques dans les recettes totales de la filière, le chiffre d’affaires de chaque entreprise est réparti entre les différents métiers qu’elle exerce.
Le chiffre d’affaires des métiers du tournage augmente de 66,4 % entre 2020 et 2021 pour atteindre son plus haut niveau depuis 2016. Cette hausse est liée d’une part à un effet de rattrapage : le confinement imposé en mars 2020 lors de la crise sanitaire avait mis à l’arrêt les tournages en cours et repoussé les projets prévus sur cette période. Les tournages ont pu reprendre dès juin 2020 et tout au long de l’année 2021. Par ailleurs, la majoration du crédit d’impôt international en juin 2020 avec un taux porté à 40 % pour l’ensemble des dépenses (y compris de tournage) pour les
films à forts effets visuels a eu un impact fort sur le chiffre d’affaires des prestataires de tournage. Le tournage en vidéo mobile (+59 %) atteint son plus haut niveau historique, grâce notamment au rattrapage de deux grandes compétitions sportives en 2021, initialement prévues en 2020 : le championnat européen de football et les Jeux Olympiques de Tokyo. Les métiers du tournage contribuent au chiffre d’affaires total des prestataires à hauteur de 46,8 % en 2021 contre 39,3 % en 2020 et 43,7 % entre 2017 et 2019. En 2021, les studios représentent 20,5 % du chiffre d’affaires généré par les activités de tournage.
La postproduction image génère 19,9 % du chiffre d’affaires total des industries techniques en 2021, contre 20,4 % en 2020 et 19 4% en 2019. Le secteur enregistre pour la quatrième fois de la décennie un chiffre d’affaires supérieur à 130 M€ (135 M€).
Le chiffre d’affaires correspondant aux travaux de laboratoire (y compris laboratoire, doublage, sous-titrage, diffusion, duplication) atteint 184,5 M€ en 2021, en hausse
de 11,8 % par rapport à 2020 et au plus haut niveau depuis 2014 (195,9 M€). La part des travaux de laboratoire dans le chiffre d’affaires total des industries techniques atteint 27,2 % en 2021 (34,1 % en 2020), un niveau proche de celui constaté sur l’ensemble de la décennie (28,3 % entre 2012 et 2021).
Les activités de postproduction son génèrent 22,3 M€ en 2021, un montant en hausse sur un an (+26,7 %) mais qui demeure faible au regard du reste de la décennie (29 M€ en moyenne chaque année entre 2012 et 2021).
Le secteur de l’archivage, du stockage et de la restauration occupe une place modeste dans le chiffre d’affaires global de la prestation technique, son poids passant de 3,0 % en 2017 à 1,7 % en 2021. Le chiffre d’affaires du secteur augmente de 31,5 % par rapport à 2020, à 12,1 M€, mais demeure inférieur à la moyenne constatée sur la décennie (16,6 M€ en moyenne chaque année entre 2012 et 2021).

L’audiovisuel demeure le premier client des prestataires techniques
Les prestataires techniques interviennent principalement sur six marchés : le long métrage cinématographique, le programme audiovisuel (télévision et plateformes) de
stock, le programme audiovisuel de flux, le programme d’animation et les effets visuels, le multimédia et le film publicitaire ou institutionnel. La plupart des entreprises du secteur proposent des prestations sur plusieurs de ces marchés et il est de plus en plus rare qu’une entreprise relève exclusivement d’un seul marché.
Les marchés du cinéma et de l’audiovisuel (programmes de stock et de flux) représentent à eux seuls 75,5 % du chiffre d’affaires global des industries techniques en 2021. Le marché de l’audiovisuel (stock et flux) génère 58,7 % des ressources, avec un chiffre d’affaires en hausse de 48,0 % en 2021. Depuis 2005, l’audiovisuel constitue la première source de revenus. En 2021, sur un chiffre d’affaires de 397,2 M€ généré par l’audiovisuel, les activités sur les programmes de flux (directs, émissions de variétés, sport) représentent 222,0 M€, soit 55,8 % du chiffre d’affaires
généré par l’audiovisuel, retrouvant son niveau de 2019. Les activités de production de programmes de stock (fictions, documentaires) sont évaluées à 175,2 M€, soit 44,1 % du chiffre d’affaires généré par l’audiovisuel.
Le chiffre d’affaires en provenance de la filière cinéma augmente de 14,5 % en 2021 et retrouve son niveau de 2019 mais reste, malgré tout, loin du niveau observé entre 2013 et 2017, témoignant d’une érosion des investissements techniques dans la production cinématographique (de 27 % du chiffre d’affaires total des prestataires techniques en 2012 à 17 % en 2021, son plus bas niveau avec 2018).
Le troisième marché des industries techniques est celui de la publicité (11,9 % en 2021), pour un chiffre d’affaires en hausse de 19,4 % mais qui demeure faible au regard de la décennie (80,6 M€, soit le niveau le plus bas après 2020). Le chiffre d’affaires de l’animation, quatrième marché, poursuit sa croissance pour la troisième année consécutive. Il fait plus que doubler pour atteindre 56,0 M€ (deuxième plus haut niveau de la décennie après 2017) grâce à la continuité de l’activité pendant la crise sanitaire ainsi que l’augmentation des commandes pour les services de VàD / VàDA.

Près de 40 % de croissance dans le secteur des effets visuels
Pour les entreprises du secteur des effets visuels et des effets numériques plus spécifiquement, le cinéma et l’audiovisuel de stock représentent les trois quarts (75,6 %) de leur chiffre d’affaires en 2021 selon France VFX, une part qui s’est fortement accrue en trois ans (60,4 % du chiffre d’affaires en 2019 et 57,8 % en 2020, année perturbée par la pandémie de Covid-19). Cette évolution est fortement portée par l’augmentation du chiffre d’affaires généré par les longs métrages et unitaires audiovisuels étrangers (dont ceux destinés aux plateformes de VàDA), qui génèrent 7,92 M€ en 2022 soit quatre fois plus qu’en 2019 (1,97 M€). Les revenus des entreprises de VFX générés par les séries françaises sont également en forte croissance et atteignent 10,0 M€ en 2022 (multiplié par 3 par rapport à 2019). Au global, le secteur des effets visuels et des effets numériques enregistre une croissance de 37,7 % de son chiffre d’affaires en 2021 et atteint près de 50 M€.

Une chaîne de fabrication entièrement numérique
La numérisation de la chaîne de fabrication, du tournage à la postproduction, est achevée. Près de 95 % des tournages cinéma se font désormais en numérique et la postproduction argentique est devenue marginale depuis 2011. En télévision, la HD et les caméras numériques grand capteur représentent la totalité des semaines de tournage.
En 2021, 13,0 % des tournages de fictions cinématographiques et 2,9 % des tournages de fictions audiovisuelles sont réalisés en 4K et au-delà. En parallèle de la multiplication par 20 de la résolution des images en dix ans (de la SD à la 4K), les matériels et chaînes de production permettant de filmer et postproduire avec une cadence d’image plus élevée (HFR) ou un rapport de contraste plus étendu (HDR) ont fait leur apparition en 2014 et leur usage s’est depuis développé. Par ailleurs, les industries techniques se diversifient également vers les nouveaux formats immersifs individuels comme la réalité virtuelle.
Les effets visuels en temps réel sur le plateau de tournage (studios virtuels) sont également en train de se développer et modifient en profondeur les méthodes de travail et la chaîne de fabrication.

Hausse des investissements
Les investissements des prestataires techniques (achats de nouveaux équipements uniquement) augmentent de 21 % entre 2020 et 2021. Chaque entreprise investit, en moyenne, 586,7 K€ en 2021, le plus haut niveau de la décennie, contre 485,1 K€ en 2020.
Les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 20 M€ sont depuis 2011 celles qui investissent le plus. Les sociétés avec un chiffre d’affaires de 10 M€ ou plus concentrent 54 % de l’ensemble des investissements en 2021 (67 % en 2020). Cette polarisation s’explique notamment par la nécessité pour les plus grosses sociétés qui se positionnent sur des projets étrangers audiovisuels et cinématographiques ambitieux, de continuellement s’adapter aux nouvelles technologies.

Record du chiffre d’affaires à l’exportation
Pour les industries techniques, l’exportation résulte essentiellement d’un double phénomène : elle comprend non seulement les prestations réalisées sur les marchés internationaux mais également les prestations sur le territoire français pour des œuvres étrangères et dont la facturation est effectuée dans un autre pays. En 2021, le
chiffre d’affaires lié à l’exportation remonte à 130,6 M€ en 2021 (+34 % par rapport à 2020) pour atteindre son plus haut niveau historique. Sa part dans le chiffre d’affaires
total des entreprises du panel s’élève à 19,3 %, un niveau en léger retrait par rapport à 2020 (20,2 %) mais supérieur à celui constaté avant-crise (16,3 % du chiffre d’affaires enregistré entre 2017 et 2019).
L’audiovisuel est toujours largement leader dans le chiffre d’affaires des exportations puisque sa part de marché est de 67 % en 2021, contre 60 % en 2020 (62 % en 2019 et 51 % en 2012). La montée en puissance des plateformes internationales (Netflix, Prime Video, Disney+, Paramount+, etc.), renforce encore le poids des programmes télévisuels de stock à l’export. Le cinéma est loin derrière et représente 10 % du total.
L’activité doublage / sous-titrage capte plus de la moitié des revenus générés par l’export (54,6 %). Son chiffre d’affaires export est en hausse de 27,7 % pour atteindre
son plus haut niveau historique.
La part d’export de l’activité tournage (studio, loueur et vidéo mobile) s’établit à 22,6 % en 2021, contre 15,6 % en 2020 et 23,0 % en 2019.

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(Source CNC)