Cinéma : une condamnation pour contrefaçon de broderie

par Anne Salomon

AFC newsletter n°164

Mais un mois après la sortie du film, la brodeuse, qui n’avait pas été invitée à la première, attaque les producteurs et le distributeur pour avoir utilisé ses tissus sans lui verser de droits d’auteur. Les producteurs ont expliqué que son contrat de travail était celui de costumière brodeuse pour lequel elle avait été rémunérée. Ils ont plaidé que la réalisatrice ayant donné des indications sur les broderies, la brodeuse n’était pas créatrice des tissus mais exécutante.
Mais la cour d’appel a constaté que le contrat préparé par la production n’avait pas été signé par la brodeuse. La rémunération versée n’était donc que la contrepartie de son travail et non celle d’une cession de droits d’auteur. Les magistrats ont noté qu’aucun dessin précis n’avait été fourni par la réalisatrice et que la couturière avait donc bel et bien créé les tissus. Ils ont précisé que les broderies n’étaient pas traitées comme un accessoire puisqu’elles avaient fait l’objet de plans rapprochés.
Très lourdes sanctions
Ils ont enfin souligné que si le nom de la professionnelle apparaissait dans le générique du film, celui-ci était absent des documents publicitaires diffusés dans la presse et sur Internet. Résultat, les producteurs et le diffuseur ont été condamnés à verser à la brodeuse 30 000 euros de dommages et intérêts. Ils ont interdiction de poursuivre l’exploitation du film dans sa forme actuelle sous peine d’une astreinte de 1 000 euros par infraction constatée, ce qui suppose le retrait de la vente des DVD en circulation et l’interdiction de la diffusion du film en France et à l’étranger. Me Roland Rappaport, l’avocat des producteurs, estime qu’il s’agit d’un « abus de confiance » et que ses clients songent à faire appel. Pour Me François Corone, l’avocat de la brodeuse, une décision aussi lourde est très rare dans ce domaine.

(Anne Salomon, Le Figaro, 07 avril 2007)