Conrad Hall

par Willy Kurant

par Willy Kurant La Lettre AFC n°118

Conrad Hall était un de mes "proches-éloignés" depuis 1976 avec Haskell Wexler... Il devait me parrainer à l’ASC... sans grand succès à cette époque révolue de l’histoire de l’ASC... Il m’a fallu attendre quelques années.
Ses ex-assistants, cadreurs, et tous les directeurs photo étaient d’une dévotion extraordinaire à son égard, se rencontraient, revoyaient Conrad et se rappelaient ses enseignements pratiques de cadrage, composition, etc. Je faisais partie du club sans avoir été son assistant. Charles Rosher Junior, Bobby Birne, Bill Fraker et Jordan Cronenweth (décédé) étaient les piliers de ce club informel.
Sa conception de la lumière et de la mise en place était la simplicité même. Il ne rejetait pas totalement la technique, il la connaissait de toute façon.

J’avais découvert la maladie que Conrad cachait depuis des années lors d’un dîner chez moi avec Tom Stern (qui est devenu son gaffer). Il m’a révélé qu’il portait à la ceinture une poche qui lui servait d’estomac. La jeune et jolie personne qui l’accompagnait alors était une infirmière qui l’avait soigné à Cedars Sinaï. Mais il était d’une bonne humeur et d’une générosité extraordinaires.

Ces dernières années, il se plaignait du rythme infernal des tournages US (14 ou 18 h par jour). Il venait de générer une petite campagne contre les abus concernant les horaires.
Conrad, Haskell et quelques autres avaient essayé de fonder une "Guild" uniquement pour les directeurs photo, pensant que nous n’avions rien à faire, noyés au milieu des milliers d’assistants ou opérateurs cinéma et télévision. Il y a eu une bataille entre l’Union et l’ASC dont le président d’alors, Stanley Cortez, représentait les "barons" de la prise de vues. La "Guild", hélas, n’a jamais vu le jour... Ils (Conrad, Haskell) voulaient s’attaquer déjà aux droits d’auteur.

J’ai vu Conrad en septembre, deux jours avant la sortie des "Sentiers de la perdition"...
Il était hilare au Club-House de l’ASC car il avait découvert que les lèvres de Tom Hanks étaient devenues violettes lors du tirage des copies sur Vision Premier... « Cela risque de devenir la mode » disait-il.
Toujours à l’avant-garde visuelle, plus jeune qu’un jeune loup de 20 ans, il avait par exemple éclairé "Jennifer 8" pratiquement avec des lampes de poche, mais rappelons-nous "Fat City", "Willie Boy", "The Professionals", "Butch Cassidy and the Sundance Kid" et "Road to Perdition".
Il manquera à la communauté informelle des chefs opérateurs.