Décès du directeur de la photographie Franco Di Giacomo, AIC
En 1990, encore assistante, j’avais été contactée pour travailler avec Franco sur le film franco-russo-italien L’assedio di Venezia, dont le tournage se déroulait à Moscou. J’avais très envie d’aller en URSS, mais surtout de côtoyer ce Monsieur Di Giacomo qui était déjà un grand acteur de l’histoire du cinéma.
Pensant que parler italien était un atout, je pris la peine d’apprendre quelques mots et termes techniques avant de l’appeler aux Etats-Unis où il tournait. Mon italien bredouillant a dû lui plaire et l’amuser, et je me retrouvais à Moscou sur ce tournage.
J’étais très impressionnée par son travail. Comment, parfois avec peu de moyens, quelques mandarines et polys, il arrivait à créer une ambiance juste et belle. Comment il rendait crédible cette Venise du XVIIIe siècle (décor créé par Mario Garbuglia) dans les studios de la Mosfilm !
Franco ne s’impliquait pas seulement dans la photographie, il était concerné par le film, dans sa globalité. Quand un problème survenait, il tentait de le résoudre. Il ne s’énervait jamais, ne haussait jamais le ton. Quand une comédienne, terriblement angoissée, n’arrivait pas à sortir de sa caravane pour tourner son premier plan, il allait lui parler, la rassurer, et revenait sur le plateau avec elle à son bras.
Quand les pompiers moscovites étaient en difficulté pour un effet de pluie, il relevait ses manches et s’emparait de la lance à incendie.
Ce qui faisait de Franco une personne rare, c’est que bien qu’étant un maestro de la lumière, il était extrêmement humble et donnait, en toute sincérité, une importance à chacun de nous, quelque soit sa fonction.
Il aimait l’équipe et l’équipe l’aimait.
Comme tout Italien qui se respecte, il était aussi fin cuisinier et avait du plaisir à préparer un merveilleux plat de pâtes pour l’équipe les jours de repos.
Plein d’humour, il disait de lui : « Sono il Sean Connery dei poveri ! », "je suis le Sean Connery des pauvres", car il lui ressemblait.
Sa lumière était le reflet du regard qu’il posait sur les autres.
Le plus bel hommage serait de faire en son honneur un bon repas italien accompagné d’un bon vin français et de rire des merveilleux moments, si nombreux, passés à ses côtés.
Béatrice Mizrahi est directrice de la photographie.