"Dernière ligne droite pour la convention collective"
Par Clarisse FabrePour que François Hollande reçoive un collectif de jeunes cinéastes le 1er août, au cœur de l’été, il fallait vraiment que l’heure soit grave... Du moins, le président de la République est convaincu que la nouvelle grille de salaires de la convention collective de la production cinématographique pose problème pour les films fragiles, assure un proche.
Le 17 juillet, des réalisateurs et des techniciens emblématiques de la nouvelle génération, dont certains avaient des films sélectionnés à Cannes – Antonin Peretjatko (La Fille du 14 juillet), Rebecca Zlotowski (Grand central), etc. – dénonçaient, dans une tribune publiée dans Libération, les conséquences de la convention collective du 19 janvier 2012 : « Cette convention, censée nous protéger, nous enterre vivants », écrivaient-ils. Signé par tous les syndicats, sauf la CFDT, et par l’organisation patronale API, laquelle regroupe Gaumont, Pathé, UGC et MK2, le texte vise à faire respecter le droit du travail lors des tournages de films, ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui.
La profession est divisée comme jamais. Les opposants au texte – les syndicats de producteurs AFPF, APC, SPI, UPF – ont rédigé un texte alternatif, paraphé par la CFDT. Ils ont aussi déposé un recours en référé devant le Conseil d’Etat pour obtenir la suspension du texte – la décision est attendue le 30 août.
En effet, le gouvernement a annoncé l’extension de la convention collective pour le 1er juillet – c’est-à-dire son application à l’ensemble de la profession. Mais, pour tenir compte des inquiétudes exprimées, il a reporté son entrée en vigueur au 1er octobre, en demandant aux partenaires sociaux de se remettre autour de la table. L’objectif est d’affiner le volet dérogatoire consacré aux films peu financés, et autorisant des niveaux de salaires moins élevés, ou des forfaits. Selon le texte, les fictions de moins de 2,5 millions d’euros y seraient éligibles, ce qui est jugé insuffisant.
« Avenant »
Autre point de friction : seuls 20 % des films produits sur un an, soit environ une quarantaine, pourraient bénéficier de la dérogation. « Qu’adviendra-t-il si un film présente toutes les conditions pour bénéficier de la décote, mais arrive une fois que les places ont été attribuées ? », pointe Juliette Prissard, déléguée générale du Syndicat de producteurs indépendants (SPI).
A l’issue de la rencontre des cinéastes avec le chef de l’Etat, le 1er août, à laquelle elle assistait, la ministre de la culture et de la communication, Aurélie Filippetti, a assuré que de « nombreuses améliorations » seraient apportées au texte, sous la forme d’un « avenant ». « La ministre s’avance beaucoup. Pour obtenir un avenant, il faut des signataires », explique Laurent Blois, délégué général du Spiac-CGT, signataire de l’accord, qui se dit toutefois prêt à faire évoluer le texte.
(Clarisse Fabre, Le Monde, 20 août 2013)