Hommage à Pierre-William Glenn, par Françoise et Peter Kirkpatrick

Fondateurs du French Film Festival, Richmond (Virginie)

Contre-Champ AFC n°360


« Ah ! dis donc. C’est bluffant. » C’est ça ce que tu dirais Pierre-William en voyant tout ce monde rassemblé et recueilli ici pour te rendre hommage, ta famille et ta famille d’amis. Tu as touché la vie de chacun d’entre nous.

Nous nous connaissons presque tous ici présents, grâce à toi Pierre-William. En ce qui nous concerne, entre nous tout a commencé il y a plus de trente ans avec la venue de Nathan Miller à notre Festival pour présenter un court métrage. Ensuite, c’est Annie et puis Claude Miller qui sont venus. Claude est devenu le premier président de notre festival du film français de Richmond, en Virginie. Et lorsque Claude nous a quittés, c’est toi Pierre-William qui a accepté tout de suite d’être le président.

Nous nous rappelons si bien, comme si c’était hier, le jour où nous nous sommes rencontrés pour la première fois. C’était à la fin des Rencontres Cinématographiques de L’ARP à Beaune, sur les quais de la gare de Lyon à Paris quand ta sœur, Annie Miller, nous a présentés. C’était le début de plus de vingt ans d’amitié. Il serait plus facile de compter les jours où on ne s’est pas parlé depuis ce jour-là. Quelle belle amitié, autant professionnelle que personnelle !

Nous nous rappelons aussi avec émotion la fois où tu es venu à Richmond pour nous rendre visite, et cette fois-là, ce n’était pas pendant un festival. C’était en automne, un jour comme aujourd’hui. On se promenait tous les trois dans Richmond, dans les rues entre le cimetière Glenn où sont enterrés certains de tes ancêtres, et la statue du joueur de tennis Arthur Ashe. Tu nous as arrêtés. Il y avait une lumière spéciale, celle que tu adorais et appelais l’heure magique. Et puis, tu nous as déclaré : « N’oubliez pas ce que je vais vous dire. La lumière, c’est la vie. Il n’y a pas de vie sans lumière ».

Pierre-William Glenn, entre Peter et Françoise Kirkpatrick, lors de sa Master Class au French Film Festival - Richmond, Virginie, en 2019 - Photo Pierre Courtois
Pierre-William Glenn, entre Peter et Françoise Kirkpatrick, lors de sa Master Class au French Film Festival - Richmond, Virginie, en 2019
Photo Pierre Courtois


Pierre-William, c’est bien ta lumière, ta vie qui nous a tous touchés. La vie de chacun d’entre nous. De ta famille, de tes amis, de tes camarades, et bien entendu, de ta chère Viviane. Oui, c’est toi Pierre-William, ta vie, ta lumière qui nous ont éclairés. Ton savoir-faire, et celui de ton équipe de techniciens de la CST, créaient tous les ans une belle lumière dans la salle de cinéma Byrd à Richmond pour que nous puissions projeter des films français et francophones dans les meilleures conditions possibles. Pour nous, en tant que professeurs, Françoise à l’Université de Richmond, et moi, à Virginia Commonwealth University, c’était toi le véritable professeur. Tu partageais aussi ton savoir-faire avec tes étudiants de La Fémis et aussi avec ceux de nos universités. Nous nous souvenons, par exemple, le jour où pendant un tournage de tes étudiants avec les nôtres à Richmond, alors que nous parlions tous les trois, tu as remarqué du coin de l’œil ce qui se passait sur le plateau, et tu as pris instinctivement une feuille de papier que tu as dirigée sur la scène, et d’un coup, tout a changé, tout s’est éclairé. Ta lumière a instantanément embelli le visage de l’actrice. Et nous, nous regardions les visages des étudiants, ceux de tous les membres de l’équipe, qui eux aussi avaient changé car tout le monde était bouche bée, et tous avaient tout de suite compris la magie. Tous émerveillés par ton geste si juste.

Ta curiosité intellectuelle, ta détermination, ton engagement indélébile, ton talent ont eu un impact direct sur les vies professionnelles, sur les carrières de tant de membres de la profession cinématographique en France et dans le monde, mais aussi sur celles de nos stagiaires français qui sont aussi présents ici pour te rendre hommage.

Franc et honnête. Tu disais ce que tu pensais. Tu avais tellement d’expressions. Tu disais, par exemple : « Pourquoi faire bien quand on peut faire mieux ? » Et ensuite on attendait, on espérait entendre plus tard : « Là, on ne peut pas faire mieux ! »

Pierre-William, ta lumière sera toujours la nôtre.

Drs Françoise et Peter Kirkpatrick
Professeurs émérites
Fondateurs du French Film Festival - Richmond, Virginie

(Texte lu lors des obsèques de Pierre-William Glenn au cimetière de Montreuil)