"Il faut qu’on ait le sentiment qu’il n’y a pas de costumier"

Par Elisabeth Franck-Dumas

AFC newsletter n°272

Next, magazine culturel de Libération, 20 janvier 2017
Rarement primés pour leur travail hors films d’époque, les costumiers de cinéma jouent un rôle silencieux et déterminant dans la conception ou l’évolution d’un personnage. Trois d’entre eux nous parlent de leur travail et de leur approche, souvent intuitive, de ce que doit être un vêtement à l’écran.

Cinéma, de bonnes tenues
Que racontent les vêtements ? Des vies entières, pour peu qu’on sache les regarder. Des vies usées comme des coudes de caban, des vies légères comme une jupe de tulle, des vies débraillées.
Et au cinéma ? Des vies, aussi, pour peu qu’on ne les regarde pas trop. On ne parle pas ici de trucs en plumes, à godets ou à paniers, de costumes de Cléopâtre ou de Pocahontas, mais bien de vêtements : des habits de tous les jours, des habits-habités, comme les nôtres ou les vôtres, qui disent ce qu’ils ont à dire tout bas, sans hurler. Comme cette culotte rose en coton, modèle de fille à taille haute, ambiguë dans sa transparence, qui emplit tout l’écran alors que s’ouvre Lost in Translation.

Elle annonce dans sa matière même ce voile gazeux qui semble recouvrir tout le film, sa langueur, sa complaisance mélancolique à s’éterniser dans l’âge ado. Ou ces robes pailletées portées pour danser sur Diamonds dans Bandes de filles, et encore parées de leur antivol : l’euphorie de la séquence est encore plus belle qu’on la sait arrachée aux circonstances, et vécue à crédit. Un jour, on le pressent, la note sera présentée.
Et ce tee-shirt d’une mythique librairie désormais disparue, à Recife, au Brésil ? Il est porté lors d’une fête qui se déroule dans les années 1970, au début d’Aquarius. Pour le spectateur brésilien, il vient subrepticement rappeler tout ce qui a été rayé de la carte, ces dernières années, pour faire place à la spéculation immobilière.

  • Lire l’article en entier, dont des propos de Nathalie Raoul (Elle), Melissa Toth Kuhn (Manchester by the Sea) et Gitti Fuchs Toni Erdmann) sur le site Internet de Next - Libération.