L’AFC au Festival d’Aquila

par Pierre-William Glenn

par Pierre-William Glenn La Lettre AFC n°129

Après, entre autres, Manoel de Oliveira, Francesco Rosi, Garret Brown, John Bailey et Vittorio Storaro, parmi tant de créateurs du cinéma déjà invités, c’était au tour de l’AFC d’être mise à l’honneur cette année à l’Aquila film festival, du 9 au 13 décembre 2003.

L’âme de ce festival, qui se tient dans la ville d’Aquila, petite ville de montagne des Abruzzes à 150 Km de Rome, est Gabriele Lucci qui fait depuis longtemps la promotion des Arts et du Cinéma en tant qu’auteur de livres, réalisateur, éditeur, organisateur de conférences. Gabriele a fondé la Lanterne magique dans l’Académie internationale pour les arts et les sciences de l’image de sa ville. Il remet le Prix Nestor Almendros tous les ans et, cette année, l’heureux vainqueur était Bruno Delbonnel pour Amélie Poulain de Jean-Pierre Jeunet. Bruno a vaillamment fait un aller-retour pendant le week-end pour recevoir son prix et animer un atelier pour les étudiants de l’Institut. Ricardo Aronovich et moi-même étions invités pour un " hommage " de trois jours avec projections de trois films éclairés par chacun d’entre nous et, comme Bruno, nous devions assumer un atelier pendant une demi-journée.
J’ai pu présenter, en introduction, la carte blanche à l’AFC, que nous avait permis de réaliser Kodak, il y a trois ans, devant un public nombreux et intéressé.

A part le thème de la lumière au cinéma, qu’au dire de l’assistance, l’AFC a su très bien décliner, avec trois chefs opérateurs aux personnalités différentes et complémentaires, l’hommage aux professions de cinéma présentait le métier de créatrice de costumes. Marilù Carteny, une des collaboratrices importantes de Sergio Leone sur Il était une fois dans l’Ouest, a pu nous présenter Quien sabe en présence de Damiano Damiani, son réalisateur, et Catia Dottori nous a présenté La finestra di fronte, un film à succès italien récent.
Les projections avaient lieu au cinéma Massimo, sorte de cinéma Paradiso mâtiné d’AFCAE géré par la municipalité et dédié spécialement à la " Lanterne magique " pendant le festival.

Accueil excellent simple et efficace, présentation des intervenants les uns aux autres, discussions intelligentes à propos des expositions des travaux sur les costumes de Marilù Carteny et Catia Dottori, puis autour des films projetés le soir dans des auberges d’une convivialité exemplaire.
Luciano Tovoli avait fait le déplacement pour la remise des prix. Sa personnalité, sa créativité et le professionnalisme exigeant d’une carrière qui le mène d’Italie aux USA ou en France très fréquemment en font, à mon avis, notre interlocuteur privilégié sur la notion épineuse d’" Auteur de la photographie " mise en place en Italie. Luciano m’a précisé qu’il entendait beaucoup plus défendre l’intégrité du travail de l’image avec cette notion d’Auteur que de disputer ce titre au metteur en scène, mais... le débat est ouvert. Je répète ici que le droit d’auteur ne se divise pas et que cela n’advient qu’au bénéfice du Copyright des studios américains. A ce sujet, un journaliste m’a raconté l’anecdote du tournage de L’Exorciste V où Vittorio Storaro et Paul Schrader se tenaient à 50 mètres l’un de l’autre, chacun devant un téléviseur censé représenter leur " œuvre " respective. Comme pour illustrer ce qui précède et qui nous menace, il semble que ce soit le réalisateur Paul Schrader qui ait quitté les lieux après ce conflit de fait.

Nous avons eu, en prime de ce voyage très enrichissant, le cadeau des trois très beaux livres de Vittorio Storaro : Ecrire en lumière. Je les mettrai à la disposition des membres de l’AFC dès que je les aurai lus. Il nous faut remercier Stefano Masi, le directeur artistique de l’Institut qui avait particulièrement bien préparé l’évènement, son travail précis sur la documentation et les références iconographiques, la mise à disposition de traducteurs compétents (sauf pour Ricardo qui parle presque couramment toutes les langues) et dont la gentillesse et la disponibilité ont été appréciées par tous.
Un seul point noir : le projecteur 16 mm de la salle, hors d’usage, dont j’ai interdit de se servir dans le cadre d’un hommage sur la lumière et qui a été remplacé, dans l’urgence, par un R6 Barco numérique.