L’EST et les effets visuels de "Cineman"

La Lettre AFC n°192

Pour faire suite à l’article de Rémi Chevrin publié dans la Lettre d’octobre, voici un mot sur les effets visuels de Cineman réalisé par Yann Moix (par Alexandre Bon et Audrey Kleinclaus).
L’EST a supervisé la fabrication des effets visuels de Cineman depuis les premières étapes de préproduction jusqu’à la finalisation du film.

Le fait que le film soit coproduit par un producteur belge, Scope Pictures, impliquait un certain nombre de dépenses wallonnes, dont une bonne part de la postproduction. La production française, SAJ, souhaitait néanmoins que le montage et le mixage se passent en France. Dans cette configuration, ils ont donc fait appel à L’EST pour encadrer la fabrication en Belgique, tout en ayant une " interface " en France, proche et réactive.
L’EST a été, pour la production française, le " garant de bonne fin " dans cette filière qui est encore à ce jour peu usitée.

Cineman est l’histoire d’un petit professeur de mathématiques, dont le destin bascule le jour où il est désigné, par hasard, pour aller sauver l’héroïne d’un film. Pour accomplir sa mission, il devra traverser l’histoire du cinéma...
Dès la préparation, il a fallu décider quels effets seraient réalisés en postproduction. Nous avons soutenu l’idée d’effectuer à la prise de vues un maximum des reconstitutions de film et des effets liés, pour des raisons aussi bien esthétiques qu’économiques.
Les trucages ont été envisagés comme un complément visuel, venant enrichir l’histoire (gags, etc.) et faciliter les transitions de film à film.

Au tournage, certains effets, dont le résultat était difficile à prévoir, ont pu être prévisualisés sur le plateau via une mixette (tournage fond bleu avec incrustation d’images d’archives). Pour une séquence, une prévisualisation avait été faite comme référence pour le tournage.
Le travail de maquettage et de recherche graphique des effets a accompagné le montage tout au long de la production.
Pour chaque séquence où les trucages venaient renforcer les effets comiques, il s’agissait de décliner les idées du réalisateur en de multiples variantes. Ainsi, sur la séquence où Régis Deloux est en noir et blanc, il a fallu faire de nombreuses recherches pour établir ce qui caractérisait une image en noir et blanc " années 1920-30 " (contraste, rayures, pompage, scintillement, grain, diffusion des optiques, etc.).
On a ensuite appliqué ces effets sur le personnage, et proposé plusieurs dosages et mélanges, afin d’obtenir un effet qui n’apparaît pas comme un " gadget " (d’où l’abandon des rayures), ni comme un défaut de l’image (scintillement et pompage) tout en étant identifiable au premier coup d’œil : le héros est noir et blanc dans un monde en couleur.

L’effet finalement retenu comprend une augmentation du contraste par zones, du grain et un effet de diffusion douce, appliqués différemment selon la grosseur des plans.
La recherche effectuée sur cet effet de noir et blanc a également " balisé " l’homogénéisation des images de plans tournés avec des images d’archives (Tarzan et Le Voyage à travers l’impossible de Méliès).
Les maquettes ont notamment permis de tester certains gags dans le montage, et de sélectionner ceux qui fonctionnaient réellement, comme par exemple les sous-titres accrochés au héros et dont il ne peut se débarrasser.
Des directions étaient déterminées et puis étaient affinées au fur et à mesure de l’avancement et de l’évolution du montage. L’EST conservait l’historique des versions, des discussions et des décisions prises, et en faisait une synthèse afin d’optimiser le travail et éviter les retours en arrière.
Lorsque le montage a été achevé, la fabrication des plans définitifs s’est faite en deux mois.

Vu les délais de fabrication courts, les trucages ont finalement été répartis par séquences, entre deux prestataires belges, Victor Studio et WFX.
Seule la séquence du générique de début, qui plonge notre héros dans la peau d’Harold Lloyd, a dû être partagée entre les deux truqueurs. Cette séquence se déroulait sur deux décors, partiellement imbriqués, qui nécessitait chacun un matte-painting : le premier utilisait comme base une photo d’époque et le second un film d’archive. Pour des raisons d’efficacité, on a décidé de confier chaque partie à l’un des truqueurs.
La supervision sur cette séquence a porté sur les possibilités d’utiliser des éléments anciens en guise de fond (maquettes sommaires pour choisir parmi les éléments fournis) et l’amélioration de l’homogénéité des plans de WFX et Victor Studio, à la fois entre eux mais également avec les éléments anciens utilisés en fond, ou intercalés dans le montage.
Au final, Cineman comprend 170 plans truqués.