L’Homme de la cave

Le film se tournant majoritairement à l’épaule et dans des petits décors (cave, appartement, bars...), nous avons cherché à élaborer une configuration la plus compacte et la plus légère possible. Nous avons longuement hésité entre la série Zeiss Supreme et les Leitz M 0.8 qui, toutes deux, offraient de grandes ouvertures pour au final porter notre choix sur la série M 0.8. Nous voulions retrouver à peu de chose près la configuration que nous avions eue sur le film de David Oelhoffen, Frères ennemis, et qui nous avait permis d’avoir une configuration ultra légère avec l’Alexa Mini. Nous étions en quelque sorte à la recherche d’une caméra stylo avec aussi la possibilité du "chat sur l ’épaule" et tout ceci en 8K VV !

Pour ce faire, et avec l’aide de TSF, nous nous sommes débarrassés de la cage Tilta qui recouvrait le corps de la Monstro et nous avons opté pour une plaque Arri usinée spécialement pour un corps RED. Le bloc batterie a été déporté ainsi que le boîtier de l’émetteur vidéo HF. Le Cine RT, quant à lui, nous a permis de ne plus avoir le volumineux boitier afficheur d’un Cinetape sur le corps.

Il est à rappeler que contrairement aux autres séries d’optiques, la série M 0.8 ne peut se caler chez le loueur. C’est Leitz qui s’en charge, si bien que si un objectif est décalé il faut prévoir un temps aux essais pour renvoyer cette optique et la revérifier à son retour. Nous sommes donc partis avec quelques optiques de remplacement (le 24 mm et le 75 mm) en attendant le retour des focales de notre série.

Couverture
Nous avons noté un vignettage optique (à coloration verte) jusqu’au 50 mm Summilux. Pas de problème rencontré avec le 50 mm Noctilux et les 75 et 90 mm de la série. Jusqu’au 50 mm T1.4, nous avons tourné en 6,5K (parfois 7K selon les cas). Dans des lieux sombres, tel que le décor de la cave, nous pouvions parfois utiliser le 50 mm T1.4 en 8K (le vignettage se faisait plus discret).

Pleine ouverture
A pleine ouverture, nous avons constaté que cela crée un effet de contour coloré inapproprié et plus particulièrement lors de prises de vues à fort contre-jour. Guillaume aurait aimé tourner à pleine ouverture mais après des tests de fermeture de diaph nous avons vu que le phénomène s’amenuisait et en forçant légèrement la diffusion cet effet de contour pouvait être mieux maîtrisé.

Aspect physique des optiques
Le 24 mm et le 35 mm sont les objectifs dont les corps sont les plus petits de la série. Nous avons beaucoup cherché la configuration idéale afin que tout puisse fonctionner en même temps (pare-soleil léger, motorisation du point et du diaph, longueur de tiges adéquates, etc.). L’Abracam, par sa légèreté, s’apprêtait à être un allié de choix mais du fait de la petitesse des optiques, en l’accrochant sur les frontales, il venait buter en haut comme en bas des autres accessoires de la caméra. Nous avons donc choisi d’utiliser un LMB5 (moins volumineux en hauteur que l’Abracam), duquel nous pouvions enlever l’auge et/ou le volet supérieur afin de gagner en encombrement et surtout en poids .

Pas de mécanisme interne de la mise au point
Toutes les optiques avancent ou reculent selon la mise au point. Le 75 mm et le 90 mm sont celles qui ont le débattement le plus grand. Il ne nous a pas été possible de fixer un pare-soleil sur tige. Au moment de nos essais, l’accessoire dont nous aurions eu besoin n’était pas disponible (le LMB4/5 avec dos soufflet sur tiges). Évidemment, plus les distances étaient courtes, plus l’objectif sortait et le poids du pare-soleil et des filtres sur l’avant durcissait la bague de mise au point.

Conclusion
Riches de cette expérience et de vos multiples conseils des solutions apparaissent pour les prochains tournages :
- Utiliser impérativement le LMB4/5 avec son dos et son soufflet sur tiges de 15 au moins pour le 75 mm et le 90 mm
- Fabriquer des ailettes de serrage de la monture M de la caméra RED (elles existent sur les autres caméras). Cela évitera aux objectifs de bouger sous la pression des moteurs mini C-force car nous pourrions ainsi serrer fermement la monture caméra sur l’optique (impossible de le faire avec le bout des doigts)
- Tourner préférentiellement en format cadre 2.40, si on veut tourner en 8K avec la RED (on s’évite le vignettage mais pas l’assombrissement sur les côtés jusqu’au 50 mm)
- Utiliser impérativement des bagues pré-gravées de WCU afin de bénéficier des distances intermédiaires
- Affiner un pignon de moteur mini C-force d’origine car les bagues de point et de diaph sont très proches surtout sur le 35 mm (sinon le pignon entraîne les deux bagues)
- Espérer un jour que RED intègre des ND dans ses caméras, comme Arri, même si à ce jour il n’existe aucune solution pour le capteur de la Monstro (pas de système Revolva existant pour ce modèle) et a fortiori avec une série qui demande une adaptation de l’OLPF.

Les optiques M 0.8 sont de belles optiques mais elles sont à manipuler avec précaution car, à ce jour, il n’existe aucun accessoire dédié pour elles dans un monde cinématographique où l’on a l’habitude de travailler avec des optiques plus volumineuses et où les avancées technologiques de ces dernières décennies ont facilité leur utilisation (mise au point interne, gravures phosphorescentes et lisibles, encombrement et frontale identique, etc.). Ici, elles restent encore des optiques photos et pouvoir travailler avec elles comme avec d’autres optiques va demander un temps plus grand pour finaliser une accessoirisation viable.