La Quinzaine invite la contre-culture à Cannes
Aux avant-postes, la sélection parallèle met en avant de jeunes cinéastes, par Didier PeronLe programme de la 39e édition de la Quinzaine des réalisateurs a été annoncé jeudi par le délégué général, Olivier Père, 36 ans, dont c’est la quatrième année à la tête de cette sélection parallèle du Festival de Cannes, créée en 1969 par la Société des réalisateurs de films (SRF).
Cette année, la Quinzaine doit plus que jamais parvenir à imposer son style et se choix, face à une compétition officielle particulièrement riche. Elle fait office de vigie, aux avant-postes de la jeune production internationale, et devrait, cette fois encore, remplir à plein ce rôle " Surprise ". « Nous avons sélectionné des cinéastes majoritairement non répertoriés », explique Olivier Père, dont beaucoup signent ici leur premier long métrage, ou qui ont déjà une œuvre, mais ne sont jamais venus à Cannes. « Nous avons privilégié la surprise, des films hors normes par leur forme radicale, l’audace de leur sujet ou leur condition de production. » La bonne santé du cinéma d’Europe (en particulier d’Espagne) et d’Amérique latine, le recul de l’Asie se dégagent selon lui de l’intense travail de débroussaillage international mené par la Quinzaine.
Les films français retenus sont Après lui, de Gaël Morel, avec Catherine Deneuve (et sur un scénario coécrit par Christophe Honoré, dont le film Les Chansons d’amour est en sélection officielle) ; Avant que j’oublie, de Jacques Nolot (la suite du chef-d’œuvre autobiographique La Chatte à deux têtes, 2002) ; La France, de Serge Bozon (après Mods) ; La Question humaine, de Nicolas Klotz (d’après le roman de François Emmanuel) avec Mathieu Amalric (qui figure aussi en compétition officielle dans Le Scaphandre et le papillon, de Julian Schnabel) ; Tout est pardonné, de Mia Hansen-Løve (ex-critique aux Cahiers du cinéma) ; et Elle s’appelle Sabine, documentaire qu’a consacré Sandrine Bonnaire à sa sœur autiste, manifestement un des temps forts de cette sélection.
Energie postpunk. La Quinzaine s’ouvrira le 17 mai avec le film du photographe de rock Anton Corbjin, Control, sur la vie et la mort précoce de Ian Curtis, leader de Joy Division. L’énergie postpunk, le goût de la contre-culture sous ses aspects les plus déroutants scanderont cette sélection. Par exemple avec le film japonais Dai Nipponjin, de Hiro Matumoto, un comique dans la veine de Kitano qui se présente comme un faux reportage sur un type qui se révèle être un super-héros totalement discrédité. En dépit de ses efforts pour combattre les monstres attaquant Tokyo, il est détesté par les habitants et le film suit son inexorable déchéance sociale. « Je l’ai vu quatre fois de suite et l’ai carrément imposé à mes sélectionneurs qui étaient un peu dubitatifs », explique Olivier Père.
Même topo pour Zoo, de Robinson Devor, un docufiction sur l’histoire vraie d’une communauté de zoophiles, se contactant par Internet et se réunissant dans une ferme, dont les activités furent révélées après qu’un de leurs membres, père de famille bien sous tous rapports, fut retrouvé mort suite à un coït malencontreux avec un cheval.
Ceux qui ne seront pas à Cannes pour découvrir ces films (23 longs métrages en tout), retenus par la nécessité de se lever tôt et de travailler plus pour gagner plus, pourront se rattraper à Paris du 30 mai au 5 juin, au Cinéma des cinéastes.
- Se renseigner à partir du 16 mai sur le site www.forumdes images. fr
Didier Peron, Libération, samedi 5 mai 2007