Le CNC publie les dossiers de la production 2005

Mesdames et Messieurs, chers amis,

Merci d’être venus à ce rendez-vous annuel de présentation à la presse des chiffres-clé de la production cinématographique.

J’ai réuni hier les professionnels membres de l’Observatoire de la production et nous avons analysé ensemble ces chiffres.

La présentation des statistiques de la production agréée en 2005 a été suivie d’une analyse des coûts de production des films en 2005, et des résultats de deux nouvelles études, l’une sur la promotion des films et l’autre sur les coûts de distribution des films français.

Vous disposez, dans le dossier de presse qui vous a été remis ce matin de l’ensemble de ces études. Je voudrais d’abord formuler quelques remarques et soulever quelques questions autour des évolutions les plus marquantes de la production cinématographique pour l’année 2005. Puis François Hurard vous présentera brièvement les études que je viens de mentionner avant de répondre à vos questions.

1) Un record absolu, en termes de nombre de films produits

Le phénomène le plus marquant que nous ayons constaté en 2005 est incontestablement la hausse spectaculaire du nombre de films produits : tous les records ont été battus puisque jamais, dans l’histoire du cinéma français, nous n’avons connu de production aussi abondante pour les films d’initiative française (187 films soit 3 films de plus qu’en 2003, où un seuil historique avait déjà été franchi, et 20 de plus qu’en 2004). La même tendance s’observe pour les productions minoritaires, dont le nombre augmente fortement aussi pour porter à 240 le nombre total de films agréés, soit 28 de plus qu’en 2003 et 37 de plus que l’an dernier. Ces chiffres démontrent la vitalité de la production française et en cela sont réjouissants ; mais il est vrai que cette tendance si elle se poursuivait pourrait être inquiétante et ce pour deux raisons :

La première est que les financements progressent de manière moins sensible que le nombre de films ; et il n’est pas forcément sain de produire plus de films en les finançant moins bien : les financements encadrés constituent un montant de financement peu extensible à proportion du nombre de films produits. Il serait donc peut-être bon de se demander si, sans rien céder de l’objectif de diversité qui est le nôtre, il ne serait pas préférable de chercher à stabiliser la production pour pouvoir mieux financer les films.

La seconde raison, plus évidente encore, c’est que le marché, qu’il s’agisse de la salle, ou de la diffusion télévisuelle, aura des difficultés réelles à absorber une telle quantité de films produits, et à leur donner une véritable chance de rencontrer leur public. Dès lors la question posée est tout aussi épineuse que la précédente : devrons nous envisager à terme que certains films produits ne soient finalement jamais distribués en salles ? Ce n’est sans doute pas souhaitable, mais alors, peut être, faudra-t-il améliorer le financement de leur promotion pour les rendre plus visibles.

En tous cas, ces données quantitatives doivent nous amener à réfléchir sur les dangers d’une politique d’aide au cinéma qui, par certain de ses aspects, pourrait s’avérer trop nataliste... Peut être faut-il réorienter certaines de nos aides plus en amont de la production, pour que les producteurs soient davantage incités à investir sur le développement et la réécriture de scénarios.

Et d’une manière générale, je pense que le film de long métrage ne doit pas se soustraire aux principes que nous cherchons à appliquer tant à la production audiovisuelle qu’au court-métrage : essayer de stabiliser le nombre d’œuvres pour pouvoir mieux les financer.

Une tendance forte à la bipolarisation de la production

La tendance déjà observée les années précédentes, d’une bipolarisation, est toujours manifeste cette année, de manière plus aiguë encore.

Une bonne part de l’augmentation du nombre de films provient en effet d’une forte poussée des films à très petit budget (20 films de plus que l’an dernier dont le budget est inférieur à 1M€) Parallèlement, le nombre de films à budget élevé continue d’augmenter (39 films de budget supérieur à 7 M€) et ces derniers captent une part toujours très importante de l’investissement.

Nous devrons donc veiller de manière attentive à ce que l’on ne s’oriente pas vers une accentuation de cette bipolarisation de la production autour de deux catégories : les gros budgets très bien financés et une multitude de petits films dont une bonne part serait victime de précarité financière.

Ceci doit nous amener à être vigilants sur le réglage fin des mécanismes destinés à assurer la diversité de l’investissement ; je pense en particulier aux financements dit « encadrés », et bien sûr aux clauses de diversité de Canal+ et de TPS, sujet -ô combien- d’actualité.

3) Notre production est de plus en plus ouverte à l’international et en particulier à l’Europe :

Une des caractéristiques de la production 2005 est le redémarrage spectaculaire des coproductions : non seulement les coproductions minoritaires, qui sont au nombre inhabituel de 53, mais aussi les films d’initiative française. Au total la moitié des productions françaises fait l’objet d’une coproduction internationale.

L’augmentation des coproductions minoritaires a au moins un grand avantage : elle permet d’amorcer un rééquilibrage de la balance des investissements étrangers dans les films français et des investissements français dans des films minoritaires. Ceci est indispensable au bon fonctionnement de nos accords bilatéraux de coproduction.

Par ailleurs les coproductions européennes continuent leur progression, elles ont doublé en 10 ans et les investissements européens dans les coproductions ont été multipliés par 3.


Parmi les films d’initiative française le nombre de coproductions avec un ou plusieurs pays étrangers a sensiblement augmenté (61 contre 37 l’an dernier). J’y vois la preuve que le dispositif de crédit d’impôt qui a pris son plein essor en 2005 n’est pas nécessairement un frein à la coproduction, comme le prétendaient certains, puisque sur les 118 films qui ont sollicité le crédit d’impôt, 23 sont des coproductions avec l’étranger.

Cette hausse spectaculaire de 56% en un an des coproductions internationales est bien la preuve que notre système d’aide est particulièrement ouvert et elle témoigne d’une internationalisation du financement de la production française dont on ne peut que se réjouir.

Enfin, on constate un léger affaissement des investissements des chaînes de télévision (-3,5 %). Cet affaissement est compensé par la poursuite de la montée en charge des fonds régionaux, et le maintien à un haut niveau du recours au crédit d’impôt. De même les investissement en à valoir des distributeurs et des éditeurs vidéo progressent, ce qui est une tendance très positive à un rééquilibrage des sources de financement des films.

En conclusion :

une production très abondante en nombre et très diverse ; mais qui appelle de notre part une vigilance sur le nombre de films produits : il ne faut pas que cette croissance ait pour conséquence une détérioration du financement des œuvres. Le CNC doit faire attention à ne pas avoir, là comme ailleurs, une politique par trop nataliste.

vigilance également afin d’enrayer une tendance à la bipolarisation, ce qui suppose une réflexion sur les outils tels que les clauses de diversité d’investissement des chaînes de télévision cryptées (C+ et TPS).

Enfin, la diversification des sources de financement (fonds régionaux, crédit d’impôt, coproduction internationale) permet plus facilement qu’avant de produire un film sans apport des télévisions.

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Pour la première fois cette année, nous avons conduit deux nouvelles études. Une étude sur la promotion publicitaire des films et une étude sur les coûts de distribution des films français.

L’étude sur la promotion des films montre clairement que les investissements publicitaires réalisés à l’occasion de la sortie des films ont doublé depuis 2000, pour atteindre en 2004, 223,5 M€. Cette étude compare la publicité en faveur des films français et des films américains. Elle révèle que les investissements publicitaires en faveur des films français ont progressé deux fois plus vite que pour les films américains depuis 2000. Mais, l’investissement publicitaire pour un film français reste, en moyenne, deux fois inférieur à celui d’un film américain (340,1 K€ contre 662,1 K€ en 2004).

L’étude sur les coûts de distribution des films français est une première étape, car elle ne couvre qu’un échantillon de films et ne représente donc pas l’intégralité de la production cinématographique française. Nous avons convenu avec les professionnels de collaborer afin d’élargir à l’avenir la représentativité de cette étude. Elle présente l’intérêt d’évaluer pour la première fois la réalité des coûts de distribution d’un large échantillon de films français. Elle montre que les coûts de distribution représentent 11% des coûts de production des films.

Ces deux études seront poursuivies et enrichies de données plus exhaustives l’an prochain, car il apparaît indispensable que nous disposons de données aussi précises et fiables sur l’économie de la distribution des films que sur celle de leur production.

Pour les autres dossiers 2005, plus d’informations sur le site du CNC