Le cinéma saisi par la folie DVD

par Isabelle Regnier

AFC newsletter n°116

Entre le DVD et la VHS, 2002 est l’année de l’inversion en France : 40 millions d’exemplaires vendus pour les premiers, contre 28 millions pour les seconds.
85 % des titres édités en DVD sont des films du cinéma. Dans leur majorité, les acheteurs vont fréquemment au cinéma (10 fois par an en moyenne, contre 5 pour la moyenne des Français).
De fait, la salle et le DVD semblent plus complémentaires que concurrents. Les comportements qu’induit ce nouveau mode de consommation des images suggèrent toutefois qu’insensiblement le rapport au cinéma se modifie.

Si la consommation de VHS se répartit aujourd’hui équitablement entre la location et la vente, le DVD est principalement un objet d’achat. Pour trois DVD loués par an en moyenne, le consommateur français en achète dix. Les deux premières raisons invoquées pour l’achat de DVD sont de «revoir un film» (40 %) et de «conserver un film précis» (33 %), parfois déjà détenu en VHS (15 %) (source SEV).

Le désir fétichiste lié au cinéma semble se déplacer.
Jadis lié à la vision fugace et immatérielle d’un film en salle, il s’attache avec le DVD à la possession d’un objet. La conception même du cinéma comme art du présent par excellence pourrait s’en trouver détrônée.
(Isabelle Regnier, Le Monde, 23 novembre 2002)