Publication de "Guiraudie/Hym/Vidal, L’Inconnu du lac mis à nu"

Rencontre avec Alain Guiraudie, Jean-Christophe Hym et Nathalie Vidal autour du film "L’Inconnu du lac"

AFC newsletter n°273

Pour la troisième brochure de leur collection "Un réalisateur/un monteur", parue en janvier 2017, Les Monteurs Associés (LMA) publient la transcription réécrite d’une rencontre, ayant eu lieu à La fémis en décembre 2014, avec Alain Guiraudie, cinéaste, Jean-Christophe Hym, monteur, et Nathalie Vidal (LMA), monteuse son et mixeuse, autour du travail effectué sur le film L’Inconnu du lac.

Lors de cette rencontre, il fut largement question de l’élaboration de la fort belle bande son de L’Inconnu mais également de l’économie du film, de méthodes de travail, de la représentation du sexe au cinéma et de bien d’autres sujets.

Extraits
Alain Guiraudie : Je me suis dit : avec ce film, je repars à zéro. Je voulais partir avec une équipe très légère sur le tournage et en postproduction... même si en postproduction les équipes ne sont plus très lourdes ! [Rires] L’idée, c’était de faire avec la lumière ou le manque de lumière, et de faire avec le son qu’il y avait sur place. De repartir avec ce que la nature et les comédiens allaient me donner, et de prendre ce qu’il y avait à prendre. C’était ça le postulat de départ.
Et ça faisait longtemps que je me disais : le son, il y a forcément quelque chose à trouver, on n’en discute pas assez en amont. J’avais toujours la sensation de courir après la machine : l’ingénieur du son faisait un peu ce qu’il pouvait, sans trop savoir où on allait. J’avais même perdu l’habitude de discuter avec le chef opérateur de la lumière que je voulais.

C’est aussi pour ça que je suis reparti avec une équipe complétement nouvelle. Parce que j’ai quand même été un peu fidèle [Rires] : sur Pas de repos et Voici venu le temps, j’avais la même équipe que celle que j’avais constituée sur mes courts métrages. Et on avait perdu l’habitude de discuter. Nous étions un peu dans des automatismes ; on se contentait tous ensemble, moi le premier, de reproduire mon espèce de petit folklore personnel, un peu foutraque, rock’n roll et coloré...
Et là, je ressentais le besoin de discuter de tout ça, notamment du son, en amont du tournage, y compris avec le ou la monteuse. C’est la première fois que je l’ai réellement mis en pratique : c’est la première fois qu’à deux mois du tournage, nous nous sommes retrouvés, ingénieur du son, monteur et mixeuse, à discuter de ces choses-là. [...]

Nathalie Vidal (à Alain Guiraudie) : Tu m’as demandé si on pouvait envisager que ce soit la même personne qui fasse le montage son et le mixage. Je t’ai dit qu’il n’y avait pas de recettes établies ; c’est vrai qu’en général il y a le montage son puis le mix et que l’intérêt d’avoir un monteur son, c’est de se retrouver avec une tierce personne : le mixeur arrive et s’approprie ou pas les propositions du monteur son.
La crainte que j’avais, même si auparavant j’ai pu faire du montage son sur d’autres films – notamment en documentaire mais les enjeux ne sont pas les mêmes qu’en fiction –, c’était de ne pas avoir de tierce personne vers qui me retourner à un moment donné, mis à part le réalisateur, et d’arriver à avoir le recul nécessaire sur le travail en train de se faire. [...]

Pour mémoire, L’Inconnu du lac est photographié par Claire Mathon, AFC.