Rencontre avec Jacques Loiseleux à l’ENS Louis Lumière

le samedi 20 janvier 2007

La Lettre AFC n°162

C’est à l’initiative d’une élève de Louis Lumière, rencontrée lors d’une conférence que je donnais à l’Ecole du Louvre sur " Le Cinéma dans la Ville ", que j’ai été invité à venir parler du travail de directeur de la photographie devant des étudiants des trois années.

J’ai choisi de leur parler des problèmes rencontrés lors des tournages des films d’auteur. Ils ont accepté ce thème avec une curiosité circonspecte. Pour étayer mon propos, j’ai choisi de leur projeter un film exemplaire pour ce thème, Les Baigneuses de Viviane Candas, dont j’ai commis l’image en 2003, et dont la production avait été particulièrement " fragile "...

De plus talentueux que moi interviennent souvent sur la lumière ou d’autres fonctions nobles d’un tournage de film. Mais j’ai constaté que l’intérêt et l’étonnement devant la réalité des problèmes de production des films d’auteurs attestaient de l’ignorance des difficultés qu’ils allaient rencontrer pour satisfaire les désirs des auteurs réalisateurs dans ces productions à faibles budgets. Il m’a semblé nécessaire, devant les élèves d’une école qui prépare particulièrement à nos professions, d’aborder les problèmes économiques de production et leur influence sur l’intégrité de l’œuvre des auteurs et surtout sur le travail de l’image.

Après une projection vidéo du DVD du film sur un grand écran, j’ai retracé rapidement l’historique surréaliste de la mise en production du film. Puis j’ai commencé à repérer et à commenter des exemples de défaillance technologiques ou esthétiques imputables indiscutablement aux conditions de tournage imposées par l’économie. Le cinéma fonctionne dans une économie et nous devons toujours en tenir compte. Mais il faut être conscient que les moyens mis en œuvre doivent être cohérents avec les résultats escomptés par le duo auteur/producteur, ultime décideur.
Autour d’un sympathique buffet préparé par les élèves, quelques anecdotes ont égayé le propos.

A la reprise de l’exposé, les questions ont été plus précises et j’ai pu approfondir le thème de l’influence des moyens mis en œuvre sur la forme et le fond. J’ai essayé de débusquer les pièges et de montrer, comment parfois je m’en étais dégagé et même, tout n’est pas noir, comment j’avais souvent retourné la situation au profit du film. Il n’y a pas de " création " sans contraintes. Si je n’ai pas eu la prétention de résoudre ce problème, j’ai la certitude d’avoir ouvert un champ de réflexion sur un sujet crucial, chez des étudiants souvent préservés des réalités des tournages en production.

Une " bonne " journée qui ne s’est terminée que par la fermeture obligatoire des locaux et par des poignées de mains accompagnées de promesses de se revoir.
« - On peut abuser de votre mail ?
- Bien sûr !
- A bientôt ! »
J’ai beaucoup aimé, j’espère que les élèves aussi.