"Sol y sombra", installation de Robert Alazraki, AFC

Contre-Champ AFC n°324

Avant d’être chef opérateur, Robert Alazraki, AFC, découvre l’importance du regard et la force de l’image grâce à la photographie – il a photographié les festivals d’Aix-en-Provence et d’Avigon dans les années 1960. Il expose en octobre, sous forme d’une installation en deux parties : l’une au sol, constituée de grands tirages de 36 sur 60 cm – une série de cadavres et de squelettes d’animaux –, l’autre, au mur, est une frise composée de clichés en couleur de passants à Marrakech sur un fond d’une fresque de dessins d’enfants. Françoise Docquiert, commissaire de l’exposition, présente ici son travail, fruit à la fois d’une vision et d’une recherche.

Au sol :
Fasciné comme beaucoup d’entre nous par la mort, Robert Alazraki a photographié, au cours de ses voyages et de ses lieux d’habitation, depuis 50 ans, des cadavres d’animaux. D’abord un chien (en noir et blanc), plus tard des oiseaux – des mouettes, des goélands, des pigeons – des musaraignes, des lapins, des abeilles ou d’autres encore réduits à l’état de squelette …

A la première lecture, ces images, présentées au sol, jettent le trouble tant elles paraissent d’une froideur presque terrifiante. A y regarder de plus près ces clichés s’apparentent plus à une écriture épurée qui, tout en voulant garder ses distances, rencontre la puissance majestueuse de la mort. Les images deviennent une quête pour saisir l’essence de la vie-mort, de l’apparition-disparition dans ses manifestations humaines. Ces cadavres apparaissent alors comme des variations en noir et blanc ou couleur, sépia parfois, rehaussées d’un rouge vif ou d’une teinte plus pure dont l’austérité chromatique ajoute encore en conviction, en puissance démonstrative. Ces formes peuvent subir des mutations violentes et révèlent l’anatomie interne des squelettes. Le parti pris d’un cadrage serré met en valeur la somptuosité de ces dépouilles réduites parfois à l’état de débris.

Au mur :
En contraste, une frise composée de clichés en couleur. Des images prises à Marrakech dans l’espace public. Des passants – enfants, étudiants, hommes et femmes – marchent avec en arrière plan une fresque murale, faite de dessins d’enfants. Robert Alazraki fait là le portrait de la vie, de sa force et de son énergie créatrice. Les photos sont joyeuses, légères. Une idée du bonheur, du soleil, de l’insouciance…, comme sur un fond de toile, l’artiste a tracé un espace de vérité, tout à la fois une vision et une libre recherche sur un pays qu’il connait bien.

Avec cette installation en "coup double", Robert Alazraki invoque sans faillir la liberté d’essai et d’expérimentation. Tous les éléments présents appartiennent au processus organique de la vie terrestre. Robert Alazraki puise une énergie de ses métaphores – la vie, la mort – pour nous mettre face à un rapport direct avec "les puissances latentes" de l’existence.

Françoise Docquiert, commissaire de l’exposition

"Sol y sombra", installation de Robert Alazraki
L’Entrepôt
7-9, rue Francis de Pressensé – Paris 14e (2e étage sans ascenseur)
Du 2 octobre au 5 novembre 2021
Les mercredi, jeudi, vendredi, samedi, de 15h à 20h