Technicolor pressenti comme repreneur du groupe Quinta Industries et de son laboratoire LTC

Par Alain Beuve-Méry

AFC newsletter n°217

Le Monde, 14 janvier 2012
Le démantèlement du groupe Quinta Industries, placé en liquidation judiciaire en décembre 2011, se précise. C’est la société Technicolor, actionnaire minoritaire (17 %) de ce joyau de la postproduction française – le financier franco-tunisien Tarak Ben Ammar en détient 83 % –, qui devrait reprendre la majeure partie des activités.

Les juges du tribunal de commerce de Nanterre (Hauts-de-Seine) doivent se prononcer sur le sort des salariés, ainsi que sur celui des différents actifs du groupe, les films en cours de production, mais aussi les 26 000 bobines archivées qui font partie du patrimoine cinématographique français.
Pour les juges, le dossier est particulièrement délicat à dénouer, en raison de l’enchevêtrement des liens juridiques et techniques entre les différentes filiales du groupe Quinta (le laboratoire de développement de films LTC, Scanlab, SIS, Auditoriums de Joinville, Duran Duboi) et de l’opacité des comptes. A la fin 2010, le groupe aurait enregistré dix millions de pertes pour un chiffre d’affaires d’une quarantaine de millions d’euros.

Jeudi 12 janvier, une décision était attendue pour le choix du repreneur principal. De fait, elle a bien été prise dans le bureau du juge, mais la rédaction définitive du jugement ne sera connue que le 20 janvier.

A priori, parmi les offres de reprise déposées, c’est celle de Technicolor qui a la préférence des juges, pour reprendre les actifs LTC, Scanlab, Duran, Auditorium de Joinville et SIS. Cette offre est considérée comme la plus complète (elle concernerait l’ensemble des filiales) et aussi comme la plus sérieuse, avec notamment un plan d’investissement de près de 3 millions d’euros. Elle est surtout celle qui limite le plus « la casse sociale », en proposant de conserver presque les deux-tiers des salariés au sein des filiales placées en redressement judiciaire, (soit une quarantaine de salariés sur 70).

Stocks de bobines préservés
En ce qui concerne la société Duboi, dont la liquidation n’a été prononcée que jeudi 12 janvier, son sort ne sera définitivement scellé que le 26 janvier, mais, là aussi, la société Technicolor tient logiquement la corde.
Ce sont les salariés de l’industrie de la postproduction cinématographique française qui paient le plus lourd tribut à la déconfiture du groupe Quinta Industries, liée à la révolution numérique. Les 115 salariés du laboratoire LTC, placé en liquidation, ont, eux, très peu d’espoir de retrouver un emploi au sein de la structure.

Du côté des actifs matériels, des solutions ont en revanche été trouvées qui préservent l’intégrité des films détenus par le laboratoire et qui satisfont tous les professionnels du secteur.
En ce qui concerne les stocks de LTC et les 26 000 bobines de films, le juge a retenu, parmi les offres de reprise, celle de Capital Vision, une société spécialisée dans le stockage, l’archivage et la préservation de fonds audiovisuels. Elle possède trois sites à Paris et en proche banlieue parisienne.

Enfin, pour les 61 films en cours de postproduction, « les risques majeurs sont écartés », a déclaré la Fédération des industries du cinéma, de l’audiovisuel et du multimédia (Ficam), dans un communiqué rendu public, jeudi 12 janvier. Tous les films sont techniquement sécurisés et ont été placés sur des disques durs.
« La continuité de certains travaux a même parfois été rendue possible chez Duboi et aux auditoriums SIS par l’engagement des techniciens restés présents », souligne la Ficam.
Il n’y aura pas de défaillance de la part de la filière technique du cinéma, vis-à-vis des producteurs de films et des exploitants de salle.

(Alain Beuve-Méry, Le Monde, 14 janvier 2012)