"Unedic : pourquoi la réforme n’aura pas lieu"

Par François Vidal

AFC newsletter n°241

Les Echos, 20 mars 2014
Syndicats et patronat se retrouvent aujourd’hui pour la dernière séance de négociation sur la réforme de l’assurance chômage. Mais les dés sont pipés.

Ce ne sera pas le grand soir de l’Unedic. La nécessaire réforme de l’assurance-chômage, ce ne sera pas pour cette fois. Le mécanisme d’indemnisation des chômeurs a beau avoir perdu 4 milliards d’euros l’an dernier, sa remise à flot attendra. Pour une raison simple, c’est que les deux mois de négociations qui s’achèvent normalement aujourd’hui, sans doute tard ce soir, ont tourné au dialogue de sourds.
Avec d’un côté un Medef convaincu qu’il faut redresser les comptes de l’Unedic pour assurer sa pérennité, et, de l’autre, des syndicats persuadés qu’il faut à tout prix éviter d’engager un recul trop marqué des droits des chômeurs en période de chômage record. Dans ces conditions, aucune réforme d’envergure n’était envisageable. Impossible de toucher aux grands curseurs du régime général, qu’il s’agisse de la durée d’indemnisation, du montant des allocations ou de la modulation des droits en fonction du taux de chômage.

Il ne faut pas pour autant s’attendre à un échec des discussions. Aussi étonnant que cela paraisse dans un tel climat, un accord est à portée de main. D’autant qu’en pleine négociation sur le pacte de responsabilité, personne n’a intérêt à provoquer un clash. Mais, comme d’habitude, il sera à minima. Les partenaires sociaux sont prêts à s’entendre pour gratter quelques centaines de millions d’euros d’économies ou de revenus supplémentaires.
Des mesures ciblées pourraient concerner les gros chèques de départ versés aux cadres, la contribution des seniors ou encore le régime des intérimaires. De quoi donner du grain à moudre aux uns et aux autres et gagner un peu de temps. Mais un tel compromis n’est possible qu’à une condition. Que chaque partie obtienne une victoire symbolique.

Chaque camp doit pouvoir repartir avec un trophée qu’il pourra brandir. Côté syndical, il s’agit de la mise en place des droits rechargeables, ces droits censés faciliter le retour au travail des chômeurs prévus par l’accord sur le marché du travail de janvier 2013. Côté Medef, on veut l’assurance que le très coûteux régime des intermittents du spectacle fera l’objet d’un examen approfondi dans un avenir proche.
Bref, les conditions d’un grand marchandage sont posées. Et les négociations sur l’assurance-chômage, dont on nous promettait en fin d’année dernière qu’elles seraient décisives, pourront tranquillement accoucher d’une souris. Quant à l’Unedic, elle pourra continuer à creuser son déficit, en attendant la prochaine négociation de la dernière chance.

(François Vidal, Les Echos, jeudi 20 mars 2014)