Voyages en Italie

Quand Sophie Letourneur m’appelle pour tourner Voyages en Italie, je suis enthousiaste. Tourner avec un camescope, en voyageant, un récit de souvenir(s) de voyage. À la fois drôle et mélancolique, comme toutes les choses vraiment drôles.

« Il m’est impossible de croire qu’au plus profond de sa nuit chacun ne possède pas de telles images filantes susceptibles de changer le paysage. Je ne connais pas de meilleure raison pour ne pas en finir de prendre à revers un monde qui, chaque jour un peu plus, oublie le monde. »
(Annie Le brun, La vitesse de l’ombre)


Nous voici embarqués, Cyrille Hubert et moi, pour tourner à deux caméras et faire le récit de ce voyage, de ce couple qui veut se sauver de la destruction, du désarroi, du quotidien assassin.
 Qu’est-ce que faire un récit de voyage ? Comment rapporter des images qui soient juste des images ? C’est peut-être, d’abord et avant tout, regarder. Ré-apprendre à voir et poser sa caméra, poser un cadre.

Jonathan Ricquebourg et Cyrille Hubert, camescopes au poing
Jonathan Ricquebourg et Cyrille Hubert, camescopes au poing



Avec ces petits camescopes 2/3 de pouce, la profondeur de champ est très grande, et nous pouvons nous fondre au milieu des gens. Pouvoir les filmer et les faire exister. La mise en scène du réel, ou comment le réel habite chaque plan, au milieu de la fiction que sont tous les couples : chacun tentant de faire pour lui-même le récit de ce qu’il voudrait être en tant que couple. 

Visuellement, le dispositif de Sophie est intense et nous tournons 14, 15h par jour. Les repas sont filmés, re-filmés. Beaucoup de lumière naturelle. Régler un rideau, un dimmer sur une ampoule. 

Le dispositif fait que nous tournons en permanence, trainant nos valises avec nous. Il faut donc aller au plus simple, au plus évident : des plans fixes, qui parfois accompagnent les corps de Sophie et Jean-Cri par de simples panoramiques.


En préparation, Sophie pré-tourne son film avec ses acolytes, Laetitia Goffi et François Labarthe. C’est-à-dire que les repérages sont déjà "re-faire" le voyage des vacances de Sophie Letourneur. Elle tourne chaque plan avec des doublures, comme un storyboard filmé. La vie de Sophie qui inspire le film est donc filmée une première fois, montée une première fois. Puis cette esquisse nous est confiée pour le tournage. La vie est vécue, puis écrite, puis filmée, montée, re-filmée, re-montée. Tel le ressac.


Puis, à l’intérieur du film, ce récit est lui-même raconté par les personnages. Cette fois filmé en 35 mm. Comme si le temps le plus proche était aussi le plus organique, l’image la plus ronde, celle qui reste sur un support physique. Et c’est tout à coup dans les silences que se niche quelque chose à regarder, dans la sensualité, quand tout à été dit et que le récit semble enfin épuisé. Il nous semble alors voir que Sophie et Jean-Cri s’aiment. Que l’amour entre eux se niche au coeur des images, et que c’est peut-être cela qui rend à l’image sa vraie beauté.

Portfolio

Crew

Cadreur caméra B : Cyrille Hubert
Premier assistant opérateur : Ronan Boudier
Second assistant opérateur : Arthur Bartoli
Machinerie (renfort) : Romain Riché
Son : Charlotte Bouché
Etalonnage : Yov Moor

Technical

Matériel caméra : Loca Images et Panavision (Sony Z90 et Aaton Penelope, série Primo Classic)
Négative 35 mm : Kodak 5219
Laboratoire : Cosmo Digital (scan et étalonnage)

synopsis

Une escapade romantique peut-elle raviver la flamme dans un couple ? Elle a réussi à le convaincre de partir quelques jours sans enfant. Ce sera où il a envie, sauf en Italie. Il y est déjà allé avec toutes ses ex... L’Espagne ? Les sentiers de l’Aubrac ? Ce sera finalement la Sicile – car selon lui, c’est pas tout à fait l’Italie.