De retour du 45^e Festival des 3 Continents à Nantes

Le programme inclut aussi de nombreuses rétrospectives.
Cette année :
- Safi Faye, réalisatrice sénégalaise récemment disparue à 79 ans était célébrée avec la projection de dix films
- Ann Hui, née en Chine et ayant grandi à Hong Kong. Elle a reçu un prix d’Honneur au festival de Venise en 2020. Âgée de 76 ans, elle ne s’est pas déplacée, non pas en raison de son âge mais d’un travail en cours. Une dizaine de films projetés.
- Une anthologie du cinéma vietnamien avec vingt films.
- Un Hommage à Amitabh Bachchan, « plus grande star de la scène et du cinéma » selon un sondage de la BBC en 1999.
- Un programme intitulé "Les Méandres du Temps" avec des films de Rachid Bouchareb, Rithy Panh, Satyajit Ray, Patricio Guzman...
- Et enfin un programme de films d’Animation pour les tous jeunes spectateurs.

Le festival attire de plus en plus de public, un record cette année.
Jérôme Baron, le directeur artistique, est un véritable amoureux des films. C’est un cinéphile hors pair, il entretient des relations suivies avec les réalisateurs·rices de ces 3 continents depuis plus de 15 ans.

Le festival décerne trois prix dans le cadre de la compétition internationale, Montgolfière d’or, d’argent, et Prix d’aide à la distribution.
A cela s’ajoutent un Prix du Jury Jeune et un Prix du Public.

J’ai eu le plaisir de faire partie du jury de la compétition internationale de la 45^e édition aux côtés de Laurence Lascary, productrice - société DACP (De l’Autre Côté du Périph), de Chloé Mazlo, issue de La Fémis, réalisatrice franco libanaise de films d’animation et d’un long métrage (Sous le ciel d’Alice), et de Jean-Baptiste de Laubier, dit Para One (issu de La Fémis), DJ, compositeur, producteur et réalisateur (dont Spectre : Sanity, Madness & the Family). Il a composé la musique de tous les films de Céline Sciamma.

Dans le cadre de la compétition Internationale nous avons visionné dix films.
La Montgolfière d’or a été attribuée à The Shadowless Tower, film chinois de Zhang Lu ayant à son actif une dizaine de films dont Gyeongju, présenté à ce même festival il y a neuf ans.
Le film suit la vie d’un homme poète devenu critique gastronomique et celle d’une jeune collègue photographe. Les méandres de leurs vies respectives, enfouies dans le non-dit, se déploient dans la plus grande simplicité en une toile d’araignée dévoilant toutes les "fictions familiales" traumatiques et inhibantes. Véritable puzzle dont les pièces s’emboîtent de manière toujours surprenante, la narration sans effets spectaculaires fabrique une porosité troublante vie/temps/cinéma qui donne aux personnages une indépendance et une liberté magiques.

La Montgolfière d’argent a été attribuée au premier long métrage documentaire camerounais Le Spectre de Boko Haram, de Cyrielle Raingou. Elle a réalisé de nombreux courts métrages.
Nord Cameroun, le village de Kolofata et ses habitants marqués par le passage du groupe terroriste. La cinéaste se place du côté des enfants, ils ont entre 4 et 11 ans, garçons et filles.
Combien de temps a-t-il fallu pour que la caméra soit accueillie ? pour que délicatesse, poésie et surtout dignité imprègnent les paroles, les images ? La puissance de son sujet et de son traitement dégage une rare force vitale.

Le Prix d’aide à la distribution a été attribué à Fly On, film japonais de Takuya Kato. À 30 ans, il a écrit et mis en scène une vingtaine de pièces de théâtre. Fly On est son 2^e long métrage.
Il nous a réunis pour sa concision formelle usant et déjouant à la fois avec une grande finesse les ingrédients du mélodrame au sein d’un jeune couple, perçant les apparences de la société japonaise contemporaine.

Le Prix du Jury Jeune a été attribué à Critical Zone, film iranien de Ali Ahmadzadeh tourné clandestinement, interdit en Iran. Le film suit les activités d’un dealer de drogue sans chercher à éviter les outrances hallucinées aussi bien à l’image qu’au son.
Il a reçu le Léopard d’or à Locarno en 2023.

Le Prix du Public a été attribué à Bride Kidnaping, film kirghize de Mirlan Abdykalykov.
Le film est une dénonciation des mariages forcés pratiqués chaque jour au Kirghizistan aussi bien par les hommes que les femmes.
Le déroulement linéaire et patient du film démontre avec force la cruauté d’une pratique au sein d’une société au portrait contrasté, tragiquement autodestructrice.

Les films seront présentés au cinéma L’Arlequin à Paris du 24 au 28 janvier 2024.