Panavision France interviewe le directeur de la photo Thomas Bataille sur le tournage de "La Nuit du verre d’eau"


Le directeur de la photographie Thomas Bataille a photographié La Nuit du verre d’eau, de Carlos Chahine, en Sony Venice et optiques Primo Classic de Panavision, louées chez Panavision France. Il explique ses choix esthétiques pour ce tournage.

Comment avez-vous été impliqué dans le projet ?
Thomas Bataille : J’ai rencontré Carlos Chahine par sa productrice française, Chantal Fischer, et grâce à Chad Chenouga, un réalisateur avec qui j’avais travaillé et qui lui a conseillé de me rencontrer. Après avoir lu le scénario, nous avons pris un café et nos échanges ont immédiatement porté sur le ton du film. Son, ou ses points de vue.
Carlos avait envie d’un grand film classique et romanesque tout en étant conscient que le côté carte postale risquait d’amoindrir les émotions de son héroïne. Selon moi, bien que le film se passe au Liban en 1958, c’était important qu’on vive l’instant présent intensément avec elle. Il fallait éviter le vernis du film d’époque qui tient souvent à distance.
Je pense que le film est un mélange de ces deux approches.

Comment décririez-vous le look du projet ?
TB : Une des références était Le Jardin des Finzi Contini, de Vittorio De Sica, avec la magnifique image d’Ennio Guarnieri. Un film lumineux et vif, alors que gronde en Italie les prémices de la guerre et des déportations. Nous avons essayé de garder cette idée pour l’image du film, une image brillante, lumineuse et douce, et des cadres qui circulent d’un personnage à l’autre au gré de leurs déplacements pour accompagner leur vivacité.

Y avait-il des références visuelles particulières dont vous vous êtes inspiré ?
TB : La vallée de la Qadisha dans laquelle se déroule le film est un des personnages de ce film. C’est un endroit magnifique… Paradisiaque par certains aspects, mais il fallait qu’on garde toujours une dimension dramatique qui reflète l’enfermement ressenti petit à petit par le personnage de Layla. Nous devions lutter en permanence contre la belle image de carte postale lisse, garder des "à pic" et des failles dans les paysages. Certaines peintures de Caspar David Friedrich pourraient en être une inspiration. Nous nous sommes aussi inspirés de peintures de Khalil Gibran, un écrivain et peintre libanais originaire de cette vallée. Dans ses peintures, il est question d’amour et de mort.

Attendre la bonne lumière - Photo : Thomas Legrand
Attendre la bonne lumière
Photo : Thomas Legrand


Qu’est-ce qui vous a amené à Panavision pour ce projet, et vous a attiré vers la série Primo Classic que vous avez choisie ?
TB : Pour ce film, nous avions besoin de douceur et de brillance, c’est pourquoi j’ai choisi les optiques Primo Classic, et de ce fait, de partir avec Panavision. Nous avons fait des essais comparatifs mais les Primos ont vraiment un rendu particulier, une douceur sur les peaux, un côté riche et brillant et une manière particulière de partir dans les flous avec douceur. Ça correspondait tout à fait à ce dont nous avions besoin pour le film.
Cette vallée, ce paysage est un réel personnage de ce film. Comme une prison dorée. Il fallait pouvoir rendre toute la nuance des couleurs de verdure de ce paysage.
C’est pourquoi j’ai opté pour la Sony Venice qui avait aussi l’avantage de pouvoir se dissocier, avec le Rialto, et devenir toute petite lorsque nous tournions à l’intérieur de la voiture du film.

Avec Carlos Chahine - Photo : Thomas Legrand
Avec Carlos Chahine
Photo : Thomas Legrand


Qu’est-ce qui vous a poussé à devenir directeur de la photographie et qu’est-ce qui vous inspire aujourd’hui ?
TB : Je faisais beaucoup de photo lorsque j’étais adolescent mais je ne connaissais rien à la fabrication d’un film. Une nuit, j’ai fait de la figuration sur un film de Maroun Bagdadi, photographié par Patrick Blossier, AFC. J’ai été fasciné par cette société secrète qui s’affairait toute la nuit silencieusement dans un appartement parisien pour ne pas être remarquée par les voisins.
J’ai eu envie de participer à cette aventure de cinéma et de vie.

Un grand merci à l’équipe qui m’a accompagné sur ce tournage.