Tanguy, le retour

A contrario du premier Tanguy, dont le décor principal offrait une vue sur tout Paris par une grande verrière, Etienne Chatiliez voulait, pour cette nouvelle version, un univers fermé sur l’extérieur. De petites fenêtres filtrant la lumière par des chiens-assis dans un appartement mansardé et bas de plafond. Un dédale reliant plusieurs ailes d’un immeuble XVIIIe. Un cocon qui, toujours en opposition à l’univers foisonnant de 2002, devait être dépouillé, blanc, moderne, une sorte de galerie d’art dans de l’ancien.

Un univers malgré tout réaliste qu’il voulait reconstruire en studio, pour une scénographie adaptée au plus proche de sa mise en scène.
Etienne avait une vision complète de son film, de la première à la dernière image. Il avait tout noté sur son scénario et, cigarette après cigarette, me décrivait chaque scène, chaque plan que je reportais sur mon carnet. Une préparation aussi intense que passionnante qui m’a permis de proposer différentes solutions de prises de vues.

Rapidement, Etienne a été séduit par les grands capteurs. Il pouvait à la fois garder un format 1,85:1 et bénéficier d’une profondeur de champ laissant les découvertes disparaître plus vite dans le flou. Les focales plus longues offraient des perspectives plus intéressantes pour le décor tout en ramenant les personnages au premier plan. Il aimait l’idée d’une grande amplitude de mouvements dans la profondeur pour les plans-séquences.
La combinaison du piqué de la RED Monstro avec la rondeur des Cooke S7 nous a séduits dès nos premiers essais filmés avec Sabine Azéma et André Dussolier.

Photo Anna-Katia Vincent

Stephane Makedonski, chef décorateur, m’a proposé d’intégrer au maximum la lumière dans l’architecture du décor. Toutes les appliques encastrées diffusaient une lumière indirecte dans la cuisine, les coursives et le salon.

Nous avons imaginé des goulottes lumineuses sur les pourtours des plafonds dans lesquelles plus de 80 mètres de rubans de LEDs allaient être déroulés. Après plusieurs consultations auprès de fabricants de ce type de rubans (Ledbox, Exalux…), Guillermo Grassi, de chez Ruby Light, m’a proposé de développer son principe de Boas sur des grandes longueurs, ce qui m’a permis d’obtenir un bon rapport d’IRC et de luminance sur du blanc dynamique. Il s’est chargé de l’installation. En soulevant légèrement un côté ou l’autre des plafonds, un ruban de LED pouvait amener une direction de lumière au cœur du décor.

Malgré la petite taille des fenêtres, la découverte restait importante pour Etienne, qui tenait au réalisme du décor. Un montage photo jour/nuit de Jean Noviel a été imprimé en double face sur un Translite chez Métropole et déroulé sur près de 30 mètres à 5 mètres de distance des mansardes.
Côté chambre, les hautes fenêtres offraient une perspective potentiellement plus importante sur la rue où une animation pouvait ramener un peu de vie dans le décor. Des tests d’incrustation à travers les voilages ont été très concluants. Digital District a intégré des pelures tournées au même endroit que la photo par Pierre Dejon à différentes heures du jour jusqu’à la nuit.

Le dispositif de lumière devait permettre une grande amplitude d’ambiances, d’intensités et de températures pour l’évolution selon les heures et les saisons.

Photo Anna-Katia Vincent

Avec Eric Gies, nous avons dressé un plan lumière permettant des entrées par toutes les fenêtres. Celles-ci restant petites, nous les avons équipées en SkyPanel 60 sur trois côtés. Et l’utilisation d’un SkyPanel 360 nous donnait la direction principale, très naturelle. Des sources plus spéculaires ont permis des entrées de soleil : T12 Fresnel, Aircraft, Molebeam. Eric pouvait tout moduler depuis sa tablette.
Pour la découverte nous avons mélangé les ambiances tungstène avec des SkyPanels pour le côté jour. Et pour le côté nuit, uniquement tungstène. Chaque source représentait un enjeu important dans l’économie du film. Laurent Kleindienst, chez TSF, était un vrai partenaire.

Richard Deusy a étalonné sur Baselight chez Color. Nous avons écarté les LUTs film qui avaient tendance à vieillir l’image. Tout l’enjeu a été de garder les murs blancs dans une ambiance froide. La tonalité était donnée dès le départ avec les deux sculptures lumineuses de François Morellet qui trônaient dans le décor et ne toléraient aucun réglage ni manipulation. Les découvertes devaient rester très lumineuses, comme dans un décor naturel, presque surex. Les visages légèrement sous-ex pour mieux s’incarner sur fond blanc.

Bande-annonce officielle

Portfolio

Équipe

Cadreur 2e caméra : Pierre Dejon
Opérateur Steadicam : Jan Rubens
Première assistante caméra : Anna-Katia Vincent
Chef électricien : Eric Gies
Chef machiniste : Laurent Passera

Technique

Matériel caméra : TSF Caméra (RED Monstro 8K, format 1,85:1, objectifs Cooke S7)
Matériel électrique et machinerie : TSF Lumière et TSF Grip
Laboratoire : Color
Etalonnage : Richard Deusy

synopsis

Seize ans plus tard, Tanguy, qui a maintenant 44 ans, revient chez ses parents avec sa fille Zhu dans le bras, car Meï Lin l’a quitté. Déçus de voir leur "petit" dans cet état, Paul et Edith font tout pour lui redonner le goût de la vie, sans se rendre compte que, ce faisant, ils tressent la corde pour se pendre. Parce que Tanguy commence à se sentir bien avec ses parents.