A propos du KLMS

par Denis Lenoir

La Lettre AFC n°141

En vue d’un tournage prochain, je m’apprêtais, il y a peu, à acheter le Kodak Look Manager System que j’avais testé il y a quelques mois (voir Lettre de l’AFC de décembre) quand j’ai découvert son prix, 1 000 dollars US ! Trouvant la somme demandée complètement dingue comparée au prix de Photoshop ou à celui de de Final Cut Pro, deux logiciels autrement puissants, j’ai demandé une ristourne (n’est-ce pas la règle dès qu’on achète le moindre mètre de pellicule ?) et on m’a répondu que cela ne se pratiquait pas. Pour couronner le tout j’ai découvert que pour 1 000 dollars je n’aurais même pas droit à la version complète (celle que j’avais testée n’est disponible qu’à la location) mais seulement à la version light, celle destinée aux directeurs de la photographie. Cette dernière ne permet pas d’étalonner son moniteur et par conséquent d’après Kodak pas non plus d’envoyer des images au télécinéma ou ailleurs, sinon sous la forme plus approximative de tirages papier. Dans la tête des " marquetteurs " qui en ont décidé ainsi cela signifie que nous, chefs opérateurs, sommes supposés débourser 1 000 dollars pour un outil qui permet de simuler l’usage des différentes pellicules Kodak et les différents traitements qu’on peut leur appliquer (on pourrait penser qu’un tel outil, comme le nuancier d’un fabricant de peinture, devrait être très abordable, puisqu’il sert en dernière analyse à faire vendre du film). Un outil qui ne permet pas en revanche de faire ce pour quoi je l’ai testé, étalonner des images du tournage et les envoyer par e-mail là où nous les croyons nécessaires, au laboratoire, au télécinéma et de façon plus générale en postproduction. Je n’ai pas acheté et je n’achèterai pas le KLMS.
Déjà, à la sortie du Preview, j’avais eu une attaque, il n’était disponible qu’à la location chez Panavision (combien d’entre nous l’ont-ils effectivement loué et combien de fois ?) et venait avec un ordinateur portable Windows (bravo encore pour les " marquetteurs "). Chaque fois que je voyais, à Paris, puis à Hollywood quand j’ai déménagé, quelqu’un de la maison Kodak, je répétais inlassablement ma frustration devant ce que j’appelais une telle erreur de marketing. A force de les embêter et sans doute pour se débarrasser de moi, j’ai été présenté à l’équipe qui développait le KLMS et j’ai suivi enthousiaste leurs travaux. Alors en arriver là...
Mais cet automne, j’avais pris goût à ma séance quotidienne d’étalonnage en chambre alors quand j’ai reçu une invitation de l’ASC pour la présentation d’un logiciel d’étalonnage numérique d’images en mouvement, logiciel destiné directement aux directeurs de la photographie afin qu’ils puissent envoyer en aval des images, non pas référence absolue, mais indication précise de ce qu’ils veulent, je m’y suis précipité. Cela s’appelle Speedgrade, ce sont les Allemands de la société Iridas qui l’ont développé, ça a l’air fantastique de possibilités et de souplesse, et je vais le tester le mois prochain.

Denis nous proposera, dans la prochaine Lettre, le journal du test de Speedgrade.