La Vie nue

Un film "Pirate", du nom de la structure de production et distribution initiée par Humbert Balsan (Ognon pictures), Paolo Branco (Gemini Films) et Gilles Sandoz (Maïa Films).

Pirate, car tourné à l’écart d’éventuels subsides des chaînes de télévision et des circuits habituels de financement. Pirate, car ces producteurs en sont de beaux exemples, dans le sens noble du terme qui me faisait rêver étant gamin : il suffit de consulter leurs filmographies pour s’en persuader.
Et, même si, parfois, certains se plaignent de leurs méthodes de production ou des salaires au rabais offerts aux techniciens, combien d’œuvres originales, personnelles, atypiques, refusées par d’autres structures plus " normales " car " hors normes " ont pu voir le jour des écrans cinématographiques grâce à eux !

Synopsis : C’est d’abord l’histoire d’un homme qui meurt puis l’histoire d’un homme après sa mort. C’est également l’histoire vagabonde des hommes et des femmes qui l’accompagnent. Un voyage dans l’incertitude de leurs pensées et de leurs actes. L’histoire d’un songe où la raison n’a guère de place quand elle côtoie l’absurde du quotidien.
Le parcours de cet homme est une renaissance et la fin, une résurrection.

Un film à ressentir ou à refuser...
Lors d’une projection à Cannes, dans le cadre des films sélectionnés par l’ACID (l’Agence du Cinéma Indépendant pour sa Diffusion), un réalisateur italien, ému, dit avoir vécu une expérience en regardant ce film.
C’est exactement ce que j’ai ressenti en le tournant : une expérience. Pas dans le sens où l’on se dit : « Allez, je vais faire ce film, c’est une expérience, ça ne portera pas à conséquence ». Non, j’ai fait une expérience de vie, de création et je n’en suis pas ressorti indemne.

Car il y avait une vraie demande de la part de Dominique Boccarossa, dont c’était le troisième long métrage après Stabat mater (1996) et Bleu, le ciel (2001).
Une vraie exigence. Ce film demandait à ses collaborateurs de s’immerger dans un univers, une vision, une méthode de création furieusement personnels.
La Vie nue... oui, mais le décor nu lui aussi, les comédiens nus - au sens figuré et parfois propre - et la lumière, nue.

« J’aimerais une lumière qui ne vienne de nulle part, une lumière que l’on ne voit pas, une lumière sans ombres. »
Donc pas de sources dans le champ. Des aplats de couleur comme décor - merci Françoise (Arnaud) pour ta capacité de création instinctive, généreuse, collant aux désirs de Dominique, répondant à mes interrogations, mes suggestions, merci pour ton habileté à récupérer les bouts de ficelle et à en faire des espaces de vie cinématographique.
Pas de lumière pénétrant par les fenêtres, pas de contraste, pas d’effets mitonnés pour surprendre le spectateur ou les collègues, sauf pour deux scènes qui sont des moments de bascule.

Le scénario ? Un des plus beaux textes qui m’aient été donnés à lire. Pas vraiment une continuité dialoguée - d’ailleurs les dialogues sont réduits à leur plus simple expression, se résumant parfois à un bruit, une musique de fond. Pas de numérotation de scènes, pas de didascalies, mais des mots forts et simples, une ambiance sourde et prégnante, comme le fantôme de ce que pourraient ressentir les personnages.
Une écriture blanche, sans "psychologisme". Et ça, c’était une vraie indication de travail pour moi, une piste à suivre : la discrétion, la mise en retrait.
Seul compte l’humain, debout, seule verticale dans le champ la plupart du temps, muet souvent et, par là-même, questionnant.
Et cet humain, la plupart du temps, c’était le personnage de Lazare, incarné par Yann Goven. Sa présence à l’écran est paradoxalement l’illustration de son absence au monde environnant ; sur le plateau c’était impressionnant...

Dominique, lors de l’une de nos discussions à bâtons rompus avant le tournage, me dit un jour qu’un film nous échappe toujours, qu’à partir d’un certain moment il acquiert une vie propre. Pendant le tournage, j’ai eu effectivement l’impression que c’était le film qui me prenait par la main et que je n’avais qu’à me laisser guider...
Pour les séquences de rêve, tournées en extérieur dans les plaines de la Beauce, trois mois après le tournage principal afin de profiter du printemps, Dominique voulait une caméra "aléatoire", dont les mouvements ne soient pas guidés par les déplacements des comédiens ou par la volonté de bien cadrer un paysage ou un visage. C’est Aurélien Devaux qui a tourné ces plans, car j’étais à ce moment-là parti sur un autre tournage en Afrique.

Tout le film a été tourné en Super 16, Fuji 250 Daylight.
Interpositif et internégatif "croisés" Fuji-Kodak. Positive Kodak 93.
Les finitions ont été l’occasion de quelques problèmes malgré la bonne volonté de mes interlocuteurs.

Équipe

Réalisation, scénario : Dominique Boccarossa
Image : Jean-Jacques Bouhon, Aurélien Devaux (scènes de rêve)
Décors et Costumes : Françoise Arnaud
Production : Ognon Pictures
Coproduction : Gémini Films, Maïa Films
Producteur délégué : Humbert Balsan
Distribution : Pirates Distribution
Chef électricien : Dominique Dehoua
Chef machiniste : Jean-Christophe Simon
Assistants opérateurs : Isabelle Quigniaud, Julien Pamart
Etalonnage : Jean-Marc Grégeois

Technique

Matériel caméra (Iris Caméra) : Arri SRIII,
Objectifs : Série Zeiss A 35 mm
Lumière : Locaflash
Machinerie : Télégrip
Laboratoire : GTC