Journée d’études Méliès

Jeudi 8 décembre 2011 à la Cinémathèque française

La Lettre AFC n°215

Georges Méliès est né le 8 décembre 1861 à Paris. A l’occasion de cet anniversaire, la Cinémathèque française organise une journée d’études consacrée à ce cinéaste visionnaire, réalisateur de plus de 500 films entre 1896 et 1913.

Méliès, homme-orchestre des débuts du cinéma, a incarné à lui tout seul presque tous les corps de métiers : réalisateur, technicien, producteur, acteur, scénariste, opérateur, truqueur, décorateur, et même architecte et bâtisseur du premier studio vitré. Méliès, excellent dessinateur, préparait soigneusement sur papier les décors de ses films, de même que les costumes de ses acteurs. Ses dessins, conservés à la Cinémathèque, témoignent de son grand talent et de sa vive imagination.
Il a été également prestidigitateur et directeur de théâtre. Pendant presque vingt années, Méliès a régné en maître absolu sur le monde de la féerie, de la magie et du trucage cinématographiques.

Cette journée d’études, dirigée par Jacques Malthête et Laurent Mannoni, sera consacrée précisément à la technique dans l’œuvre de Méliès. On sait que Méliès a débuté dans le cinéma dès 1896 en construisant, quasiment de ses mains, une caméra puis un projecteur. Il a ensuite développé de nombreuses innovations dans le domaine de la technique : montage, fondus, surimpressions, couleurs… Son studio de Montreuil était à l’avant-garde technique lorsqu’il a été édifié. Méliès possédait aussi un laboratoire qui lui permettait de développer et de tirer ses films. Il a été, incontestablement, un technicien du cinéma de grande envergure.

Attention ! Cette journée d’études sera suivie d’une séance de projection de films avec deux titres inédits de Méliès, tout récemment restaurés.

Conférences journée d’études :
14 heures Laurent Mannoni interviendra sur les débuts de Méliès en technique cinématographique : le magicien de Montreuil a assisté, émerveillé, aux premières séances du Cinématographe Lumière, mais n’a pu acquérir d’appareil. Il se rend alors à Londres et achète un projecteur Robert-William Paul qu’il transforme en caméra. C’est avec cet instrument qu’il découvre son premier trucage, l’arrêt de la pellicule. Comme Méliès a impérativement besoin d’un projecteur afin d’organiser des séances dans son théâtre Robert-Houdin, il conçoit ensuite, avec quelques associés, un excellent appareil 35 mm, le " kinétographe ". Par chance, ces deux machines historiques sont conservées à la Cinémathèque française et seront montrées lors de cet exposé.

14h45 Jacques Malthête parlera du studio Méliès de Montreuil, le premier bâtiment vitré d’envergure bâti pour le cinématographe. Trappes, coulisses, cintres, scène, décors mobiles, verres tamisés, volets réglables, lumière électrique, tout était prévu pour que Méliès puisse exercer son art du trucage. Méliès, ruiné, devra abandonner son studio. La propriété de Montreuil est vendue en 1923. Après guerre, malgré les efforts de la Cinémathèque pour sauver le bâtiment, tout a disparu, excepté le magasin de costumes qui ne sera rasé qu’au début des années 1990, par ignorance ou par désintérêt.

15h30 Jean-Pierre Berthomé analysera les décors de Méliès. La Cinémathèque française possède une grande collection de dessins signés par le cinéaste : croquis, esquisses de décors, plans, reconstitution de scènes… Le décor prend une grande importance dans l’œuvre de Méliès qui, on le sait, a horreur du vide : d’où la luxuriance et l’abondance des matériaux et ornements utilisés, comme dans un théâtre de magie du XIXe siècle.

16h30 Priska Morrissey traitera des costumes dans l’œuvre de Méliès. Certaines pièces mythiques sont conservées par la Cinémathèque, comme par exemple le costume du Voyage dans la Lune. Les vêtements qui subsistent sont quasiment tous bariolés de couleurs vives ce qui, a priori, s’accorde assez mal avec la pellicule orthochromatique. Des dessins de costumes subsistent également dans les archives. Ils témoignent de la dextérité et de l’imagination de Méliès, à la fois cinéaste et grand costumier.

17h15 Thierry Lefebvre parlera des trucages de Méliès. « Tout film de Méliès doit être considéré comme destiné à remplacer une expérience de prestidigitation au théâtre Robert-Houdin. Il n’est donc pas étonnant que ces trucs puissent sembler appartenir indifféremment au théâtre ou au cinéma », écrivait Jacques Deslandes. Et en effet, les changements brusques de décors, les apparitions, disparitions ou transformations instantanées de comédiens ou d’accessoires, les effets pyrotechniques, les changements à vue de costumes, étaient déjà utilisés dans les théâtres et scènes de magie. Mais Méliès développe aussi des trucages qui sont propres à la lanterne magique et au cinématographe comme le montage, le collage, les surimpressions, les fondus, la caméra mobile, etc.

20 heures Salle Henri Langlois
Soirée Méliès : lecture et projection de films rares en couleurs

Lecture de la correspondance de Georges Méliès par Sylvain Solustri et Betty Serman, comédiens et magiciens (durée : 30 minutes).
A la suite de la Lecture, un programme de films peints à la main ou au pochoir. Ces films seront accompagnés au piano et bonimentés avec les textes originaux de Georges Méliès.
Accompagnement au piano par Jacques Cambra
Projections bonimentées par Sylvain Solustri
En présence de Madeleine Malthête-Méliès. Soirée conçue et réalisée avec l’association Les Amis de Georges Méliès.

Deux films en couleurs de Georges Méliès, restaurés par la Cinémathèque française, seront présentés en avant-première le 8 décembre. Ils sont issus d’une collection privée, celle d’Olivier Auboin-Vermorel, qui a bien voulu déposer à la Cinémathèque ces deux films, de même que d’autres précieux incunables des débuts du cinéma (films Edison, films Nadar, films du Phono-Cinéma-Théâtre, films Marey…).
Ces deux films en couleurs de Méliès, invisibles jusqu’à présent, sont : Automaboulisme et autorité (1899) et Robinson Crusoe (1902).
Le premier, très court, est malheureusement incomplet, mais les images qui subsistent permettent tout de même d’apprécier l’humour de Méliès.
Robinson Crusoe a été tourné en 1902 après le fameux Voyage dans la Lune.

Méliès joue le rôle de Robinson Crusoe et le film a été tourné aux studios de Montreuil. Cette adaptation de l’œuvre de Defoe dure 15 mn environ et comprend 280 mètres de pellicule. La particularité de la copie originale nitrate qui a été retrouvée est son extraordinaire fraîcheur au point de vue des couleurs. En 1902, toutes les images de ce film ont été peintes soigneusement au pinceau et avec des couleurs à l’aniline, couleurs utilisées aussi pour les plaques de lanterne magique. Et les effets de couleurs sont précisément très nombreux dans ce film ; tous les trucages et la narration reposent sur l’utilisation des coloris.
Pour la première fois, Méliès mêle avec virtuosité trucages, décors et couleurs, avec une maîtrise extraordinaire. Un perroquet bicolore, des effets de foudre rouge, des explosions jaunes et oranges : c’est un vrai feu d’artifice et une merveille pour le regard du spectateur d’aujourd’hui.

Robinson Crusoe a été restauré en numérique (4K) par les laboratoires Eclair, pour la Cinémathèque française. Lorsqu’il sera présenté pour la première fois le 8 décembre à la Cinémathèque française, il ne s’agira que d’une première restauration, un " work in progress " qui sera achevé en 2012.

(Sources Cinémathèque française)