L’éditorial d’avril 2025, par Jean-Marie Dreujou, président de l’AFC

Grâce à la prodigieuse machine à reproduire la vie, le Cinématographe, les opérateurs Lumière organisèrent en France, en Russie, en Italie, aux États-Unis, au Japon, en Australie…, les premières projections publiques d’images animées.
Ces opérateurs, des hommes très jeunes, étaient de véritables aventuriers.
Ils travaillaient souvent seuls, et, à notre époque où une simple communication avec notre smartphone permet d’organiser sa vie, il est difficile de se rendre compte de la tâche de travail que cela leur demandait…

- Organiser le voyage (paquebot ou train) et acheminer tout le matériel (Cinématographe, négatifs, positifs, produits chimiques).
- Trouver un sujet sur place dans des conditions souvent difficiles et le tourner : deux tours de manivelle par seconde, 17 mètres de pellicule, 50 secondes de projection, one shot ! (on peut se rendre compte dans certains de ces films de la précision et de la rigueur de la préparation de la prise de vues).
- Développer le film (parfois simplement dans des sceaux !), en effectuer le tirage par contact face à un mur clair ensoleillé avec le Cinématographe, et développer ce positif.
- Trouver ensuite un local pour la projection et fournir l’alimentation électrique pour faire fonctionner la lanterne du Cinématographe.
- Communiquer sur cet événement et collecter la recette en tenant un dossier comptable.
- Se nourrir, se loger, voyager et vivre…

Tous les récits des opérateurs Lumière sont passionnants ! *

Thierry Frémaux écrit dans son livre Rue du premier film : « Lumière et ses opérateurs se posent des questions de cinéma, celles que formuleront des milliers de réalisateurs après eux : la force d’un sujet, la question du traitement, la vision d’une mise en scène, le jeu avec la caméra ».

Les opérateurs Lumière – Gabriel Veyre, Félix Mesguich, Charles Moisson, Constant Girel, Marius Chapuis, Alexandre Promio –, nos premiers collègues, étaient des artisans.
Notre métier devient de plus en plus formaté, voir bientôt robotisé… restons des artisans !

• Voir la page "Le Cinématographe Lumière" sur le site Internet de l’Institut Lumière.

* On pourra lire aussi la passionnante biographie d’Alexandre Promio écrite par Jean-Claude Seguin : Alexandre Promio ou les énigmes de la lumière.