"La Tragédie de Macbeth" : intrigue de palais
Entretiens avec Joel Coen et Bruno Delbonnel, AFC, ASC, par Benjamin BergeryLa tragédie de Macbeth : entretiens croisés avec Joel Coen et Bruno Delbonnel
par Benjamin Bergery
Suspense... Cette année marquera la cinquième nomination de Bruno Delbonnel, AFC, ASC, pour le prix prestigieux de l’ASC, et sa sixième nomination pour un Oscar de la meilleure photo – pour son travail magnifique sur La Tragédie de Macbeth, de Joel Coen. Les lauréats seront annoncés fin mars...
En attendant, je vous invite à lire mon article à propos du film sur le site de l’American Cinematographer, avec des entretiens croisés avec le réalisateur et son directeur de la photo, accompagnés d’une vingtaine d’images tirées du film.

La tragédie de Macbeth réinvente le chef-d’oeuvre de Shakespeare dans un mélange brillant et innovant de cinéma et de théâtre. Les images en noir et blanc, à la fois sobres et puissantes, sont le résultat d’une longue et étroite collaboration entre réalisateur et directeur de la photographie, qui a d’ailleurs imprégné de nombreux autres aspects de la conception du film.
L’intrigue est familière. Des sorcières disent à Macbeth (Denzel Washington), un chef de guerre écossais, qu’il deviendra roi. Macbeth partage cette prophétie avec sa femme (Frances McDormand), qui le persuade d’assassiner le bienveillant roi Duncan et de prendre sa place. Une fois couronné, Macbeth se sent obligé de tuer d’autres proches pour préserver son trône, mais il est hanté par ses crimes, tandis que la culpabilité de Lady Macbeth la pousse à la folie.
Ce Macbeth poétique et imaginaire rétrécit le cadre (au format 1,37) et simplifie les décors pour placer les comédiens dans un espace cinématographique intime et évocateur. La lumière aide à révéler les émotions complexes des personnages, et la finesse de l’image accompagne la subtilité du langage de Shakespeare.
Le Macbeth créé par Joel Coen avec Bruno Delbonnel s’inspire en partie des gros plans de La Passion de Jeanne d’Arc, de Carl Theodor Dreyer (avec le directeur de la photo Rudolph Maté), mais avec une image très contemporaine. La texture extraordinaire du noir et blanc légèrement teinté, développée de concert avec le grand étalonneur Peter Doyle, rappelle celle des tirages platine-palladium.


La "partition" de la lumière à travers le film est très riche, passant d’une grisaille brumeuse à des contrastes inspirés de Bergman et Nykvist, à un vaste paysage nuageux en studio, et aux ombres ultra nettes des "movers", les projecteurs automatisés des concerts rock. Ces projecteurs permettent aussi quelques scènes avec une lumière véritablement animée – fluctuante ou mobile – qui représente pour moi une des futures évolutions de l’image cinématographique.
En vignette de cet article, Lady Macbeth brule la lettre de son mari / Images fournies par Apple TV