Coupable

Coupable est le quatrième long métrage que j’ai tourné avec Laetitia Masson. Depuis bientôt quinze ans que nous nous connaissons, nos chemins se sont parfois éloignés, mais pour toujours se recouper. Et quel bonheur de retrouver une véritable cinéaste dont on reconnaît le style et l’univers à la seule vision d’une séquence prise au hasard. Certains pourront arguer qu’elle se répète, pour moi il s’agit d’abnégation, de travail, de recherche et d’audace. Et tout cela fait d’un réalisateur un artiste, avec son univers.

Coupable est un film policier. C’est une enquête sur… l’amour. C’est aussi un véritable " essai " cinématographique comme a pu l’être Pourquoi pas le Brésil.
Dans Coupable, il y a des morts, des assassins, des menteurs, des enquêteurs, une cuisinière, tous des hommes et des femmes qui cherchent à vivre en bonne intelligence avec l’amour. Malheureusement en amour, il n’est plus question d’intelligence…

Au cours des films que nous avons tourné ensemble, Laetitia a rencontré toutes sortes de conditions financières. Mais à chaque fois elle n’a dérogé à aucun des principes suivants :
- Un casting solide mêlé à un casting " sauvage " fait sur les lieux du tournage (et donc de l’histoire)
- Une équipe légère et réactive
- Un tournage rapide avec une liberté quasi totale pour ses comédiens.

Ce coup-ci nous n’avions qu’un très petit budget. Pour maintenir le casting envisagé et tourner la totalité du scénario, nous étions 20 personnes dans l’équipe technique au complet, et nous avons tourné en 4 semaines de 6 jours à Saint-Etienne. Les Stéphanois sont adorables, ce qui facilita bien des choses.
Nous avons eu le bonheur de filmer Hélène Fillières, Jérémie Rénier, Anne Consigny, Denis Podalydes, Amira Casar, Marc Barbé et Yannick Rénier.

Pour permettre un tournage aussi rapide, nous avons beaucoup travaillé les repérages, et la collaboration avec l’équipe déco a été primordiale. Sur ce film, c’est Pascale Consigny (chef déco) qui a été mon premier allié. Laetitia avait commencé des repérages bien en amont et l’univers était planté quand je suis arrivé pour les premiers repérages techniques. Certains décors étaient minuscules.
Nous avons alors arrêté les principes suivants :
- Une équipe image de 3 personnes : mon assistant Gabriele Buti, Samien, stagiaire stéphanois génial, et moi-même.
- Pas de machinerie
- Un matériel d’éclairage qui tient sanglé sur un diable
- Une caméra de poing que afin de l’avoir en permanence avec nous et tourner quand ça nous chante
- Maintenir absolument le format d’image 1:2,35
- Un travail de lumières dans le décor à construire avec Pascale Consigny.

La liste lumière s’est limitée à 1 Kino Flo 2 tubes 120 cm, 1 kit Single, 1 Mizar 500 W, 1 Pepper 100 W, 2 Mandarines, de la bidouille…
… Et la HD (modeste) s’est imposée._ Nous avons beaucoup panoramiqué, zoomé, et " caméra porté ", avec l’index en permanence sur la molette de diaph.
Pour ce qui est des caméras vidéo numériques, je préfère le rendu d’image créé par Panasonic à ceux des autres constructeurs de caméra, et je suis un fan de la Varicam dont le DVCPRO HD permet de faire une belle image, et à moindres frais si l’on n’est pas un " ayatollah " de la définition.

Pour garder cette idée de caméra de poing dans des décors minuscules, j’ai pensé à la petite Panasonic AG-HVX 200 (également en DVCPRO HD) qui enregistre des images en plein 4:2:2 à 100 mgb/s grâce à ses cartes de mémoire flash P2.
Cette caméra n’a pas les capteurs 2/3 de pouce de la Varicam (seulement 1/3 de pouce), et je croyais vraiment que de tailler encore dans l’image pour garder le format " Scope " allait tout massacrer… Elle n’a pas non plus d’optiques interchangeables.
Cependant, Danys Bruyères et Frédéric Valay chez TSF m’ont suivi dans cette idée et nous avons tourné des essais comparatifs avec la Varicam, en respectant toute la chaîne de postproduction envisagée jusqu’à la copie positive anamorphosée. Ils nous ont aussi aidés à mettre en place un protocole sûr pour sauvegarder nos images.
La différence était bien sûr visible dans la définition, la précision des basses lumières, et l’espace chromatique, mais pas au point de renoncer à la légèreté qu’offrait la HVX 200.
De plus, le système des cartes P2 permet de raccourcir la chaîne de montage en déchargeant directement les images en pleine définition dans Final Cut Pro. Après montage, il suffit de sortir le film en séquence d’images pour travailler l’étalonnage (ici sur un Lustre).

Mon camarade Didier Dekeyser et Catherine Aton chez Eclair étaient un peu sceptiques, mais après visionnage de la première copie, ils ont eux-mêmes été surpris des performances d’un outil aussi léger et bon marché.
Ils nous ont bien accompagnés dans la chaîne de postproduction et Raymond Terrentin a étalonné le film avec Laetitia car je n’étais malheureusement pas disponible.
J’ai l’air de vanter les prouesses d’un joli joujou, mais il est certains qu’on ne peut pas tout faire avec. Il a été important d’en approcher les limites en préparation. Laetitia et moi avons l’habitude de partager les risques, et d’en définir les limites en amont.

Images tirées de Coupable de Laetitia Masson

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Technique

Matériel caméra : TSF Caméra
Laboratoire de postproduction : Eclair numérique
Etalonnage : Raymond Terrentin