Disparition de Michael Chapman, ASC (1935 - 2020)
Né le 21 novembre 1935 à Welleslay dans la banlieue ouest de Boston, Michael Chapman passe une partie de son enfance à Sherborn, poursuit ses études secondaires à la "Phillips Academy", un lycée réputé d’Andover. Entre 1953 et 1957, il étudie l’histoire et la littérature à l’université de Columbia à New York City, (« Une culture inutile », dira-t-il plus tard) mais envisage malgré tout une carrière d’écrivain et de poète sous l’influence de la Beat Generation (Jack Kerouac, Allen Ginsburg...).
A partir de 1958, il sert deux ans durant dans l’US Army, affecté à la communication (Signals Corps), puis commence à travailler dans le fret ferroviaire au poste de freineur.
En 1962, Michael Chapman épouse Myriam Brun, fille de Joseph Brun, opérateur d’origine française installé aux Etats-Unis depuis la fin des années 1930 et qui jouissait alors d’une certaine réputation sur la scène du cinéma indépendant de la côte Est. Soucieux d’offrir de meilleures perspectives professionnelles à son gendre, Brun l’introduit alors à la fois dans le monde du cinéma et au sein du syndicat. Chapman commence à faire ses classes comme assistant opérateur sur des spots publicitaires, il assiste ensuite son beau-père durant les années 1965-67 sur Who Killed Teddy Bear, The Fat Spy et The Thanksgiving Visitor. Ils tournent aussi ensemble de nombreux documentaires en 16 mm à travers le monde. De retour à New York, Chapman intègre alors MPO, une célèbre production de films publicitaires, où il rencontre et travaille avec Gordon Willis dont il deviendra le cadreur à partir de 1969 (End of the Road), collaboration qui se poursuivra sur Le Propriétaire, Klute, et le premier Parrain…
C’est en 1973 que Michael Chapman effectua ses débuts comme directeur de la photographie sur La Dernière corvée, de Hal Ashby, réalisateur dont il avait cadré le premier film au côté de Gordon Willis. Il occupera de nouveau le poste de cadreur, à sa demande, sur Les Dents de la mer, de Steven Spielberg, (photographié par Bill Butler, ASC), avant de rejoindre Martin Scorsese sur Taxi Driver, en 1975.
Chapman excelle à restituer un univers urbain, New York, réinterprété dans des ambiances nocturnes glauques et sans recherches esthétiques incongrues, comme en 1978 avec le Los Angeles de Hardcore, de Paul Schrader. De sa conception de la photographie de films en général, il dira d’ailleurs plus tard : « La splendeur visuelle peut être une grave erreur. Cela ne devrait pas être beau, mais approprié. »
Durant ces premières années, il avait aussi collaboré avec les réalisateurs Philip Kaufman, Martin Ritt et Richard Sarafian. Installé sur la côte Ouest, il travaillera encore avec Carl Reiner, Roger Spottiswoode, Joel Schumacher, Ivan Reitman... Issu de la mouvance du Nouvel Hollywood, Michael Chapman s’orienta vers un cinéma plus "mainstream" : Les Cadavres ne portent pas de costard (Carl Reiner, 1982), Randonnée pour un tueur (Roger Spottiswoode, 1987), SOS Fantômes II (Ivan Reitman, 1989), Le Fugitif (Andrew Davis, 1992)... Il se frotta aussi à la réalisation : citons, entre autres All the Right Moves, en1983, et The Clan of the Cave Bear, en 1986, deux films photographiés par Jan de Bont, ASC.
Notons que Chapman se plaisait aussi à interpréter des petits rôles dans certains des films qu’il a photographiés. Il est, par exemple, le chauffeur de taxi qui mène les trois matelots au bordel dans La Dernière corvée ou le forain qui tient le stand de tir dans Doc Hollywood, en 1991.
Parmi les nombreux prix attribués à Michael Chapman, entre autres nominations :
- Camerimage Lifetime Achievement Award, en 2016
- Ojai Film Festival Lifetime Achievement Award, en 2010
- ASC Lifetime Achievement Award, en 2004
- Nomination à l’Oscar de la photographie pour The Fugitive, d’Andrew Davis, en 1994
- Boston Society of Film Critics Award, National Society of Film Critics Award et nomination à l’Oscar de la photographie pour Raging Bull, de Martin Scorsese, en 1981.
- Ecouter ou réécouter Michael Chapman interviewé en 2004, par Glen Ade Brown, sur le site Internet "Web of Stories".
- Lire l’hommage à Michael Chapman sur le site Internet de l’ASC.
(Notes rédigées par Marc Salomon, membre consultant de l’AFC.)
En vignette de cet article, une photo de Michael Chapman extraite de son "album noir" édité par Camerimage, en 2016